Mon Carnet de bord... Suivez mes aventures, semaine après semaine!

Juillet 2010

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Jeudi 1

Je retrouve mes deux accolytes au petit déjeuner, ça va, on est pas en retard cette fois-ci.
Je décide de pas partir trop tôt, volontairement, afin d'éviter la cohue sur Marseille. En faisant mon rituel tour de contrôle du camion je constate avec effroi que la jauge à fuel de la semie est au ras des paquerettes : toute la nuit la carrier a tambouriné en grande vitesse - ceci explique cela. Avec la peur de désarmorcer au ventre j'anticipe mon départ pour mettre du précieux liquide rouge à la station Esso d'à coté.

Je pars ensuite pour la cité Phocéenne dans les prémices d'une journée caniculaire. Je trouve mon client tout seul en plein Marseille, sans l'aide de personne, surtout pas de Philippon26 qui de toutes façons explique très mal les clients... J'arrive dans ce qui s'appelle un gros bordel : c'est tout serré, il ya des camions dans tous les sens, on ne sait même pas où se garer pour patienter...
Au début je pense avoir de la chance : on m'indique un quai, je me mets en place et j'attends. Je n'est pas grand chose à vider et je ne me fait guère de souci... erreur... je vais poireauter une bonne demie heure avant - puis une autre demie heure après le déchargement, tout cela pour 13 pauvres palettes, sans compter que j'ai un autre client dont la marchandise risque de se décongeler... En regardant les types je ne trouve nulle autre explication : c'est une équipe de bras-cassés! Celui qui s'occupe de ma semie surtout, il sort une palette - parle de foot 5 minutes - sort une autre palette - va boire un café - sort une autre palette - part mystèrieusement par là bas - sort une palette - n'arrive plus à faire fonctionner son chariot... et moi pendant ce temps je m'enrhume car je suis en T-shirt (c'est bien fait, ça m'apprendra)

Je me sauve de ce cauchemard et fonce sur Nice, pour ma seconde livraison. D'un cauchemard à un autre il n'y a qu'un pas : je tombe sur grosso modo la même équipe, version niçoise. Arrivé à 14h30 ils me déchargent à 17h30... alors que c'est bel et bien dans cette même boutique que j'avais dû me justifier mardi pour vider après 17h. Il y a des endroits comme cela où l'insignifiant routier est profondément insignifiant... aujourd'hui on me fait attendre 3 heures en plein cagnard, de quoi se griller la peau, de quoi se griller les nerfs.
En faisant le point avec moi-même je décide qu'il est bienséant de rompre tous contacts avec ces gens, avec tous ces types de réceptions, ces caristes, ces préposés au guichet, qui s'ennuient tellement engoncés dans leur médiocrité qu'abuser d'un pseudo pouvoir sur un insignifiant routier revèle du jouissif.

Allez du calme Régis, il s'agit de ne pas devenir trop haineux, dans toutes les entreprises il y a du bon, du mauvais, alors ne généralisons pas... quoi? je me parle à moi même? Oui, et alors?
J'entre en Italie par la porte sud-ouest, le soleil est au Zénith, la semaine prochaine c'est Garou, celle d'après c'est Where is my Flesh.
J'essaie de faire quelques vidéos, je ferai le film avant 2016 (si j'ai le temps)
Je roule jusqu'à Casale où j'ai un choix terrible à faire : chaleur ou moustiques? plouf plouf... chaleur! je ferme les fenêtre et j'essaie de m'endormir.

à Marseille

décidément...

Côte d'Azur

Vendredi 2

Et dire que certain paient cher pour aller au sauna!? Cette nuit fût un calvaire : j'ai d'abord tourné 3 heures dans ma couchette, j'ai hésité à essorer mes draps tellement ils étaient mouillés, finalement la fatigue à pris le dessus et je me suis endormi dans ma flaque.
Je ne surprendrai donc personne en écrivant que mon premier réflexe à été de me ruer sous une douche galciale, et ce malgré les cafards, la peste et le choléra... (non celle-ci était très propre)

Je recharge au nord de Milan, tout va très vite, c'est plaisant.
Je remonte donc tranquillement par le Mt Blanc; je m'arrète à Aoste pour éviter la polizia et faire mes courses, ça ressemble à un vendredi parmi tant d'autres.

J'arrive enfin dans la cour, et provoque malgré moi l'hilarité générale dans le bureau en entrant avec mes cheveux détachés... réaction de mon chef : "ho, on dirait un cocker!?", Ali : "ça va Ben Laden?", Isabelle : "non on dirait Jesus"... et moi je suis au milieu avec mon sourire niais... et dire que cela fait juste un peu plus d'an que mes cheveux poussent, et dire que je prévois une étude expérimentale sur 10 ans...
Je fais aujourd'hui connaissance de Pierre-Yves, nouveau venu et FDRien... et même lecteur de mon cdb... je suis une star!

Pierre-Yves se met au Volvo

Samedi 3
Dimanche 4
Lundi 5

Mardi 6

Voilà ce qui arrive lorsque l'on est habitué à partir le dimanche après-midi : se réveiller le lundi matin relève de l'exploit... et se réveiller le mardi matin relève de l'utopie. Bon, je ne vais pas me plaindre, un long-long week end ensoleillé s'achève, et un nouveau road-trip suèdois s'annonce. En réalité il n'y a qu'un seul petit souci pour moi ce matin au retentissement du réveil : je n'ai dormi qu'une heure et demie...
Je débarque donc au dépôt avec la tête dans les chaussettes, le gazouillement joyeux de la 4L n'a même pas réussi à me faire ouvrir l'oeil gauche... j'ai beaucoup de mal à émerger. Je retrouve mon carrosse dans un habit de carnaval : attelé à une semie des Tps Brevet. Non, ce n'est pas une erreur de ma part dûe au manque de sommeil, c'est juste pour dépanner. Quoiqu'il en soit j'ai ma Brevet en ce jour de résultat du bac, et ça c'est vraiment la classe. (ptin ce que je suis drôle)

Je sors de la cours sous les premières lueurs d'un soleil qui s'annonce féroce, je file tranquillement en direction de Mâcon pour une livraison rapide, je vais ensuite me mettre en place pour recharger.

Le chargement dure 17 minutes pour être précis, c'est dingue : 17 minutes pour plus de 20 heures de route à suivre... alors qu'on attends le plus souvent 20 heures pour 17 minutes de route à suivre. (oui j'exagère. Un peu)

Je remonte donc peinard en direction du Luxembourg, je suis fatigué et je profite pleinement de mes 45 minutes de pause pour faire un GROS-GROS roupillon... pendant que mon téléphone essaie de m'annoncer des appels, des mails, des SMS... bref on dirait qu'il n'a pas compris que je suis en train de dormir...

Je continue et prévois d'arriver sur Metz avec 9h... ce qui m'enchante peu... alors je me laisse guider par le vieux sage Phil-ozof-26 qui me dégote une pitoresque zone industrielle à l'entrée de la ville, une zone dans laquelle je peux préparer gaiement mes haricots verts pendant que mon frigo m'agace le tympan, une zone dans laquelle je n'ai pas de comptes à rendre.

A Nancy je n'étais pas encore sur réserve, à Pont à Mousson l'ordi de bord annonçait 135L... et arrivé à Metz il m'indique 15L et l'aiguille est tout en bas! En regardant à la lampe je constate qu'effectivement le niveau est alarmant... mais bordel comment peut-on travailler avec une jauge pareille!!!

Bourgogne

non je n'ai pas changé de boite

Mercredi 7

Là c'est la folie pure : voyez sur la photo ci-contre ce que m'indique l'ordi de bord au réveil : 0L, 0Km... alors que je n'ai pas encore mis le camion en marche! Peut-être consomme-t-il du gazole durant la nuit? peut-être me suis-je fait siffonné les 30 litres restants? après énièmme vérification, l'oeil et la lampe torche rivés dans le réservoir, je constate que rien à changé : il me reste un fond qui - je pense - devrait m'emmener jusqu'au Luxembourg, mais comment en être sûr sans jauge? Dans le doute je m'arrête mettre 40L sur l'aire de la Maxe et lorsque je redémarre l'ordi m'annonce 85L... no comment.

Ce temps perdu à me soucier du gazole me fait arriver juste avant l'heure critique au grand duché des luxembourgueurs. Avec mon fond de réservoir je roule jusqu'à la frontière Allemande pour faire le plein chez Esso. En arrivant je me gare d'abord dans l'entrée, sans géner personne, juste le temps d'aller retirer ma LKW Maut... A peine ai-je coupé le moteur, une femme - ou un berger allemand (de loin on distingue mal) me braille un truc de loin dans sa langue pas belle. En gros ça veut dire "toi là-bas, va te garer sur le parking!". Du coup je revois l'ordre des évènements : je fais mon plein direct.
Si je me gare dans l'entrée ce n'est pas par fénéantise de marcher les 300 mètres du parking à la station, c'est tout simplement parce que le parking est TOUJOURS plein et cette satanée taxe est obligatoire... sinon je ne perdrais pas mon temps ici... bref, il y a un camion devant le mien à la pompe, le chauffeur s'est barré je ne sais où sans doute pour finir sa coupure sans qu'on lui dise de bouger (ça aussi c'est une pratique très classe...) j'en ai bien marre et je vais chercher ma taxe en laissant moi aussi le camion sous la pompe, de toutes façons je ne peux pas en sortir.

Grand beau temps sur l'Allemagne, on se croirait ailleurs.

Je roule, je roule, et je roule sans inspiration aucune pour illustrer mon carnet de bord : je ne sais vraiment quoi prendre en photo. J'écoute un peu la radio pour réviser ma grammaire allemande, on ne parle que du match de ce soir contre l'Espagne, comme en France on entend beaucoup d'experts qui analysent tout et n'importe quoi, je crois même déceler qu'ils le font eux-aussi avec l'accent du Sud, du Sud Germanique, de la Bavière quoi...

Cette semaine je passe par le Danemark car il n'y a pas de prise électrique sur mon frigo-Brevet (je ne peux donc pas le brancher dans le bateau, il aurait fallu réserver en extérieur = galère); en 8h57 j'attéris sur une station au sud de Hambourg. En arrivant je vire une voiture qui squatait la meilleure place du parking PL, puis je file prendre une douche royale pour 2 euros. Il n'y a toujours pas un nuage et à peine 25 dégrés, cette soirée est très agréable.

ce matin, au réveil...

totem de Autohof

en Allemagne aussi

Jeudi 8

Bon sang mais il ne s'éteind jamais ce frigo : j'ai déjà consommé la moitié du réservoir; et puis j'ai dû casser les pieds et surtout les oreilles à tous mes potes autour...
Alors ce match? qui a gagné? aucune idée je dormais comme une masse.
Je pars au terme d'une grosse coupure de 11h, il est 3h30, l'Allemagne dort encore. Je roule jusqu'à Puttgarden, le bateau vient de partir mais les rotations sont très rapides : j'attends seulement 20 minutes (c'est moins long qu'au Mt Blanc par exemple). Embarquement puis débarquement au Danemark une petite heure plus tard. Je sors le premier du bateau, je suis donc tranquille de n'avoir aucun camion à doubler pendant un moment.
On ne voit pas grand chose du Danemark depuis l'autoroute : c'est plat, c'est vert, il n'y a rien sinon quelques éoliennes à l'horizon. En 3h00 je transite d'un port à l'autre, j'arrive à Helsingor, peut-être le plus joli paysage de mon voyage. Me voici à nouveau sur le bateau, il fait toujours aussi beau et des dixaines de petites embarcations naviguent entre les deux rives et les deux pays,certaines passent même à ras notre gros ferry qui semble peiner à se frayer un chemin.
Il est 10h15 lorsque je foule du pneu le sol Suèdois pour la troisième fois. Une bonne demie heure plus tard je suis chez mon client, j'ai l'impression d'y être venu 50 fois, surtout parce que certaines personnes me reconnaissent (peut être à cause de la chevelure canine)

Après avoir vidé je fais une demie heure de pause pour manger, je mange ici la même chose qu'à Brescia, Nice ou Rennes : je mange dans le camion. J'essaie surtout de ne pas perdre trop de temps car ma journée à débuté tôt et l'amplitude menace.
Je fais une ramasse dans un petit village pittoresque; l'accès à l'usine est assez périlleux et je n'en reviens d'avoir trouvé ma route tout seul. Je charge, je complète 20 Km plus loin; une fois la semie pleine je fonce sur Malmö : ça va le faire pile-poil avec mes heures pour atteindre le port. Je ne dépasse même pas l'amplitude à 15 minutes près, du véritable travail de pro!

J'ai deux heures d'avance sur le bateau, j'en profite pour décompresser un peu : fenètres ouvertes, légère brise, chant des mouettes, on se croierait presque en vacances.
Je monte sur le bateau dans les derniers, du coup j'écoppe d'une place bien pourrie au milieu du premier niveau, peu importe l'essentiel étant que j'aie une fois de plus une chambre individuelle, je vais pouvoir avancer mon carnet de bord. Avant cela (car j'écris tjs mon cdb au milieu de la nuit) je mange au resto en vitesse puis je sors profiter du superbe panorama sur Malmö. Il fait un peu plus nuit que la dernière fois mais c'est toujours aussi beau. Je rejoins ma cabine à 23h.

les camions rallongés roulent aussi au Danemark

panorama suèdois

culture américaine

j'ai croisé lui

j'ai pris cette route

Vendredi 9

Encore une fois j'ai trop forcé sur le petit dejeuner... je le sais pourtant... mais la tentation de toutes cette nourriture à volonté est trop forte; et puis il y a plein de choses que je n'aurais jamais idée de manger le matin : exemple du concombre, des pommes de terres, des cotelettes de porc, des steack... ou alors je n'ai rien compris et j'ai tapé dans les préparations du repas de midi?... Je déboute ma journée en frisant l'overdose calorique; et dire que je n'ai rien d'autre à faire que de rester dix heures assis sur mon siège...

De ce coté de la Baltique il fait déjà nettement plus chaud : on atteind les 37 dégrés vers midi à Dortmund, c'est en tout cas ce que mon tableau de bord indique car perso je ne sens rien avec la clim' qui maintient un bon 8° à l'intérieur.
Je suis assez surpris de ne rencontrer que très peu d'embouteillages. Il y a cependant une ambiance de départ en vacances : les voitures sont chargés, le clébard suffoque dans le coffre, les tenues sont légères et les cuisses sont blanches... voilà tout ce que l'on peut voir depuis le poste d'observation.

Il me faut attendre Cologne pour le premier bouchon de la journée; pas énorme. Je m'arrète ensuite 45 minutes dans un autohof bien merdique vers Blankenheim : je retire ma toll collect ainsi que mon eurovignette indispensables pour la suite du parcours... Un tour en Suède c'est environ 1 Kg de tickets en tous genres pour les autoroutes, les bateaux, le gazole...

Me revoici au Grand Duché des Luxemburgiens pour une grosse heure de traversée merdique, je suis à destination à 18h20. Il fait chaud, trop chaud, une fois le moteur et la clim arrétés je deviens ce clébard qui suffoque dans le coffre, à la différence près que je ne tire pas la langue... et aussi que je ne pars pas en vacances.

aujourd'hui : canicule

Samedi 10

wahou, je me suis loupé ce matin : j'ai mis le réveil à 3h30...et j'ai ouvert un oeil à 5h... ce n'est pas trop grave, j'ai bien dormi et surtout je n'ai pas de rdv pour mon rechargement en Moselle.
A 5h30 le Luxembourg est déjà pris d'assaut par les caravanes, cette journée s'annonce effrayante. Je fais mon plein à Berchem (car j'ai une carte de fidèlité qui me permetra d'acheter un Snikers dans 4 ans si je continue) je prends ensuite ma taxe allemande pour la portion Perl-Saarlouis nettement moins fréquentée et me reprochant directement de mon client.

A 7h10 je suis à quai, j'ai cravaché. Le chargement est long, très long... les papiers encore plus long... alors pour tuer le temps à grands coups de plumeau je fait le grand ménage d'été dans la cabine.

Je décolle à 10h, direction Bourg en Bresse. Tout ce que je peux dire de la Moselle c'est qu'il y a des grands champs de blé et... et c'est tout.

Je descends par la nationale, ça roule très bien. Aussi invraissemblable que cela puisse paraître aujourd'hui je n'ai pas envie de manger dans le camion : je n'ai plus grand chose dans le frigo et j'ai fait le ménage... alors je cherche un endroit... que je ne trouve pas. Les restos sont fermés, les cabanes à frites me donnent la nausée, les hyper-marchés sont hyper-inaccessibles... et pendant ce temps le tachy déroule le temps sans vergogne... à 4h15 de volant j'abandonne, je viens de passer Besançon et je me résouds à finir la boite de pâté du frigo ainsi que le fond de ricotta. 4h20 de volant : alerte rouge! au bout d'une ligne droite je vois une vielle maison, c'est un resto, il ne paie pas de mine mais je m'y arrète, je n'ai plus le choix. Il est 14h30 et j'ouvre la porte pour voir à quoi ça ressemble... je tombe sur un vieux derrière le comptoir qui m'invite à passer en terrasse "car je serai mieux là-bas pour manger". Wahou... trop sympa! il n'y a plus personne mais je me fais servir comme un prince, comme un prince de Lu.

Alors je reprends la route content, et calé.
Je roule jusqu'au dépot, je laisse tout en plan et je fonce sauter dans ma piscine... et si j'ai pas de piscine je sauterai dans ma baignoire!

le soleil se lève sur le Luxembourg

patrimoine de Lons le Saunier

Dimanche 11

Après une journée de bricolage expérimantal qui m'a value deux beaux coup de soleil sur les épaules, me voici reparti sur les routes, toujours avec ma semie Brevet. Finalement on est pesque mieux dans le camion par un temps pareil : avec la clim' on oublie les 35°.

Ce soir c'est la grande fête du football mondial, la finale, j'écoute assidument à la radio bien que n'étant ni pour l'Espagne, ni pour les Pays Bas... j'étais pour la Corée du Nord, mais bon voilà...
je n'ai pas un énorme programme : juste desscendre à Carpentras pour livrer demain matin. Je pensais trouver une route désertée par l'angouement médiatique mais non : ça roule quand-même, les vacanciers sont bien là, les Hollandais sont juste un peu moins nombreux.
Je passe Lyon, je reste coincé pour la 6875 fois au péage de Vienne car mon télépass NE MARCHE PAS; puis je déroule la vallée du Rhône en restant stupéfait devant un nuage assez hallucinant (voir figure 1).

La nuit tombe lorsque j'arrive à destination. Iniesta propulse tout un peuple vers la gloire au moment précis où je trouve mon client, ce qui me propulse moi aussi vers la gloire... et se traduit concrètement par cette réaction : "ha cool, c'est ici...". Le seul problème c'est que le portail est fermé et la rue est étroite. Voyant de la lumière je tente l'interphone... Je tombe sur l'équipe de nuit qui me fait rentrer et qui, à ma grande surprise, décide d'anticiper le déchargement me permettant ainsi de dormir au calme... au calme mais dans la rue car je n'ai pas le droit de rester à l'intérieur...

Je suis donc à moitié content : vide mais sur un bout de parking pas top, le cariste me l'a indiqué. Je ne suis pas rassuré car j'ai toujours entendu parlé de Carpentras comme d'une ville où il est préférable de ne pas s'aventurer pour les coupures...
Ne vivons pas dans la psychose.

figure 1

Lundi 12

Hier soir j'ai programmé mon réveil à 10h, avec l'intention de profiter pleinement de ma coupure pour rattrapper quelques années de sommeil en retard. J'y ai cru, d'autant plus que le frigo est éteint et que je suis sur un parking où personne n'est sensé me réveiller. Et pourtant! elles se sont mises à plusieurs pour me sortir du lit! elles ont encerclé le camions et ont commencé, dès les premières lueurs du jour, à actionner leur organe phonatoire, créant ainsi cette symphonie diatonique saccadée qui fait la différence entre la Provence et le Cantal : la "cymbalisation" des cigales. Bon... au début ça a son charme, ça met un peu de soleil dans les oreilles et dans les coeurs... mais lorsque la cadence est soutenue par des dixaines voire des centaines de bestioles, juste au dessus du toit ouvrant, ça énerve... ce matin j'en viens même à regretter le son sourd, gras et chaotique de mon Carrier - j'y suis plus habitué.

Je recharge à Tarascon, du moins c'est normalement à l'ordre du jour. Car concrètement lorsque je me présente à l'usine, à 11h20, le type des expé m'invite à revenir plus tard... _dans 1h? _non plus tard!... _en début d'après midi? _non encore plus tard!... vers 15-16h? _hummmouai, on essaiera de charger mais je te garanti rien, t'as rendez-vous à 18h...

Bon... restons calme...
pour sortir de l'usine je suis contraint d'escalader la cloture (qui doit bien faire 2 mètres) car personne ne deigne ouvrir; je regagne ensuite mon camion pour aller me garer ailleurs, à l'ombre de préférence. Oui, j'ai un après-midi à attendre par une température de 35° : il s'agit de ne pas sécher sur place derière le pare-brise.
Il y a un Intermarché tout proche alors je vais m'y ballader, pour découvrir le pays des mousquetaires, ce fantastique pays où la vie est moins chère... même si cette vie n'est pas "la vie, la vraie" comme chez Auchan. J'achète du riz, des tomates, des chocos et des pêches... je suis sûr que cela vous passionne.
Je mange vite-fait à la cafétéria car il fait trop chaud dans le camion; ensuite je refais une tentative à l'usine pour voir si un éventuel chargement est envisageable... sans succès... alors je marche un peu dans cette zone d'activité, j'essaie d'égayer mon esprit : "ho regarde là-bas?! une poubelle!... ho puis ça c'est quoi!? une bouteille de pisse!..." je flâne un bon moment comme cela sous un soleil torride, je ne suis même pas dégouté où énervé, mon cerveau doit être en veille pour surchauffe, je pense.

L'histoire retiendra que j'ai quitté cette zone, semie chargée, à 18h30 précise. (18-11=7 pour les nuls en maths)

Je remonte dans le 74, avec 4h20 j'attéris sur une aire d'autoroute toute proche d'Annecy. Je fait le créneau du siècle pour me caser dans l'ultime place vacante, je passe la nuit ici en espérant ne pas me faire réveiller par les cigales savoyardes demain.

pauvre bête...

traversée laborieuse d'Avignon

Mardi 13

On dort bien en Haute-Savoie, pour preuve : je grapille une heure de sommeil supplémentaire eu égard aux appels désespérés de mon téléphone-réveil. No stress, avec le coup qu'ils m'ont fait hier au chargement, je n'ai aucunement l'intention de m'arracher pour la livraison. J'arrive donc tranquillement vers 9h30, je passe direct à quai. J'échappe de peu à la mort en ouvrant les portes de la semie : une des deux saloperies de barres d'arrimages (trop lourdes et inefficaces) bascule en ma direction, je l'évite d'un saut de cabrie sur la droite - elle s'écrase par terre.

Une fois vide je recharge chez un transporteur tout proche, puis je prends la direction du dépôt. Jusqu'ici je ne connais pas encore mon programme pour la suite, mais je suis persuadé qu'en arrivant à Bourg avec à peine 3 heures de volant j'ai de grandes chances d'aller visiter l'Italie le temps d'un jour férié. et bien non. J'attelle une taut', je vais faire une ramasse au millieu des champs, et me revoilà au dépôt. La suite?... la suite : demain. Je n'ai rien fait de la journée mais cette dernière s'achève, je ne m'y attendais pas, pour une fois ça tombe très bien j'ai une grosse soirée-concerts de prévue. Je prends tout de même le temps de laver le camion, histoire de travailler un peu quand-même : parti dimanche j'en suis à seulement 800Km.

21h je fonce à Ploufagain avec mon plus beau t-shirt.

petit tour en taut'...

...dans les environs de Bourg

l'ensemble complémentaire

Mercredi 14

J'avais prévenu mon chef que j'allais surement dormir dans le camion pour soulager la 4L de quelques dixaines de pénibles Kilomètres... mais je ne m'attendais pas à le voir en rentrant de ma soirée, ce matin, à 7h30. Oui... ça le fait moyen, ça fait pas très sérieux... mais au moins je me suis fait payer le café.
Je dois partir pour Bordeaux à midi, alors je vais me coucher un moment, au fond de la cours, à l'ombre car il fait déjà très chaud. Je me réveille 3h plus tard, je suis plutôt en forme, je passe un coup de rouleaux et je me sauve.

Il n'y a pas un camion qui traine sur la RCEA, ils sont tous échoués sur les bas cotés. Il n'y a pas énormément de voitures non plus, mais au niveau de Charolles je tombe sur un specimen qui à lui seul va parvenir à me sortir de ma létargie : cela faisait un moment qu'il tendait le museau derrière moi pour scruter l'horizon avec l'intention de me doubler. A deux reprises il s'est même fait klaxonner car il empiétait dangereusement sur la voie d'en face... il a enfin réussi sa manoeuvre, et, une fois devant moi, selon le grand rituel de la corpoartion des "casses-couilles" il a stagné à 90km'h... 87Km'h... 92Km'h... et ainsi de suite; jusqu'ici rien de vraiment extraordinaire, j'ai maintenu une distance de sécu en l'insultant de tous les noms, comme d'habitude...mais mon casse-couille s'est soudain mis à faire des écarts, des petits écarts pour commencer, puis des grands... A mon avis il commençais à s'endormir peinard, sur la RCEA. Ca a duré 5 minutes... et tout à coup... sans explication rationnelle... il a décider de s'arreter sur un refuge en freinant brusquement à même la route, sans clignotant... c'était la surprise du chef. J'ai tout pilé, et tandis que je lui exprimait ma rage à grand coup de klaxon, mon vainqueur ma fait un ptit geste comme pour dire "ha excuse moi" par la fenêtre... Voilà... J'ai failli me mettre sur le toit mais s'en est-il rendu compte?

Température à midi à Bourg en Bresse : 35°. Température à 16h à Gueret : 17°.

Cela fait un moment que je cherche un recoin quelconque pour poser mon camion le temps d'une coupure... en vain. Il n'y a aucune place, nulle part... alors lorsque le tachy affiche 4h20 c'est l'alerte rouge : je sors de l'autoroute A20 je roule au pif... et je me pose dans une zone, devant un champ, avec 4h31. Cet axe centre-Atlantique est lamentable.

Après mon repas de 16h30 je repars direction Bordeaux. A 21h15 je suis devant mon client, j'ai rendez-vous à 22h.
Le portail est fermé et nous sommes déjà 5 devant; toutes les 5 minutes un nouveau camion arrive, si bien à 22h la rue est blindée. Un réceptionnaire vient prendre les documents, il me dit d'attendre, pour une durée indéterminée... et lorsque je lui demande "mon attente, c'est en minutes? en heures? en jours?" il me répond "bah en heures ça c'est sûr"... cool! ça veut dire que vendredi je ne serai plus là!

La Rochefoucault

Jeudi 15

Je ne développerai pas sur la nuit que je viens de passer, je tiens à laisser une image positive de mon métier dans ce CDB.
Alors soyons joyeux bordel! Ma journée débute à midi et j'ai pour mission d'aller recharger dans le Médoc. J'en suis ravis car le Médoc je ne connais pas... un petit efferalgan en cas de fièvre mais rien de plus. (dois-je vraiment écrire ce genre de blague et passer pour un gros beauf uniquement pour faire rire Sweden?)

Ma mission est d'aller charger des pommes de terre au millieu des champs, je préfère ça à n'importe quelle zone industrielle. Pour m'en sortir dans le désert Girondin j'appelle l'expéditeur afin qu'il m'indique le meilleur chemin de terre à prendre. Et question terre je vais être servis : les derniers Km m'ont donné l'impression de faire une étape du Dakar, j'arrive avec un camion tout crade mais bon sang j'aime ça!
Mon enthousiasme retombe un peu lorsque j'apprends qu'il y a, ici aussi, une longue attente pour le chargement... j'ai définitivement la poisse. Alors je pose dans la poussière et j'attends. Je regarde les tracteurs défiler avec leurs bennes géantes, ils assurent les rotations entre les champs et les petites mains des travailleurs estivaux qui trient de la patate à en perdre la raison. Pour passer le temps devant cette organisation fourmilière je décide de manger, des carottes.

Deux camions chargent en vrac et puis c'est à mon tour, non pas en vrac comme je l'ai redouté un instant, mais en big-bag. Alors j'enfile les bottes et je vais crapahuter dans la terre car ici il n'y a pas de quai, pas de cariste, pas de hublot de réception... et on s'en porte pas plus mal.
A 18h mes 22 sacs sont calés dans le frigo, j'ai de quoi faire des frites pour au moins deux mois (j'aime beaucoup les frites), je m'en vais en respectant la température de transport : 12°, mais en restant perplexe à l'idée de me faire imposer une température de transport alors que les deux camions précédants chargent la même chose en benne...

Je pars pour Marseille.

Sur la route j'apprends que Fredo01, mon gastronome de frère, s'aiguise les papilles à Montauban. Pour une fois ça tombe pile poil : j'ai une coupure de 45 minutes à faire dans les environs et j'ai faim... je sors donc à Bressol ZI pour manger en famille dans un resto dont j'ai oublié le nom mais dans lequel on mange très bien.
Un petit coup de baguette magique et mes 45 minutes se transforment en 1h15, mais bon, hé, ho, je peux me le permettre quand même : depuis dimanche soir je poireaute à cause des autres!

Je reprends le volant pour un road trip solitaire, à 3h du matin j'attéris au péage de Arles, il y a une belle place sans voisinage, je fais la manoeuvre et je coupe tout.

sur la piste

pratique pour tondre la pelouse

Dakar 2010 en Gironde

Régis à la ferme

Vendredi 16

J'ai programmé la sonnerie insupportable de mon réveil à 11h mais dès 9h la chaleur vient perturber mes rèves les plus fous. Je trainâsse néanmoins dans la moiteur jusqu'à 11h50, puis je saute de la couchette pour décoller à 12h.
Je suis à destination en tout début d'après midi, juste pour la fin de la pause-déjeuner. Je vide mon tas de patates et je contourne la cité Phocéenne, direction la poubelle du littoral : Fos sur Mer. Je suis assez surpris de voir une horde de vacanciers profiter du soleil à deux pas des raffineries, des pétroliers, des acieries et des pollutions en tous genres; je suis surpris aussi de rencontrer aussi des flamands roses, ça change des poulets de Bresse...
Je recharge dans la zone Distriport en à peine 20 minutes, pas de doute : nous sommes bien vendredi après midi.

Il ne me reste plus qu'à remonter sur Bourg. Je ne sais jamais par où sortir de Fos : le plus logique serait par Miramas mais il me semble que c'est interdit... alors par élimination je passe par Arles/Avignon.

Je mets 20 L dans le frigo à Loriol, car il est en bas de réserve et le désamorçage menace. Je fais ensuite une pause à Livron, j'en profite pour faire ma célèbre salade de fin de semaine : assiète composée de tout élément comestible susceptible de péremption qui traine dans le camion.

Je remonte jusqu'au dépôt engoncé dans une circulation stressante : touristes, orages, collègues stressés par les interdictions... bref je suis content d'arriver devant le portail des Tps Asotrans, même s'il devient difficile de le franchir avec cette saloperie de réaménagement de la zone Cénord : du grand n'importe quoi!
Je rentre au milieu de la nuit, crevé par cette semaine passée sous le signe de l'attente interminable.

sympa les vacances!

flamands roses sur paysage gris

au soleil

Samedi 17
Dimanche 18

Lundi 19

Lundi matin, de bonne heure, d'humeur moyenne, je traverse la bresse brumeuse à dos de 4L pour rejoindre mon camion, si possible avant 5h45. J'ai très peu dormi, à peine 3h - j'ai du mal. Le soleil levant, l'odeur des blés tous justes moissonnés, la rosée matinale sur la croupe des vaches... c'est de toute beauté... mais je retournerais bien me coucher quand même.
J'arrive au dépôt, pas en avance. Avant de partir je doit atteler une semie (c'est mieux), puis je dois compléter mes réservoirs au maximum : cette semaine je vais en Croatie. C'est mon deuxième voyage vers la Hravatska, je suis content d'y retourner.

6h15 je sors de la cours avec mon quart d'heure de retard habituel, direction Annemasse pour faire la déclaration en Douane - la douane de Mâcon ayant récemment fermée ses portes.
A 8h je suis chez Gondrand pour 2h de paperasse... des formalités administratives que je suis sensé avoir étudié à l'IUT mais je préférais ragarder les camions par la fenêtre à l'époque... heureusement je tombe aujourd'hui sur une personne très compétente qui parvient à me confectionner un dossier clair malgré les nombreux expéditeurs, afin d'affronter demain la redoutable douane Croate.

Je reprends la route, bascule coté italien et fonce sur Torino car j'ai deux livraisons à faire avant la Croatie. A 14h je me débarasse de la première, à 16h je vide la seconde près de Tortone; il ne me reste plus qu'à rouler vers l'Ouest. A peine ai-je repris l'autoroute que je me fais pièger dans un énorme bouchon : il y a un camion en feu quelques Km devant, et moi je suis à deux doigts de m'endormir tellement cette attente est pesante.
Une grosse demie heure plus tard le cortège se débloque; en 10h je prévois d'arriver quelquepart avant Verona, je tente plusieurs stations mais il n'y a déjà plus de place, alors je décide de couper sur un refuge, mais j'en choisis un bien : un pas trop près de la route.
Ce soir il fait beaucoup trop chaud pour me préparer à manger, je m'étale dans la couchette et je dors.

zoom sur l'étiquette Evian

le St Quentin Fallavier Italien

un camion en feu, 3/4 d'heure d'attente

Mardi 20

Je boirais bien un café pour me mettre en forme, mais il n'y a toujours pas d'autogrill sur les refuges... je me rabats donc sur une briquette de Candy'up goût vanille : non seulement j'ai l'air bête avec ma briquette au volant du camion, mais en plus ce breuvage laisse en bouche un arrière goût de lait sucré, pâteux, immonde... pour rettraper le coup je mange des brugnons : 1, 2, 3... 6... le sac y passe, c'est bien meilleur.

Pour ce voyage je décide d'entrer en Slovénie via Gorizia, afin d'éviter l'autoroute sinueuse de Trieste où le touriste pullule à cette période de l'année. Je fais le bon choix : l'autoroute est de ce coté-ci très peu fréquentée, les paysages sont magnifiques. Comme la dernière fois je suis subjuguer par autant de collines et de forêts, ça donne envie d'y venir en vacances, en 4l. La Slonévie se traverse très rapidement, même en camion. En un peu plus d'une heure j'approche déjà Ljubljana, je fais une 45 minutes sur une station OMV afin de rassasier mon frigo en fuel, il tourne sans relâche pot depuis hier.

L'autoroute est terminée entre Ljubljana et Zabreb, elle se fofile dans la campagne et offre des panoramas imprenables sur les collines et les forêts, ce qui très étonnant.

Il est 12h30 lorsque j'entrevois déjà l'autre bout du pays, j'arrive à la frontière Croate, et ici on ne passe pas comme on veut...
Pour commencer j'ai à faire à un douanier Slovène bête et borné : il me demande quelquechose, je ne comprends pas ce qu'il veut alors je lui présente des trucs au pif (mon passeport, mon autorisation bilatérale, un paquet de chocos... et cet imbécile hausse la voix, comme si j'allais mieux comprendre... alors je lui donne tous mes documents, que j'avais soigneusement rangés avec des petits trombonnes... il détache tout pour jetter un oeil rapidement, puis il me rend un gros tas de feuilles, car il en a rien a battre d'un clampin de routier comme moi. L'étape suivante est le passage sur la bascule avec un douanier qui ne m'écoute pas et ne regarde pas le papier avec la tare inscrite dessus (si bien qu'il enregistre une tare inexacte)... je présente ensuite mon passeport à une douanière qui regarde ça avec dédain, j'en ai fini pour le coté Slovène, mais quel plaisir de cotoyer des gens aussi charmants!?!
Me voici maintenant coté Croate pour le gros morceau de la journée : l'attente au bureau de douane. La dernière fois cela avait duré 7 heures, j'ai bon espoir de faire mieux. Il s'agit du même bureau de transit, derrière la vitre se trouve un agent pas communicatif du tout, qui n'hésite pas à me mettre des gros vents lorsque j'essaie de lui poser des questions... c'est déroutant. Au bout d'une grosse demie heure d'attente il m'invite à entrer dans le bureau et à m'asseoir. J'imagine alors qu'il va m'intérroger au sujet de la marchandise déclarée, mais non... je m'assieds et j'attends... en respirant malgrés moi les épouvantables effluves tabagiques générées par ce mec qui s'en allume une toutes les 3 minutes : j'étais mieux dehors!
Le temps passe, cela fait 1h30 que je suis là... je m'ennuie ferme... je fais mine de regarder les trucs accrochés au mur, puis au bout d'un moment ça me soûle alors je regarde mes chaussures, je cale ma tête dans la paume de ma main, et j'essaie de ne pas m'endormir. Mon transitaire à l'air de s'éclater à brasser du papier en fumant des clopes... chacun son trip...en tous cas il persiste à ne pas communiquer.
Heureusement comme la dernière fois le destinataire arrive pour faciliter les formalités. Mais la chance n'est pas avec nous : une panne informatique vient compliquer ce qui l'était déjà bien assez, ensuite il faut se soumettre aux contrôles sanitaires, aux contrôles vétérinaires, aux contrôles douaniers... l'après midi se déroule et le temps passe suspendu au bon vouloir de ces différents intervenants... la nuit arrive et je suis toujours là. Sur le parking il y a des routiers de tous horizons... enfin surtout d'horizons situés à l'Est; aucun Français - cela est peu surpenant.
La situation se décante à 22h45, après plus de 10h d'attente. Bien entendu mon amplitude est cramée et je suis contraint de dormir ici. Dimitri, le destinataire, est resté jusqu'au bout ce qui est très sympa pour la traduction...

Avant d'aller me coucher, éreinté par autant de glandage, je fais un détour par les sanitaires, ces sanitaires que j'avais trouvé incroyablement propres l'an dernier. En franchissant le seuil je tombe sur un mec qui se lave les pieds dans le lavabo, il y a de l'eau partout par terre, il n'y a plus de papier nulle part, les portes savons et plusieurs mitigeurs ont disparu... ça pue... c'est grade... du coup j'improvise une toilette au camion avec mon bidon et mon petit marseillais. Il fait tellement chaud dans les coffres du volvo que l'eau est bouillante et le caoutchou de mes gants a fondu.
J'essaie ensuite de dormir dans cette même cabine.

colline slovène

Ljubljana-Zagreb : un vrai billard

toi qui es si malin : essaie de dire "Krsko"

fin du parcours : douane Croate

Mercredi 21

J'ai rendez-vous à 6h45 au nord de Zagreb, je décolle de la douane à 6h00; en présentant mes documents tamponés à l'ultime contrôleur, ce dernier les regarde qu'à peine, apparemment plus intéressé par son journal...
Me voici donc coté Croate. Je paie le péage en Kuna, le dollar local, mais je ne quitte l'autoroute au bout de quelques Km pour prendre la nationale, elle est interdite mais il faut la prendre. Je suis à l'heure au rendez-vous, comme la dernière fois il s'agit maintenant de suivre la camionette de mon destinataires sur les routes de campagne sinueuses. Je reconnais assez bien les environs, je mets la caméra sur le tableau de bord et je fais quelques prises de vue... j'en ferai peut-être un film un jour, après celui sur la Suède - la mise à jour de mon portrait - un billet d'humeur et un film d'animation...

A 7h30 je suis en place pour vider, après la délicate manoeuvre à contre-main. A 8h je remercie une fois de plus Dimitri pour son aide et je repars vite en sens invers car un rechargement m'attend en Italie... pas le temps de profiter de l'endroit, comme d'habitude.

Le passage de la frontière à vide est beaucoup moins stressant, cependant il prend bien une heure car nous sommes nombreux. Les douaniers se montrent toujours aussi hostiles, pédants, hautains, détestables... bon sang mais c'est quoi leur problème? on a l'impression de devoir se justifier de venir livrer dans leur pays, d'être coupable et sousmis à la toute-puissance de leur costume de gala... ce douanier qui hausse débilement la voix parce que je ne le comprends pas, pour qui se prent-il, sait-il seulement que j'ai fini premier au gala de rock&roll de Pont de Vaux en 1994? un peu de considération bordel!

Je retraverse la Slovénie grace à la nouvelle autoroute, je me fais une place parmi les caravanes pour faire 45 minutes à Postojna, puis je continue et ressors du pays via Nova Gorica - même route que pour l'aller.

Je recharge à Portogruaro, en Italie. Thomas qui a déjà fait ce client me dit qu'on lui avait donné des produits au termes du chargement... alors j'essaie de faire bonne figure, pour remplir moi aussi mon frigo. J'aide à pousser les palettes, je monte/je descends la semie pour qu'elle soit toujours à niveau, je mets des coups d'épaule dans les cartons losqu'ils dépassent... bref je suis au taquet et une fois le chargement terminé je reste devant, les yeux grands ouverts, les oreilles dressées... à deux doigts de donner ma papatte... mais que d'alle!!! le cariste signe mon CMR et "merci au revoir"... dégouté...
Avant de partir je fais un passage par la case doccia : c'est grand luxe, c'est tout propre, ce serais parfais s'il n'y avais pas cette vitrine qui donne sur la cours de l'entreprise en guise de mur : j'ai l'impression de me doucher dehors.

Je repars chargé et propre, je prends une interdiction PL sur une dixaine de Km : il s'agit de la route par laquelle je suis venu - qui est interdite dans l'autre sens, je n'ai pas sû quoi faire en arrivant devant le panneau.
Je reprends l'autoroute et roule jusqu'aux abords de Verone, je trouve cette fois-ci une superbe place à l'entrée d'une station - sans risque de me retrouver coincé demain matin (un risque à prendre en compte en Italie)
Il fait très très très trop chaud... dormir relève de l'exploit.

les environs de Zagreb, au petit matin

sur la route

salut mec!

en Slovénie

nouveau Scania (sauf carénage?)

Jeudi 22

Réveil à 2h30... cafe lungo à l'autogrill et c'est parti, direction Lyon. J'ai un peu de mal à sortir de la station : il y a tout juste un sillon possible entre les camions entassés; je me pose ensuite sur l'autoroute, voie de droite, pour 4h de musique qui vont m'emmener jusqu'à l'autoport de Susa. Une coupure, un autre café, et j'escalade jusqu'au Fréjus pour redescendre coté français et arriver sur Lyon à 11h20. Je décharge moi même, c'est devenu habituel ici.

La suite du programme c'est un rechargement dans la zone des Chesnes, à Saltolas. J'hésite une seconde, et puis non, je décide de ne pas manger : si je recharge direct je suis en coupure dans peu de temps et j'aurai bien le temps de cuisiner.
Je recharge effectivement sans trop attendre, un lot complet pour Vitrolles, de quoi finir la semaine.
Il me reste 1h45 de volant lorsque je commence à descendre. Le temps à viré à la pluie, puis au déluge. Je coupe par la nationale jusqu'à Vienne, je rejoins ensuite une autoroute A7 surchargée. Le déluge s'intensifie, avec tous les touristes dans le cul les uns des autres je reste sagement sur la voie de droite, malgré une vitesse non constante qui donne sérieusement envie de doubler. En effet s'il y en a un qui pile dans le lot, tout le monde se met en vrac... donc on ne va pas jouer avec le feu... d'autant plus que je ne suis pas pressé. Je me fais même doubler par d'autres camions, mais pas de problème ma dignité reste intacte.

Je roule jusqu'à l'aire de Pont de l'Isère où je trouve une place magnifique, tout au bout du parking-voiture, à 4 Km de la station. J'ai un très bon signal wifi alors plutot que d'avancer dans mon cdb, je me laisse aller à regarder des concerts sur youtube, comme une larve.
Malgré la musique j'entends un Klaxon de camion qui secoue toute la drôme par intermittence... il s'agit du très discret Rascal qui me dit bonjour en fanfare...

J'abrège un peu la soirée, je suis fatigué, une gamelle de riz et au lit.


Torino

camion "Playmobil-conquète de l'espace" de la Police française

le feu de Vienne

Vendredi 23

ma journée commence par une épreuve olympique de marche à pied : objectif aller prendre une douche à la station, là-bas, tout au fond. Je slalome entre les camping car, les caravanes et les gens qui dorment à même la voiture, avec la grand-mère et le chien Kiki qui fait beaucoup de buée sur les fenêtres.
Beaucoup de place dans cette douche, elle est pas mal. un café et me voici en train de retraverser l'aire, je choisis le coté camion cette fois-ci. Les cabines alignées dans le noir paraissent beaucoup plus grosses que d'habitude, on a l'impression de passer devant un troupeau de géants endormis.
Je décolle à 4h20.

Je sors mettre un peu de gazole à Donzère, il recommence à pleuvoir, j'arrive à Vitrolles à 7h15. J'ai RDV un peu plus tard mais je passe direct à quai, je décharge, je suis vide à 8h, cette journée commence idéalement. Idéalement jusqu'à la suite de mon programme... j'écope d'une ramasse à Carpentras - à vider à Cavaillon - pour un rechargement à vider dans la foulée à Lyon... autant dire que la mission s'annonce tendue car j'ai déjà des heures de volant et de l'amplitude en moins.
Je mets le frigo sur -25° depuis Vitrolles. Lorsque j'arrive à Carpentras, il en est à -10°... je me présente au bureau expédition :
_"bonjour, Asotrans, blablabla..."
_"ok, à quelle température est la caisse?"
_"j'ai mis à -25°"
_"oui, mais température réelle?"
_"bah, heu... là ça doit être vers -11°C"
_"bien, tu te gares sur le coté et tu reviens losque la caisse est à -18°"
Il faut savoir que dans la plupart des plateformes on charge -10°, ou même plus chaud, car refroidir une caisse vide prend beaucoup de temps, et puis les sas de chargement ne sont même pas à température - eux. Il fait plus de 30° dehors et j'explique au cariste que le frigo n'est pas prêt de descendre, que je suis fin en amplitude... mais non, il reste borné à son protocole.... donc je me gare sur le coté et je fais direct une croix sur un retour à la maison ce soir.
J'ai une paroie dans le frigo alors je vais la mettre à 3m de la ventilation : un quart de semie ça refroidira toujours plus vite!...
Pour l'anecdote je vais me mettre à quai une heure plus tard et ces même gens vont laisser la porte du quai fermée durant 5 longues minutes... bien assez de temps pour que le froid s'échappe... comme quoi ils bossent vraiment comme des imbéciles : "on respecte à fond le protocole mais on ne réfléchit pas."

Je fonce à Cavaillon, il reste finalement un espoir si je passe à quai de suite. Dans mes rêves : je vais rester 3 heures sur place, donc à partir de maintenant je m'en tape, il peuvent me garder la journée s'ils veulent...
Je remonte en fin d'après midi sur Lyon, et on me dit encore d'attendre pour vider, résultat je me pose sur un parking devant la boite avec 14h55 d'amplitude, Je passe la soirée ici.

Mesguen tout neuf (pléonasme)

un joli cadre, une circulation fluide...

Samedi 24

9h de pause viennent de passer, alors que je m'apprête à décoller pour Bourg-la-Jolie, je vois un FH de chez Coué avec les veilleuses allumées, il s'apprête lui aussi à décoller. Je connais ce camion, cela fait un moment que nous nous faisons signe sur la route mais je n'ai jamais vu le pilote. Je m'arrète donc à coté pour faire conaissance avec Fred, Breton, sympa, en galère pour rentrer à cause d'une crevaison la veille...

Priorité absolue aux touristes! tu peux crever, rester planté chez un client ou être malade, le samedi de 7h à 19h tu laisses ton secteur d'activité aux utilisateurs occasionnels, qui doivent se dire alors : "ça va... il n'y a pas autant de camions sur les routes qu'on veut nous laisser croire..."... et pendant ce temps là toi tu as obligation de croupir là où tu as pu t'arrèter pour repartir à 19h, une fois que tu es bien fatigué pour jouer au bowling de nuit avec les caravanes... ô principe de précaution...

rencontre avec Fred de chez Coué

Dimanche 25

Lundi 26

Alors que je pensais glander à la maison, ou plutôt : alors que je pensais travailler sur mes nombreux dossiers FDR en cours, j'ai été appelé pour faire un relais dans la soirée, une descente express sur l'Italie, rendez-vous 22h au dépôt.

22h05, je déparque en trombes dans la cour, dans mon élan j'ai oublié la moitié de mes affaires et en particulier mon chargeur de téléphone : comment vais-je faire pour écouter les blagues de Sweden cette semaine? Agissons méthodologiquement : si j'éteins le portable maintenant et je le rallume en fin de semaine, jeudi, vers 18-19h, je ne rate pas le moment habituel de la demie heure humoristique Suèdoise... et puis s'il me reste un peu de batterie j'aurais peut-être droit aux deux heures de péroraisons analytiques ardèchoises qui suivent... et s'il m'en reste encore j'aurais la suite des aventures rocambolesques de Fredo-zero-uno... J'ai une vie téléphonique très chargée.

Je ne pars pas avant 23h, relais oblige. Je descends sur Modena pour une livraison dans a foulée... au programme : 8h15 de volant. Je n'ai pas dormi de la journée, mais je suis en bonne condition pour relever le défi... j'ai de la bonne musique, la route est vide de tous grumeaux... et puis j'ai bu un café au dépôt, et j'en bois un deuxième au tunnel, puis un troisième à Viverone... plus la nuit avance plus je suis excité et prêt à en découdre avec le ruban.

tout seul, toute la nuit

Mardi 27

Les bandes blanches défilent, le temps passe, je suis toujours tout seul et peinard sur mon auoroute... aucun signe de fatigue, je suis content de traverser la nuit et l'Italie; quand je m'ennuie je mange un brugnon : je m'en mets plein les doigts et ça m'énerve, ensuite je change de CD : je ne retrouve pas le bon boitier et ça m'énerve, alors arrive la pause obligatoire : 45 minutes qui me coupent dans mon élan et ça m'énerve, enfin les premières lueurs du jour apparaissent au niveau de Milano - les premiers clampins sont de retour sur la route et ça m'énerve.

Je vide le client le plus merdique de chez Asotrans, voire le client le plus merdique de l'histoire du transport routier. Losque j'arrive, vers 8h30, il y a des camions jusque dans la rue et des automobilstes debouts sur leur klaxon derrière... J'imagine alors que la cours est bouchée... Les deux camions dégagent et je m'engouffre dans la petite cours, ils ont intérêt de me prendre - je n'ai pas cravaché toute la nuit pour rien! A ma grande surprise le réceptionnaire - le même qui m'avait jeté comme un mal-propre la dernière fois - m'accueille avec le sourire jusqu'aux feuilles, c'est qu'il doit les attendre ses jambons!
J'attends tout juste une demie heure que le quai se libère et je passe en priorité au nez et à la barbe de deux autres chauffeurs - pas très contents - qui le serait?
Je n'ai même pas le temps de me mettre à quai correctement : la semie est droite mais pas le tracteur, j'entends "vai cosi!", j'ai plutôt intérêt à ne plus bouger car ils sont déjà dans la remorque à tripoter du jambon.
La petite heure de déchargement nécessaire à l'équipe d'esclaves pour vider les 20t de cochon me permet de faire une micro-nuit. Une coupure ponctuée d'un réveil brutal : "vai! vai! vai!!!" il faut vite dégager du quai pour ne surtout pas rompre la chaine, ne surtout pas laisser une minute de répit aux escla... heu, aux ouvriers...

Je trie les tiges, les crochets, les ficelles, je retire la bâche et pourris mon bermuda beige avec du ju de cochon qui dégouline... je vais ensuite laver à La Vela.
Je pensais recharger du "Lardello" (gras de porc) mais finalement ce sera des palettes, à Vignola. Je suis sur place à 11h30.
Je n'ai pas l'amplitude pour aller plus loin alors je passe ma "nuit" ici. Jusqu'à présent il faisait un temps bien maussade et une température agréable... lorsque je me gare pour dormir le soleil fait un retour fulgurant et apporte avec lui une chaleur lourde... je ne trouve pas d'ombre... je ne peux plus bouger...
La fatigue sera finalement plus forte que la sueur, j'arrive à dormir 5h...

Je me réveille à 21h, alors que je pensais rentrer sur Bourg j'apprends qu'il y a encore un relais à faire, avec Hervé, à Piacenza.
J'échange donc de semie dans la zone de la douane, son resto routier, ses prostituées, ses voitures qui rodent... je récupère un chargement pour Lyon à vider dans la foulée, je retraverse la love-parade et me pose sur l'autostrada pour une nouvelle nuit de folie.

avec un moteur de camion dans le coffre

passage dans un lotissement

dur-dur de trouver de l'ombre...

Vignola, de nuit

Mercredi 28

Au beau milieu de la nuit, vers 2h du matin, je m'arrète sur l'aire de Rivoli afin d'y laisser mes 45 minutes de glandage réglementaire. Pour garder la forme et me dégourdir un peu les jambes je décide d'aller sacrifier 1 euro pour un café (ça a augmenté chez Autogrill). J'arrive dans la station, je ne suis pas d'humeur à engager une quelconque conversation, surtout en italien, mais le serveur insiste (je retranscris en français):
_tu es Français?
_oui
_tu rentres en France?
_oui
_en camion?
_oui
_où ça en France?
_Lyon
_ha mince alors... quel dommage!!!
_pourquoi?
_Il y a deux autostoppeuses qui attendaient ici depuis un moment et qui ne trouvaient personne pour les emmener en France!


"Où-ça! Où-ça! bordel mais elles sont où?!" suppliais-je, la bave aux lèvres, au serveur en le tenant par le col-bac... "trop tard, elles sont parti il y a 5 minutes" me répondit-il, dépité devant autant de détresse...

Voilà... la chance a encore frappé... Je reprends la route direction le Fréjus, plus que jamais en solitaire.
J'arrive à destination à 6h15, le réceptionnaire me dit de me mettre à quai "mais par contre on ne vide pas avant 10h, tu peux faire ta coupure ici, j'ai vu ça hier avec ton chef". Ok je suis ravis de l'apprendre. Je fais donc ma coupure à quai, dans une pente à environ 10%, je m'agrippe pour ne pas tomber de la couchette. Comble de l'insupportable, dès 9h du matin le soleil cogne derrière le pare-brise, puis les manutentionnaires font bouger la semie... bref Morphée me tend les bras mais je tombe à coté, impossible de dormir. Alors je m'occupe, je retrouve un bouquin de Bukowski entamé il y a plusieurs mois, je lis quelques nouvelles.
Vers midi je me dis qu'il serait de bon ton de manger, alors je concocte un délicieux "merlan fris - haricots verts", c'est génial.

15h15, je peux enfin me barrer. Au programme j'ai deux ramasses avant retour vers le dépôt. Un passage sur cette saloperie de rocade-Est et me voici à la première. J'ai une palette à prendre, tout va très vite. Alors que m'apprète à repartir je vois débouler un Magnum bleu métal qui me dit quelquechose... oui pas de doute c'est bien lui, c'est Benji32! Une croisure très furtive car je n'ai pas trop le temps et lui non plus, mais en tous cas une très bonne surprise de rencontrer le mec qui, quand-même, a créé un groupe "pour les fans de RockRégis" sur facebook... j'en suis ému... faudra qu'on remette ça devant une assiette.

Je remonte sur Bourg pour une seconde ramasse, puis je passe au dépôt pour prendre une autre semie et une douche. Programme du jour : je retourne en Italie avec 4 livraisons à faire demain.
Je roule jusqu'au tunnel où je peux caser in-extremis une demie heure de coupure (j'ai fait attendre l'escorte une minute au risque qu'ils partent sans moi), après quoi je peux rouler tout droit jusqu'à Pozzolo. Je localise mon client facilement et je me pose devant, sur le bas-coté. Cet endroit est assez étrange, il s'agit d'une immense zone industrielle avec des routes très larges mais cela semble inerte : pas un bruit, pas un camion, pas une voiture, même pas un petit fagot de paille qui traverse la rue comme dans les western...

qui vois-je débouler???

c'est bien lui, c'est Benji!

c'est reparti pour l'Italie

Jeudi 29

Au moins j'ai bien dormi! cette zone n'est pas plus vivante de jour, aucun bruit si ce n'est celui de mon réveil n'est venu troubler mes rèves absurdes. Je me présente à la réception où je tombe nez à décolleté avec une ancienne playmate reconvertie dans le secretariat. Ensuite je décharge avec des types qui me sortent plein de blagues, je n'en comprends aucune.

Deuxième livraison avant midi à Casteggio; je m'enfonce ensuite dans le vignoble de Broni pour trouver une petite salaison et vider une vingtaine de crochets de viande de porc. J'aime ce genre de mission : je flippe un peu de voir sur quoi je vais tomber... finalement rien d'extraordinaire, juste un portail merdique à passer.
Nous déchargeons morceau par morceau, c'est long, c'est chiant. Je repars à 14h30 pour un dernier client chez qui je peux recharger si je n'arrive pas trop tard. Non. Je vide ici mais je recharge ailleurs... et demain matin... La Fontaine avait raison : "rien ne sert de courir, il faut connaitre son programme"

Je n'ai pas roulé plus de 4 heures aujourd'hui et je me trouve déjà sur mon lieu de rechargement. Je prends le temps de faire un gros lavage car ici il y a tout ce qu'il faut; je recharge du pendu demain matin, je ne sais pas à quelle heure, ce sera la surprise.
Tortellini sous un arc en ciel, il ne fait que 25 degrés et il n'y a presque pas de moustiques : je m'en sors pas trop mal.
Je passe la soirée à explorer l'univers dérangeant des personnages de Bukowski, fénéant que je suis d'écrire mon carnet de bord...

j'aime!

au pays de la grappa

des Km de vigne

je cherche mes amis les Bisounours?

Vendredi 30

J'étais debout à 6H, je ne sais pas pourquoi... peut-être à cause de l'atmosphère moite de la cabine avec ses fenètres ouvertes. Un type est venu taper au camion à 7h, avec le sourire, mahereusement pour lui avec d'atroces dents du bonheur. J'enfile mon bermuda, j'attache mes cheveux, un petit coup de déo sous les bras et c'est parti, direction la bascule, puis le quai n°1. Ce quai à l'air très facile, d'apparence... car en réalité c'est un quai extrèmement périlleux : il y a beaucoup de place devant, on peut se présenter avec l'ensemble parfaitement aligné, mais il faut ensuite faire passer les portes entre deux piliers en bétons et là c'est vraiment fino fino... il y a cinq centimètres de chaque coté...

Je me motive enfin à écrire un peu de carnet de bord durant les 4 heures d'attente... en ce moment j'ai vraiment du mal.

Vers 11h on me dit de re-peser pour voir à combien j'en suis... je repasse à quai une seconde fois, toujours entre ces fichus piliers. Vers 11h30 on me fait sortir du quai et on me dit de mettre des grands coups de freins dans la cour pour tasser la viande... pas moyen : je vais pas tout casser pour 3 crochets de gras en plus. Je fais le "gros pas dégourdi" en freinant gauchement et surtout pas trop fort... du coup je tasse que d'alle et ça va très bien comme ça : de toutes façons ils ont mis tous les taquets je ne peux plus faire grand chose!
A 11h45 je suis plein à ras bord, un quart d'heure supplémentaire pour les papiers et puis s'en va.

Je pensais redescendre par Parme mais le pont que je souhaite emprunter est coupé, donc je passe par Cremona. Il fait beau, j'ai un peu faim mais surtout envie de rentrer, je retarde donc mon repas de midi de plusieurs heures.
Dans la vallée d'Aoste il commence à y avoir sérieusement du monde, peu de camions, beaucoup de touristes.
Je coupe une heure à Chatillon-St Vincent, je n'aime pas cette station, le parking est mal fichu, les toilettes sont crades.
Je continue jusqu'au Mt blanc où les ennuis commencent : gros bouchon devant le tunnel, une demie heure de perdue + une autre à attendre l'escorte. Coté français il me faut supporter la volée de conducteurs du dimanche qui me méprisent autant qu'ils ne me voient pas lorsqu'ils coupes les virages... et si je klaxone pour me signaler dans l'angle mort, le touriste klaxone à son tour pour dire "ben quoi", et bobonne surenchérie sans doute sur le siège passager "ho ils sont dangereux ces camions"... pfff j'en ai marre, je ne dis plus rien, je me laisse couper impunément la route, de toutes façons je n'éxiste pas...

Devant ce pathétique spectacle des départs en vacances, je décide d'allumer la radio, et je tombe sur une conférence vraiment captivante de Michel Onfray sur la psychanalyse, sur France Culture, j'enchaine ensuite avec un débat contemporain qui a pour sujet "le paradis existe-t-il"... En écoutant assiduement les intervenants et les références littéraires et Philosophiques, je mesure l'étendue de mon inculture... c'est effrayant... ou plutôt c'est encourageant, je me dis "qu'il ya de la place", du "potentiel", qu'avec un peu moins d'interviews de Didier Deschamps et un peu plus de Michel Onfray "je crois que bon, on peut faire quelquechose".

21h30, finito.

pourquoi? il ya eu un accident dans le passé?

hey! mais c'est les miennes!

le riz de Vercelli

la vallée d'Aoste

Samedi 31

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