Mon Carnet de bord... Suivez mes aventures, semaine après semaine!

Decembre 2010

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Dimanche 26

Dimanche 26 décembre, 13h15, je ferme à double tours la porte de mon appartement, un peu dubitatif, la poignée ne tient que par une seule vis. J'avais prévu de partir en fin de matinée, mais pour y parvenir j'aurais dû me préparer psychologiquement à partir en début de matinée. Qu'importe, le programme n'est pas des plus chargés, il me suffit de rouler jusqu'à quelquepart en Allemagne afin de prendre le bateau à Travemünde demain soir pour aller quelquepart en Suède.

Ma coiffeuse m'avait prévenu mercredi : "bah ça caille en ce moment!"... il faut bien reconnaitre que derrière chaque coiffeuse se cache un esprit d'analyse rare : le fait est, qu'effectivement, en ce moment, cela ne fait aucun doute : "bah ça caille!". Départ de Pont de Vaux avec -5°, obligé d'attendre que le pare-brise de la voiture dégèle tout seul car je n'ai rien pour gratter, j'arrive à Bourg avant 14h et je tire quelques freins à main sur la cour verglacée du dépôt, comme ça, juste parce que je suis du genre content.

Avant le grand départ je croise subrepticement mon collègue Alain avec qui je parle lecture, Dostoïevski entre autres, car en plus de manger du bitume Alain mange des livres, un régime que je tente moi-même de suivre.
14h05, Je débranche le frigo, je quitte le quai, je quitte la cour, je quitte Bourg en Bresse, je quitte la France, non, non, ne me retenez pas, c'est décidé, je me casse. Les premiers tours de roues sont artistiques : la neige accumulée sur le toit de la semie se dissipe dans un panache de fumée blanche, je suis l'espace d'un instant pilote de la patrouille de France - catégorie camion.

Il fait vraiment beau aujourd'hui... et en écrivant ceci je me dis que j'ai peut-être réellement raté ma vocation de coiffeur. La route n'est que partiellement déneigée entre Bourg et Tournus, si bien que certains, sans doute par peur de faire de tonneaux à 30 Km/h, préfèrent rouler à 15... Je reporte mes espoirs de pouvoir avancer un peu sur l'autoroute A6, mais cette dernière est sursaturée, dimanche + lendemain de fête = gros trafic en direction de la capitale. Aujourd'hui c'est même très gros trafic : je me retrouve à l'arrêt à plusieurs reprises entre Châlon et Beaune, ce qui me laisse le temps de manger ma quiche sous le regard rêveur des gens dans les voitures. Je préfère nettement les bouchons du weekend avec leurs voitures animées d'yeux qui me regardent, aux bouchons ternes, long, et fatiguants des heures de pointes... je suis exibitionniste.
En 4h28 j'attéris dans la neige de l'aire de Toul : je me pose sur la place interdite des citerniers, doutant de pouvoir en repartir en voyant mes pneus dans la glace, mais le reste de la station est blindé : pas de répit pour le weekend de noël, bon nombre de collègues galériens l'ont passé ici. Pour l'anecdote, c'est incroyable mais vrai, l'appareil à eurovignette fonctionne! Je n'ai donc pas perdu 10 minutes derrière les touristes pour rien.
Arrivé au Luxembourg il y a comme une odeur de verglas alors je lève un peu le pied et j'évite le ralentisseur. Je ne le savais pas mais il y a pénurie de carburant dans tout le pays par manque d'approvisionnement dû aux multiples interdictions de circulation. A la station de Wasserbillig il n'y a que 2 pompes de disponibles... je n'ose imaginer la file d'attente demain matin...
Je prends mes 35 tickets de Toll collect et je continue en empruntant des portions de route nationale peu rassurantes car recouvertes de ce petit manteau pailleté, très joli certes, mais très dangereux.

Je roule jusqu'à Cologne.

un dimanche ensoleillé à Bourg

un dimanche ensoleillé dans la voiture

personne à Wasserbillig

Lundi 27

Ce matin je suis réveillé par le téléphone, en Suèdois, dès 8h... "heu... oui je dormais, j'ai roulé cette nuit..."
Je me lève, Je fais le traditionnel tour du camion pour vérifier si l'on ne m'a piqué ni gazole, ni couenne de porc... c'est bon tout est là; je me dirige alors vers les toilettes high-tech et payants de la station juste pour réver quelques secondes devant le spectacle iréel de l'auto-nettoyage de la cuvette; je termine ma promenade matinale au comptoir du bar pour y commander - en allemand - une spécialité locale : "ein cappuccino"

Au terme de 11h de coupure et pas une seconde plus, je reprends l'A1, direction le Nord. La circulation n'est pas fluide du tout : il n'y a pas trop de camions mais beaucoup, beaucoup de voitures parmi lesquelles on trouve les habituels grumeaux de la voie de droite beaucoup plus difficiles à doubler aujourd'hui car seulement deux voies sur trois sont déneigées. Question poudreuse l'Allemagne a eu sa dose; les aires sont peu accessibles alors j'anticipe mes 45 minutes de pause après seulement 3h30 de volant pour assurer le coup. Durant cette pause je vais voir plusieurs collègues patiner pour sortir du parking, pour ma part je ne suis pas inquiet : je suis lourd et j'ai des pneus neige.

A peine ai-je repris l'autoroute diection Hannovre que je me retrouve à faire l'accordéon sur de très longs kilomètres, et je vais rouler comme cela durant de très longues heures. Déjà à la base, une traversée de l'Allemagne ça fait peu rêver... alors une traversée de l'Allemagne à 40Km/h ça devient difficile psychologiquement. Il n'y a pas d'accident, pas de neige... juste du monde, trop de monde, chacun essaie de se faire une place dans cet interminable goulot d'étranglement qui ramène à la maison.

Le temps passe et comme j'ai fait ma première coupure après seulement 3h30, je gagne le droit d'en faire une seconde.
Le temps passe et je me demande si je vais pouvoir prendre le bateau : ma confortable avance pour y parvenir à fondue comme neige au... mauvais exemple.
Le temps passe et une invitée surprise fait sont grand retour à Hambourg : la neige justement!

Cela fait maintenant 4h que je roule au pas, sur une patinoire qui impose la plus grande vigileance; j'entrevois le port de Travemuende à 21h15, j'embarque in-extremis sur le "Finneagle" un bateau que je n'ai jamais pris, un bateau nettement mieux que les habituels "Finnpartner" et "Finntrader". Après le repas à 6 euros - ou 59 Kronor au choix - je rejoins ma confortable cabine. J'essaie de voir quelquechose à travers le hublot mais dehors il fait trop sombre, alors j'allume la télé - car oui il y a même la télé ici - et je zappe entre un vieux Barça-Porto avec un Ronaldhino trop fort, un navet à l'eau de rose avec un Hugh Grant trop british, un film d'horreur dans lequel on sait très bien que c'est la gosse qui va butter tout le monde, et un jeux débile où un chaufeur de taxi fait gagner de la thune à ses passagers en leur posant des questions... le tout en allemand soustitré suèdois...

ça devient difficile à Hambourg

garé au centimètre dans le bateau

quel luxe!

Mardi 28

J'éteins inconsciemment mon premier réveil à 5h. J'éteins consciemment mon second réveil à 5h15. Je me lève d'un bon à 5h30.

Aujourd'hui c'est une grosse journée qui m'attend, pour me mettre en conditions je prends un petit-déjeuner traditionnel germanique, c'est à dire un petit déjeuner composé de plein de choses que l'on imagine pas manger au petit-déjeuner : charcuterie, salade, boulettes de viandes, patates... avec quand-même un café à la fin comme pour justifier qu'il est 6h du matin. Mon voisin de table pousse l'audace jusqu'à manger du maquereau fumé et des comcombres...

Le bateau accoste à 7h pétantes en terre suèdoise. Premier constat : il a beaucoup neigé; dans le port on roule là où c'est dégagé, sur une artère unique creusée au chasse neige. Je suis un peu déçu par la température : la semaine dernière mon collègue Anthony à gelé sur place par -25°, mais aujourd'hui il fait chaud, -8°, on roulerait presque la fenêtre ouverte.
Même si les routes ne sont que partiellement déneigées, la circulation est fluide, ici on a l'habitude, on est équipé, et on ne bloque pas des milliers de camions à Malmö parcequ'il neige à Stockholm... (pour info j'ai récemment passé 23h sur la bande d'arrêt d'urgence près de Tours, par une belle journée ensoleilée, avec +7°, parce qu'il neigeait à Paris... depuis je suis aigris). Les voies secondaires quant à elles sont laissées à l'état sauvage, blanches, avec seulement les traces pour se repérer. Voici l'occasion de tester mes nouveaux pneus-winter, cadeau de Noël de chez Asotrans; verdict : génial! En tout cas nettement mieux que mes anciens pneus lisses...

Je vide en milieu de matinée, recharge juste avant midi à Helsingborg, puis je complète un peu plus haut. J'ai la surprise de tomber sur un chauffeur Français, qui lui même est surpris de tomber sur moi... il faut dire qu'on est pas des masses là-haut.
Tout va très vite, c'est mon jour de chance, à 13h je suis chargé complet et je n'ai plus qu'à redescendre. J'hésite un instant entre prendre le bateau de 16h à Malmö - et traverser le Danemark... j'opte pour le Danemark, pour gagner du temps.

Ce voyage-éclair en Suède se termine déjà, je prends le bateau de la Scandlines à Helsingborg. Il fait encore jour et je décide d'aller prendre un peu de vent glacial dans la tronche. Nous ne sommes pas nombreux sur la plateforme extérieure, nous sommes 1 seul, pourtant le paysage vaut la grippe qui va gacher mon réveillon! Je suis très surpris de voir que la mer est entièrement gelée, sur une fine épaisseur certes mais entièrement gelée : je suis sur un Brise-glace! Je n'imaginais pas que ça gelait la mer... je suis très naïf. Al'intérieur du bateau l'ambiance est nettement moins glaciale : les gens bouffent, achètent des trucs, parlent à leur téléphone, les mômes braillent, les parents disputent les mômes qui braillent... mais le spectacle le plus définitivement affligeant reste celui du fumoir : il s'agit d'un espace clôt et vitré, pouvant accueillir convenablement 4 ou 5 personnes, dans lequel s'agglutinent aujourd'hui beaucoup plus de nicotino-dépendants qui ressemblent à des mérous dans leur aquarium, accrochés à leur clope comme si elle était l'élément indispensable pour supporter le voyage.
Après ces 25 minutes de banquise je prends la route Danoise pour une traversée particulièrement pénible. J'arrive à Copenhague juste en heure de pointe et la route est très glissante... donc on roule au pas. Le mercure tombe à -12° et le paysage - bien que de moins en moins visible par manque de lumière - laisse entrevoir un chao fait de glace et de neige, le pays semble figé par le froid. En arrivant près de la cote sud, près de Rodby, il y a de véritables murs de neige sur la droite de la route, et de deux voies cette dernière passe parfois, alors que l'on ne s'y attend pas, à une voie et demie.

Sur le second bateau (entre Danemark et Allemagne), je mange un poisson pané - frite qui ne laissera pas de trace dans l'Histoire de la gastronomie. En faisant un tour dans la boutique j'aperçois des chocolats "Toblerone" en dégustion gratuite... alors j'en mange plein pour oublier le goût du poisson-carton pané... j'en mange encore quelque uns, feignant de comparer les 3 différents chocolats... puis je quitte la boutique pour digérer sur une banquette en regardant le mur car dehors il fait noir.

Nous débarquons en Allemagne, moi et une bande d'exités qui se doublent se redoublent et se reredoublent, c'est tellement enervant que je décide de rouler quelques minutes à 8O, histoire de les laisser partir au loin et de continuer seul.
Je passe Hambourg, je tente une première station, puis une seconde, sans succès... Je trouve finalement une place inespérée sur "l'aire des places inespérées", j'ai 10h05 de volant. Pendant que je tape ces quelques lignes, il ya un automobiliste coincé dans la neige à quelques dixaines de mètres du camion. Il a une voiture "propulsion" et forcément sur la poudreuse ce n'est pas l'idéal. J'irais bien l'aider mais j'hésite... un type tout seul, dans un cabriolet mauve, près des toilettes d'une aire d'autoroute, à minuit... je me trompe peut-être mais... finalement au bout quelques minutes de patinage il finit par se dégager tout seul...ouf.

7h15, Malmö

dédicace à tous les préfets de France

T comme typique suèdois

brise-glace sur la Baltique

grand froid à Helsingor

Mercredi 29

Je me lève juste avant le soleil pour me caler sur la voie de droite de cette autoroute N°1 qui traverse le Pays en diagonale. Le trafic PL est nettement plus fluide que d'habitude, c'est autant de stress en moins.
Alors que la lumière éclaire progressivement l'épais manteau blanc qui recouvre le paysage, on peut apercevoir, en regardant au loin, toutes sortes d'animaux sauvages car d'une part on les voit bien dans la neige, et d'autre part ils n'ont plus grand chose à manger les pauvres. Ainsi je vais rescencer des dixaines et des dixaines de chevreuils, de renards, de rapaces et de policiers sur la droite de la route.

Je roule 4h15 puis je m'arrète manger du jambon, c'est génial.

Je vais jusqu'au bout du bout de l'A1 que je quitte à Blankeheim. Une pause sur la station Aral afin d'y prendre les indispensables tickets Toll collect et Eurovignette pour la suite du voyage... des formalités pesantes à la longue mais c'est comme ça... je continue en découpant le brouillard au couteau jusqu'au Grand Duché du Luxembourg (dit comme ça ça impressionne "Grand Duché du Luxembourg", mais concrètement, depuis une cabine de camion, il s'agit d'une morne autoroute qui traverse le néant jusqu'à la frontière suivante)

Je fais mon plein à Berchem, encore une station Aral. Aujourd'hui c'est ma fête : en plus des neufs points qui me permettront - ajoutés à 2500 autres - de gagner un porte clé ou un stylo, la caissière me remet un ticket sur lequel est inscrit "Amis chauffeur, un cadeau de Noël vous attend à l'Arche Café". Assitôt je cours à l'Arche café comme un fou, laissant tout sur place, ne supportant plus ce suspens du fameux cadeau mystérieux... la déception est proportionnelle au suspens... il s'agit non-pas d'un CD de Rihana comme je l'espérais mais d'une pochette-porte-documents avec écrit "l'Arche cafétaria" et "Aral Alles Super" dessus... on va dire que c'est le geste qui compte.
Comme j'ai fait le déplacement, je profite de la réduction offerte avec les 800 litres de Go pour prendre un "menu truck", car il faut bien reconnaitre que ça vaut le coût : entrée - plat - dessert - pain - café pour 5 euros 99... seule la boisson est payante, même l'eau, mais si comme moi vous êtes une pince il suffit de s'en priver jusqu'au camion.

J'hésite à instant à passer la nuit ici... mais il me faudrait, en accord avec la loi qui regie la circulation des PL sur autoroute, reprendre une eurovignette pour la journée de demain... donc je trace. Je roule jusqu'à Pont-à-Mousson, jusqu'à la station Total, persuadé de ne pas y trouver ma place... mais c'est assez incroyable il en reste une, en vrac, mais c'est déjà pas mal.

le jour se lève sur la campagne allemande

bouillasse

5 euros 99

Jeudi 30

Je ne sais pas pourquoi mais cela fait deux fois de suite que je coupe 10h... c'est débile, quitte à dépasser 9 autant faire 11... parfois je ne me comprends pas.
Il est 5h du Matin et je fait de l'oeil à la machine à café dans un tête à tête des plus toride.

Je dois livrer une palette à Troyes dans l'Aube. D'ailleurs pourquoi se sent-on toujours obligé de préciser "dans l'Aube"? A-t-on vraiment peur de confondre à chaque fois avec Troye en Grèce? Pourquoi ne pas faire alors la même chose pour d'autres villes : "Pont-de-Vaux dans l'Ain" ou "Saint Perey dans la Brousse"? Bref, je livre cette palette et le réceptionnaire m'informe que j'ai de la chance car "normalement on réceptionne pas aujourd'hui c'est l'inventaire"... heu oui... c'est toi qui a de la chance d'avoir ta palette car moi perso je m'en tape...

Ma liraison suivante est à Châlon-sur-Saône (dans la Saône et Loire). Comme j'ai le temps et l'envie de voir autre chose qu'une interminable glissière de sécurité, je décide de ne pas passer un péage de la journée; mieux : je décide d'expérimenter un nouvel itinéraire qui traverse la campagne morvandelle profonde où ce n'ai pas le gilet jaune mais la cotte de mailles qui est obligatoire. J'aime ce coin de la France. Au hasard d'une entrée d'agglomaration et de 4h15 de volant, j'aperçois un grand parking PL sur la place de l'église... le genre de vision qui remonte à 30 ans en arrière où les PL n'étaient pas indésirables, où les routiers n'étaient pas des pouilleux, où les barres de gabari étaient utilisées uniquement pour le saut à la perche. Je m'arrête, je fais la photo souvenir, je vais boire un café au bar du coin pour fêter l'évenement puis je descends jusqu'à Châlon - deux minutes d'arrêt - puis jusqu'au dépôt - fin du voyage.

le calembour est un pet de l'esprit...

ho yeah!

place de l'église

Vendredi 31

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