Mon Carnet de bord... Suivez mes aventures, semaine après semaine!

Mai 2011

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Dimanche 1

 

Lundi 2

Ce matin j’ai tout retourné pour n’avoir qu’un petit quart d’heure de retard… et finalement je suis arrivé avec 5h d’avance. Il y a eu comme un quiproquo j’ai l’impression. On se croirait un vendredi : faute d’avoir quelquechose à faire je pars manger avec Crust et Georgios (un chauffeur Grec égaré dans la cour) chez Badou. De retour au dépôt il me faut encore attendre : La semie que je récupère n’est qu’à Dijon. J’hésite à rentrer chez moi, je n’ai pas vraiment envie, il y a plus d’une heure de route aller-et-retour et je déteste conduire… Donc je reste au bureau, entre le PC et la machine à café, le temps passe assez rapidement.
16h, Anthony qui redescend de Suède me dételle sa semie pour que j’y remonte. Il s’agit de la dernière Lamberêt, une semie light « spéciale Suède »… light mais surtout sacrément moche : pas de coffres, pas de bavettes (ça pèse lourd une bavette ?), un petit Carrier devant… et voilà, les suèdois sont unanimes : elle est magnifique.

Pour commencer cette semaine en douceur je charge à Bourg pour le 63, je vide dans la foulée. Il ne me reste ensuite qu’à trainer ma semie light et moche jusqu’au departement voisin pour m’y mettre en coupure. J’atterris dans une zone industrielle, il est 23h. Une tomate, un quart d’oignon, une demie mozzarella et deux poires plus tard je fais ma vaisselle au clair de lune pendant des éclairs affolent l’horizon. Dans cette ambiance tourmentée je profite d’une connexion 3G pour regarder Warren Ellis faire du violon hardcore avec les Bad Seeds… en ce jour historique de réglement de compte au saloon pakistanais : « Hardcore will never die, but you will ».

des vaches

salut toi ?

à Riom

Mardi 3

Ce matin je n’ai même pas pris la peine de me présenter à l’ouverture pour charger. En effet, avec 9h40 de repos j’ai trouvé ça judicieux d’aller à 11, car je ne suis pas pressé. Un des chargeur est bien venu taper au camion vers 9h tandis que je mangeais une banane en écoutant les Beastie Boys, je lui ai dit : « pas possible, encore 10 minutes », et 10 minutes plus tard j’y suis allé, j’ai chargé.
A peine élancé sur la RCEA je suis arrivé au cul d’une citerne en plaques oranges dont la vitesse de croisière n’excédait pas 70 Km/h… pas de quoi s’énerver pensais-je alors : ce chauffeur est dans son bon droit (devoir), c’est sûr c’est agaçant mais bon, il n’y a qu’à mettre une distance de sécurité c’est tout de suite moins pénible… tiens celui de derrière n’est apparemment pas de cet avis, si tant est qu’il ai un avis…
J’ai roulé un petit moment comme ça mais la suite du parcours s’est globalement bien déroulée. Une pause à Sandaucourt au bout de 4h20 et puis une monté vers la frontière sous un soleil rayonnant, tellement royannant qu’en pleine traversée de la Moselle je me suis fais la réflexion : « bon sang, c’est dingue, on se croirait en Meurthe et Moselle… ».
Arrivé au Luxembourg je me suis engouffré sous la pompe N°29-30, la seule de libre et c’est déjà pas mal… j’ai complété les réservoirs à ras bord : 1,19 euro soit 20 à 30 centimes de moins qu’en Italie la semaine dernière, c'est-à-dire plusieurs centaines d’euros sur un plein. Ensuite j’ai passé quelques minutes devant l’une des borne Toll collect pour soustirer les tickets me permettant de rouler en Allemagne : les trois bornes sont en plein soleil, on ne voit rien sur l’écran, il faut s’y coller le nez tout en faisant de l’ombre…
Il me restait 1h45 de volant, j’ai décidé de tenter Blankenheim pour acheter de la mayonnaise, j’ai réussi.

J’aime faire mes courses à l’étranger : non seulement je n’y croise que très rarement mes anciens potes de collège avec leur femme, leur mioche et leur paquet de papier-toilette sous le bras, mais surtout cela donne une idée du mode vie local. Ainsi ce mardi soir, je me retrouve à flâner entre les boites de conserves du supermarché « Rewe », à Blankenheim, en Allemagne. J’ai doublement de la chance : il restait une ultime place pour garer le camion devant, et le magasin ne ferme qu’à 22h. Il me faut un pot de mayonnaise, je n’en ai plus. Le rayon « sauces » fait 15m de long dont 10m de « sauces mayonnaises ». J’en choisi une au pif en veillant à ce qu’il n’y ait pas écrit « Unilever », « KraftFood », « Henkel » ou « Texaco » dessus. J’opte pour un pot de « remoulade » avec une côtelette, deux tronches de bavarois en arrière plan, et une mention qui doit signifier un truc du genre : « Tiens gamin, bouffe de la mayonnaise avec ta côtelette » ; c’est parfait. Je traverse les 70m du rayon charcuterie, les 50m du rayon gâteaux, ainsi que les 10m du rayon fruits et légumes pour atteindre la caisse où je tente quelques prouesses dans la langue de Goeth sans trop de succès. Mme Delay avait raison : « ça vous servira plus tard bande d’imbéciles »… mais à l’époque, en 4ème, je ne pouvais pas imaginer que 15 ans plus tard j’irais acheter un pôt de mayonnaise en Allemagne.
Je retourne au camion, il fait encore jour et encore bon, la radio m’annonce que Barça-Real est sur le point de commencer, je sors mon avocat du frigo (le légume – pas le mec), je sors une boite de thon (le poisson – pas la fille), je sors mon pôt de mayo tout neuf et je festoie en regardant l’horizon comme s’il y avait quelquechose à regarder… il n’y a rien, seulement des collègues qui cherchent une place pour la nuit et qui ne trouvent pas.

paysage lorrain

original

dans la rubrique « que sont-ils devenus ? »

un soir à Blankeheim

Mercredi 4

Encore une belle journée. Le programme est simple : monter au port de Lubeck-Travemünde, si possible avant 22h : je pense que c’est possible. J’en suis à 13h de coupure lorsque je remets le moteur en route, je n’ai pas sauté de repas, j’ai fait une nuit normale, je prends même le temps de me regarder dans la glace et d’applatir un épis rebelle sur le côté gauche de mon crâne… et c’est parti, direction Köln, en français « Cologne », ville célèbre pour son eau qui parfume toutes nos Grand-mères : l’eau de Köln.
Aujourd’hui c’est 100% autoroute, cela signifie qu’il ne se passe pas grand-chose. Je n’ai même pas la chance d’être embouteillé, pour trouver un improbable clébard par la fenêtre à photographier. Non, je reste sur cette voie de droite, je ne double que très rarement, seulement lorsqu’il s’agit d’un bon gros grumeau, le reste du temps j’adapte ma vitesse à celui de devant afin de repousser à une autre fois le prochain contrôle de Polizei ou de BAG. J’y ai cru à la BAG, au niveau de Bielefeld : ils sont resté devant moi quelques minutes, sans doute pour vérifier l’immatriculation sur je ne sais quel fichier, puis ont réaccéléré jusqu’au camion de devant, et ainsi de suite.

Le temps se gâte au niveau d’Hannover, je reçois une averse de petits grêlons pendant quelques longues secondes durant lesquelles j’ai une pensée émue pour la peinture fragile de ma calandre ; puis le vent tourne, les grêlons vont s’abattre sur d’autres calandres, le soleil revient en grande forme au niveau de Hamburg et s’installe pour la soirée.
J’arrive au port de Lubeck à 17h, je monte récupérer mes billets au bureau Finnlines, je vais ensuite me garer en tête de la première rangée des frigos, au bord de l’eau. Les camions de parc Terberg font d’incessants aller-et-retours entre les bateaux et terre ferme, avec à chaque fois un nouvel attelage, dans une coordnation sans faille qui doit faire penser à une fourmilière vu d’en haut.
Comme je suis en tête de file je rentre le premier : c’est bien car je serai le premier aussi au restaurant ; c’est moins bien car j’écoppe de la place toute merdique, celle de devant à droite, celle qui fait transpirer pour sortir le lendemain sans toucher les murs. Bref, je monte à bord, et, après avoir rejoint ma cabine puis le pont du bateau pour faire quelques photos, je réalise qu’il s’agit bien là d’une fourmilière, une fourmilière où les camions si imposants d’habitude se croisent et s’entrecroisent au service de cet immense bateau qui s’élève sur le port de Travemünde.

Je me perds dans mes pensées, toujours sur le pont du bateau… et puis arrive ce gros type qui porte des sabots à poil de chèvre. Je décide alors d’aller manger, et de regagner la cabine n°3095 pour essayer de dormir , bercé par les vibrations des murs et du plafond.

Monster

le style « trop chargé » allemand

les habitués de scandinavie

prêt à embarquer

de retour de Finlande

Jeudi 5

3h00, je suis réveillé par mon téléphone, j’ai cru que c’était le réveil mais non, c’est un SMS commercial pour me dire qu’il y a du réseau en pleine mer baltique. Génial. En regardant l’heure j’éprouve la satisfaction débile du type qu’on réveille et qui peut se recoucher paisiblement pour plusieurs heures.

5h50, cette fois il s’agit bien du réveil, je me fais violence : je sors du lit et m’enferme dans la salle de bain.

6h10, la douche est tellement exigue que le rideau vient se coller à moi sans arrêt… quand je pense qu’on est des centaines voire des milliers de chauffeurs a être passés par là…

6h11, mince je n’ai pas de shampoing… je me lave les cheveux au gel douche, ils en ressortent tout crépus.

6h30, je prends mon petit déjeuner dans la grande salle bruyante du restaurant : des œufs brouillés, deux bouts de viande non-identifiés, un verre de faux ju d’orange (eau+poudre), du yaourt liquide à la pêche et un café.

7h00, Nous arrivons à Malmö. La voix du haut-parleur nous souhaite une bonne journée en Suèdois, en Allemand et en Anglais.

7h11, début officiel de ma période tachygraphique : je sors de ma place en frôlant le mur de droite – guidé par le type en fluo qui fait sortir les camions.

7h15, ça n’avance rien sur le port : il une armada de flics et de douaniers qui contrôlent tous les camions.

7h25, bizarrement je suis le seul qu’ils ne contrôlent pas… je passe sur la droite comme si de rien était, personne ne lève le bras, je continue.

7h30, je suis enfin sorti de l’entonoir, me voici sur l’autoroute N°6 en direction de Stockholm.

8h30, Le temps est bizarre, comme souvent par ici, en quelques minutes on passe du soleil – à l’averse – au soleil à nouveau.

8h45, je suis à destination et j’attends ma place au quai numéro 2 : il est occupé par un Volvo NH jaune.

9h30, je passe à quai mais les réceptionnaires partent en pause. J’en profite pour prendre connaissance du programme à venir : 3 ramasses après avoir déchargé.

10h00, retour de pause.

10h30, je suis vide et je m’en vais en direction de Klippan pour le premier chargement.

10h50, Me voici dans une entreprise où l’on ne parle pas Suèdois, ni Anglais, mais Polonais. En effet tous les ouvriers sont apparement low cost. Quelle bonne surprise de découvrir que je dois charger une pièce de 5m de long sur 2,5m de large et 2m de haut… oui, dans un frigo et si possible devant car j’ai d’autre ramasses à faire. Au début j’imagine qu’ils vont me jeter, d’autant plus qu’il n’y a pas de quai, on charge dans la cours. C’est sans compter sur l’esprit d’initiative et la motivation des caristes : Avec 2 chariots élévateurs, 2 tire-pal et quelques idées luineuses nous parvenons à rentrer la grosse bestiole dans la caisse… je me demande encore comment ?! J’apprendrai plus tard que ce chargement était prévu pour une semie bachée et le donneur d’ordre se demandera lui aussi comment nous sommes parvenu à charger. J’aime ce genre de mission : elles recquièrent un minimum de creusage de ménunges, une bonne dose d’adrénaline, et donne la satisfaction de servir à quelquechose.

11h50, Helsingborg, je charge quelques palettes chez un client habituel et je me sauve.

12h30, Je remonte vers le nord et je rate toutes mes photos.

13h, Me voici à Örkelljunga, chez les transports Mohlins. On reste rarement indiférent devant leurs ensembles lorsqu’on les croise : du gros FH, du gros Série 4, des belles peintures, des phares partout… mais pas de chance pour moi aujourd’hui il n’y en a aucun dans la cour, seulement un vieux série3. Au bureau je suis accueilli comme une star, surtout lorsque je montre la photo d’un de leur scania croisé en venant. Ici on aime les camions et ça se voit : des maquettes, des posters, des vues aériennes du parc, tout y est. Je discute un moment avec un type très sympa qui me semble être le chef, au moment de partir ce dernier décroche le calendrier aux couleurs de l’entreprise du bureau d’exploitation pour me le donner en cadeau… Vraiment sympa : Mohlins Akeri.

13h15, Direction Lahölm, puis Göteborg pour compléter le chargement.

16h, Je suis chargé, complet, à ras les portes. J’hésite entre redescendre sur Malmö pour le bateau de 22h, et redescendre via le Danemark. Je n’ai roulé que 4h10 aujourd’hui, je choisi le Danemark en espérant que les bacs passent bien pour ne pas dépasser l’amplitude.

17h30, Retour à Helsingborg. Le premier bac pour Helsingor se fait attendre un moment, puis une fois à bord j’abandonne l’idée de sortir de la cabine car mon voisin de gauche à eu la bonne idée de venir se serrer à 10 cm de ma portière tandis que j’étais moi-même serré à 10 cm du mur de droite… pas envie de sortir par le toit ouvrant, je passe ces vingt minutes de traversée à jouer du La et du Ré, avec parfois un Sol au milieu pour surprendre l’auditoir.

18h00, je suis au Danemark. La traversée du pays dure 2h25 exactement lorsque l’on parvient à rester calé à 90 Km/h quasiment tout le long comme aujourd’hui.

20h25, port de Rödby, le cauchemar commence : des dizaines et des dizaines de camions dans les travées, en attente d’embarquement. Je me mets à la suite mais je sais déjà qu’il faudra laisser passer au moins un tour. Pendant ce temps là l’amplitude tourne et je suis quasi-sûr de la dépasser : j’ai voulu gagner du temps en passant par le Danemark, je risque finalement d’en perdre.

21h00, je monte à bord.

21h30, Mon estomac crie au scandale, je lui envoie un poisson pané frite dégueulasse, fallait pas insister...

22h00, je débarque en Allemagne… il me reste 11 minutes d’amplitude à vivre, mais si je reste au port je suis assuré de ne pas pouvoir rentrer ce week end : il me faut vider impérativement au Luxembourg demain. Je dois rouler au moins une demie heure. Le problème c’est que je suis bien sousmis à la même réglemenation que Bébert qui fait de la toupie entre Pont de Vaux et Pont de Veyle, ou que Papat’ qui fait des relais entre Mâcon et Nemours, celle-là même qui ne laisse pas de place à l’imprévu et qui pourri cette journée de stress alors que tout avait pourtant bien commencé… on essaie de bien faire et voilà, c’est l’irrémédiable poursuite du chrono et l’irrémédiable menace de l’infraction. Fait chier.

22h50, Je trouve un parking pourri, plein de gays, je me pose et je tire les rideaux, j’en suis à 15h40 d’amplitude : il s’agirait de ne pas aggraver mon cas.

Fin d’une journée de conducteur des temps modernes.

accueil musclé à Malmö

chez Möhlins, Örkelljunga

haaaa, les belles routes suèdoises, le paradis du routier.

OK, je ne fais pas le malin…

traversée du Danemark

Vendredi 6

Kiwi, pain au lait, yaourt, noisettes : Régis surveille désormais son alimentation et peste contre le choco Prince, les temps changent, que voulez-vous ma bonne dame c’est comme ça…

Si je fait le plein de vitamines c’est avant tout pour affronter une traversée germanique à tendance déprimante même lorsque le soleil est au rendez-vous. Maigre avantage je capte un minimum de France Inter à partir d’Hambour, à condition que je ne mette pas les phares (sinon il y a des interférences), ce qui me permet d’écouter Nicolas Rey, Daniel Morin, Vincent Roca entre mes cd de la semaine qui commencent à me gaver car nous sommes vendredi.

Que dire de cette journée sinon que j’essaie de conduire le plus intelligemment possible : en parfaite harmonie au milieu des automobilistes qui m’ignorent, des camions qui me doublent – ou qui se trainent – ou bien encore qui roulent juste un peu plus doucement et me contraignent à adopter leur allure plutôt que de squatter la voie de gauche pendant une demie heure et déranger les automobilistes qui m’ignorent… Bref, restons stoïques dans ce monde d’autoroutes, de voitures et de camions, donnons-nous la mains vers un avenir meilleur avec encore plus d’autoroutes, de voitures et de camions, hallelujah mes bien chers frères.
Scénario habituel : les travaux de Bremen, les bouchons de Köln, la toll collect à Euskirchen, l’Eurovignette à Trier, le bouchon du Luxembourg, et me voici à destination en soirée.

Je décharge, je prends ma douche et je mange un risotto en écoutant le programme radiophoniqe le plus déprimant la semaine, le programme le plus déprimant du monde, le programme typique qui vous cruscifie dans la solitude d'un vendredi alors qu’on aimerait tellement égayer l’esprit enfermé dans cette cabine de camion depuis lundi, le programme plus nul que la météo marine : le multiplexe de ligue 2.

Evian-Thonon-Gaillard.

Heureusement à 22h c’est Lenoir, et même en grandes ondes c’est Lou Reed, c’est Elysian Fields, c’est Thurston Moore…

la classe mec…

ambiance

un peu chargé quand même

ambiance

Samedi 7

Aujourd’hui c’est l’aniversaire de ma maman et si je l’oublie dans ce carnet de bord je suis un fils indigne alors : Bon Anniversaire Maman !!!!

Je commence ma journée par un ravitaillement Gazolistique discount sur l’aire de Berchem. Je récupère les points-fidélité pour avoir mon porte-clé, bientôt, dans 3 ou 4 ans si tout va bien. Je prends le temps d’un café car nous sommes samedi et bon, ça va quoi, on peut prendre le temps d’un café, surtout qu’il est gratuit avec le plein.

Je recharge près de St Avold, à la frontière Allemande, coté français. Tous se passe bien, il fait beau, les oiseaux chantent, et le temps passe. Je décolle juste avant midi pour redescendre sur la Bresse sans payer de péage. Une partie de la nationale est déshormais interdite entre Besançon et Bourg… génial, une de plus à braver par souci de bon sens.

J’arrive dans la soirée à Bourg, comme pour me narguer le frigo refuse de démarrer en électrique, je perds plus d’une demie heure à essayer d’y remédier avec Joszef, puis je finis par sérieusement par m’affoler pour ne pas manquer cette énorme soirée qui se profile du coté de Spiderland. C’est la course de bout en bout.

Régis chez les mineurs

retour au dépôt

Dimanche 8
Lundi 9

Mardi 10

J’hésite quelques instants : soit je me rase et je serai en retard – c’est sûr, soit je ne me rase pas et je serai en retard – c’est sûr – mais un peu moins. Je pars avec ma barbe.

Il est 11h15, non, il est même 11h20 lorsque j’arrive en accélèrant volontairement devant les bureaux pour me donner un air pressé que je ne n’avais pas sur les 35 minutes du parcours. Mon camion n’a pas bougé, il y a une semie dételée à coté. Je ne sais pas encore si j’ai 20 minutes de retard ou bien 5h d’avance comme la semaine dernière. Je range mes affaires et présente ma tronche pas fraiche au bureau : c’est bon, je suis largement dans les temps en vu du programme. Il me faut laver la semie et aller charger dans deux abattoirs avant de revenir compléter à Bourg, le tout pour une tournée de groupage vers l’Italie.
Je commence donc par laver l’intérieur de la semie. Arriver tout propre et se taper une semie de viande à nettoyer c’est un peu comme arriver tout propre et changer une roue : c’est contrariant… D’autant plus qu’aujourd’hui le karcher est en panne et je dois improviser avec un simple jet d’eau.

Premier abattoir, RAS.
Deuxième abattoir, RAS.

Je reviens au dépôt avant 16h, plutôt satisfait du bon déroulement des opérations jusqu’ici. Mais comme dit le philosophe Bigard : « rien ne sert de courir, ça ne sert à rien du tout », je dois maintenant attendre que le reste de la viande arrive, attendre 2h environ… Me voici donc à squatter au bureau comme je sais si bien le faire, entre internet, la machine à café et quelques anecdotes de mon week end passionnant racontées au gré de mon inspiration. 18h, Philippe arrive avec ses quartiers de bœuf. Avec mon chef nous nous payons une heure de manut’ à tout remettre dans l’ordre et dans ma semie, puis je file au plus vite parce que l’heure tourne, entraînant avec elle mon amplitude journalière.
Je n’ai pas mangé à midi, je ne mangerai pas ce soir. Enfin… si, je me nourris de pommes et de noisettes… oui comme un écureuil, c’est tout ce que j’ai sous la main. J’attends une grosse demie heure au tunnel, le temps de réviser mes classiques sur 6 cordes, puis je complète cette coupure à Viverone : une autre demie-heure de guitare car je décide finalement d’abandonner l’idée de manger, il est trop tard. Je décharge un premier client à l’entrée de Milan puis j’échoue sur l’aire d’Agrate. Plus d’amplitude.

dans la semie

Mercredi 11

Il fait déjà chaud ce matin à 8h, trop chaud pour dormir, et puis l’autoroute toute proche s’est réveillée dans un concert de bruits aérodynamiques divers qui devrait durer jusqu’à la fin de l’autre heure de pointe, vers 20h. Je tire les rideaux. Devant moi, un immense panneau publicitaire avec une belle nana qui la joue contrariée tandis que son rebelle, chemise ouverte et tablettes de chocolat apparentes, tente de la ratrapper sur une plage de sable fin, c’est sans doute une pub pour du parfum. Pourquoi fait-elle la gueule ? Le parfum ne sent-il pas bon ? Le sable de la plage est-il vraiment fin ? Je médite quelques secondes sur ces 10m2 d’évasion puis je décide d’aller prendre une douche.
A la station Agip on m’indique l’autogrill. A l’Autogrill la douche est fermée à clé, je dois faire la queue avec les gens qui achètent des kinder bueno (en français : des « enfants bons »… c’est louche). Au terme de 3 minutes d’attente qui en paraissent 30, la jeune caissière me dit de m’adresser à la femme de ménage qui « doit se trouver dans les toilettes, c’est elle qui possède la clé ». Je retourne aux toilettes : Personne. Je cherche dans les endroits les plus improbables en ouvrant des portes au hasard, comme celle du cagibi, de la table à longée, des toilettes pour chiens… personne. Je retourne demander à une autre serveuse, elle me dit de chercher une « signorita » avec une veste jaune, et d’attendre devant les toilettes si je ne trouve pas.
Après un tour de l’Autogrill à la recherche de la signorita introuvable, je décide de me poster devant l’entrée des « bagni ». Dur moment que ce quart d’heure à faire le pied de grue : les voyageurs affluent par troupeaux entiers pour venir se soulager, parfois il y a quelques minutes de répit… et puis arrive un banc de touristes grabataires qui vient se disperser entre les lavabos et les pissotières, envahissant tout l’espace, imposant ignomignieusement le rythme lent et saccadé de leur problèmes articulaires à quelques badauds embarqués malgré eux dans la vague sénile alors qu’ils voulaient simplement acheter un kinder bueno, là, juste à coté des chiottes.
J’attends toujours. Je commence à perdre patience. J’interroge tous ceux que je vois avec une chemise « autogrill », tous se renvoient la balle, aucun n’a la clé. Je commence à sérieusement m’énerver : une demi-heure que j’attends, je ne sais même pas qui j’attends au juste. Je décide d’aller gueuler derrière le comptoir… on me trouve un directeur de je-ne-sais-pas-trop-quoi qui me trouve la mystèrieuse signorita avec une veste jaune : il s’agit en fait d’un type frisé avec une moustache et une chemise à carreaux… bref, j’ai enfin la clé, je vais me doucher.
Une heure passée à l’Autogrill, j’ai que ça à foutre.

Ma jounée commence officiellement à 11h50. Je fonce sur Verone. J’ai 6 tonnes de bouts de boeuf à décharger : un nouveau bain de viande juste après la douche. Je tente de ne pas trop me salir mais c’est sans compter les roulettes grippées des crochets qui m’obligent à pousser comme je peux, c'est-à-dire avec les bras, les épaules et la tête...
Sur le quai il y a le roi du robot : le seul type que je connaisse capable de prendre les avants de bœuf par deux, il est d’une dextérité étonnante, ne s’énerve jamais, travaille avec le sourire… tout l’inverse de moi-même.
Ce déchargement me permet de caser une coupure de 45 et donc d’enchainer avec la suite : Rovereto puis Bassano où j’arrive à 18h - juste avant la fermeture des portes.

Je suis maintenant libre d’aller à mon rythme à la recherche de la salaison perdue, du coté d’Udine, à l’ombre des jeunes Alpes en fleurs. Il fait lourd ce soir, encore 30 degrés à 19h. Je me paie une bonne dose de route nationale, ça roule mal mais j’ai le temps et j’écoute Beck… tout va bien.
J’arrive vers 22h30 à destination, un village étrange où les sèchoirs à jambons se dressent dans le paysage les uns à coté des autres, une sorte de « proscuito valley » au milieu de laquelle je localise mon client sans pouvoir me garer devant faute de place. D’ailleurs on peut se garer nulle part, je tourne un moment, je m’engage sur des routes incertaines, je fais des demi-tours… puis je décide de revenir sur mes pas pour me poser 10 km en amont, dans une zone industrielle… je ne trouverai pas mieux.

aire d’Agrate

Autostrada 22

je l’avais eu en flou, le voici en net

Rovereto

Jeudi 12

Ce matin je charge des jambons de compèt’… rien qu’en entrant à l’ufficio de la salaison on le devine. Il y a en effet dans le hall d’accueil toute une collection de photos dédicacées par des gens, plus ou moins célèbres, avec un jambon à la main et un sourire niais sur la figure. Il est coutûme d’afficher fierement ses relations dans un pays où l’image est prépondérante, ainsi je connais une boite près de Modena où l’on peut rire devant une photo de Jean Alesi avec un bout de jambon… Ce matin je reconnais le footballeur Canavarro, photographié au milieu du sèchoir, et puis d’autres dont quelques bimbos en jupe, exibant leurs propres jambons comme pour faire ton sur ton. Il est des gens dont la carrière de VRP dépasse la véritable notoriété.

Il me faut attendre, près de deux heures. Je réussis la manœuvre du premier coup devant un vieux en blouse qui me félicite : je lui dis que c’était un coup de chance. Je charge ensuite au tire-pal manuel en essayant de retenir de tout mon poids les lourdes palettes qui prennent dangereusement de la vitesse dans la semie en pente.
En jetant un œil curieux sur ce qu’il m’est possible de voir à l’intérieur du batiment, je constate qu’il n’y a aucune machine, tout est fait à la main. Par exemple sur ma gauche il y a 3 dames qui conditionnent chaque jambon après l’avoir enduit d’un produit mystère, puis passé rapidement sous la flâmme d’un chalumeau avant de lui mettre une sorte de bas résille sans doute pour le rendre plus affriollant auprès de la clientèle mâle…. Je pense qu’on ne fait pas les choses de la même manière chez Herta où Prédaut…
J’ai beaucoup transpiré pour charger, je me suis dit « tiens ils sont sympas, il vont peut-être me filer un truc pour me remercier ? »…. Non.

Je complète près de Portogruaro, là où j’ai attendu près de 15 heures la dernière fois. Aujourd’hui 2… Le temps de prendre la douche puis de manger une salade de riz et un poivron… drôle d’idée d’ailleurs le poivron.

Je repars en milieu d’après midi. Me voici réembarqué dans le flôt infernal de l’autoroute 4 : une file continue de camion qui n’ont pas le droit de se doubler sur des kilomètres, qui se ruent comme des morts de faim sur la voie du milieu lorsque l’interdiction est levée… mais qui stagnent au milieu parce que bizarrement ça accélère toujours lorsque l’interdiction est levée… quand est-ce qu’on se décide à faire rouler les trains ?

Stop à l’autoport de Modane.

la manœuvre n’était pas simple

San Daniele del Friuli

Natolino possède encore bon nombre de série3

tout sec

Vendredi 13

Ce matin en allant faire ma toilette dans les sanitaires de l’autoport j’ai fait tomber ma serviette de bain sur le sol souillé d’un mélange d’eau de douche, d’eau de toilettes, d’eau de lavabo et de poils… Par la magie de la capillarité elle s’est immédiatement imbibée de ce liquide douteux et des mille germes qui le composent… heureusement nous sommes vendredi et je n’ai plus besoin de cette serviette, malheureusement nous sommes vendredi 13.
Je prends un café au bar, tenant toujours ce qui est déshormais une serpierre par le bout de l’étiquette, puis je décolle tranquillement dans la vallée de la maurienne.

La route peinard du vendredi matin : quel bonheur… ça ressemble à la route peinard du samedi matin avec l’assurance de pouvoir aller faire des courses à Atac ce week end, ce qui est complètement génial bien entendu, mais surtout de voir Ntwin et 31 Knots à la Cave ce soir, ce qui est encore mieux.

J’arrive à Lyon à 10h30 pour décharger. Les quais sont occupés et la chef de réception m’annonce beaucoup d’attente. Finalement ce ne sera que deux petites heures et je m’en retourne sur Bourg en Bresse. Fin d’une petite semaine avec seulement 2000 Km au compteur.

légende roulante

Samedi 14
Dimanche 15

Lundi 16

oufff... pas évident de se lever à 4h30... surtout lorsqu'on s'est couché à 1h30. Au risque de surprendre et même de décevoir, je ne suis pas en retard ce matin. Je ne suis pas en avance non plus, je cours comme un dératé jusqu'à ma voiture, je balance tout dedans et je traverse à Bresse endormie sous un ciel lui aussi endormi. Je retrouve mon camion attelé, mais comme mon programme a changé au cour du week end, ce n'est plus la Chéreau derrière... et mes gants sont restés dans son coffre en alu, ils sont partis en Bretagne. D'ailleurs celui qui a attelé a utilisé mes gants de lavages, les tous pourris que j'oublie de mettre à la poubelle chaque week end, ça se sent jusque sur le volant. Il n'en fallait pas moins pour m'énerver. Je ne suis pas du genre chochotte mais le fait est que je ne supporte pas d'avoir les mains sales... et donc d'attaquer une semaine sans paire de gants. Pas moyen d'en prendre au bureau, c'est fermé. Je pars. Je m'arrête en acheter sur l'aire de Beynod pour 72 fois le prix qu'ils valent...

Ma journée commence justement par un client à Beynod, le premier d'une liste de quatre : 3 sur Lyon, 1 à Thiers. Cela ne me déplait pas une petite tournée de régional de temps en temps, ça change. A 7h30 je suis à quai, à 8h00 j'ai déchargé. Le deuxième se trouve à Chassieu : je réussis la manoeuvre difficile du premier coup devant 5 ou 6 employés qui me regardent faire en soufflant sur leur café... la classe Régis, t'assures un max...
Je vide ensuite à Chaponnay, il n'est que 9h et c'est déjà presque fini. Me voici sur l'A42 en direction de Clermont, je sors à Thiers avec 4h10 de volant et j'arrive chez mon client avec 4h24 pour vider juste avant la pause de midi et juste avant qu'Elysian Fields joue en live au Fou du Roi... décidément tout est calculé, tout se passe à merveille, de quoi me faire oublier cette paire de gants partie en Bretagne vers un avenir meilleur alors qu'on avait vécu tant de choses ensemble...

Ca y est il est midi, mon rechargement est théoriquement prévu demain mais je peux y être à 14h et l'entreprise n'est pas du genre pénible.
Sur le trajet je prends un quart d'heure pour m'arrêter à Carrefour : il faut absolument que j'achète ma place pour le Primavera Sound Festival, c'est la semaine prochaine et je ne l'ai toujours pas... oui, la semaine prochaine je suis en vacances, et à Barcelone, et la tête dans les amplis, enfin normalement. Il faut aussi que j'achète du déo et des tictac. finalement j'opte pour du stick large et des pastilles vichy (je consomme local - bien qu'elles aient probablement fait plusieurs centaines de kilomètres avant de revenir ici)... petit moment de solitude que ce passage en caisse avec du stick Mennen et des pastilles vichy : ça fait un peu le gars qui a des choses à se reprocher.

Je charge bien cet après midi. Le cariste fait des aller-et-retour avec un petit bout de conversation à chaque passage, une sorte de conversation par intermittence, très régulière, tellement régulière que vers la fin il repasse avec l'intention de me dire quelquechose, je le vois dans son regard, mais finalement non... il manque apparemment d'inspiration et retourne à son chargement. Ce type est sympa, 30 ans qu'il bosse ici, je me demande comment c'est possible compte tenu qu'il m'est difficile de rester 10 minutes sur le quai tellement ça pue...

15h30, c'est parti, direction la Suède.

Je me tâte un moment sur la stratégie à opter pour ce voyage... je choisis de monter par le Danemark et de rouler 10h aujourd'hui, car on ne sait jamais.
Il est 19h lorsque je passe devant l'aire de Montigny avec 9h50 de volant sans m'y arrêter. Non je ne suis pas fou, au contraire : je sais pertinemment qu'il n'y aura pas de place et de plus je n'ai même pas envie d'y échouer en vrac avec le frigo qui tourne et la hantise de me faire accrocher le camion... Non, je choisis de prendre la sortie suivante, pour me poser n'importe où mais ailleurs. Par chance il y a beaucoup de place derrière le péage, je me gare en bord de verdure, c'est parfait, je suis content, sauf que la cannexion 3G est merdique, mais c'est un mal pour un bien : je joue de la guitare.

les nouveaux radars de la RCEA

des gros Daf

16c ça sent le poivron dans le camion

Mardi 17

Mauvais calcul : à 6h30 la route du Luxembourg est déjà embouteillée. J'ai à peine passé Metz que les premiers ralentissements arrivent, et puis, derrière un virage c'est le bouchon, le vrai. Ils sont tous un par voiture, un seul dans leur grosse berline ou leur gros coupé, embarqués dans cette marche de l'empereur, dans cette migration quotidienne vers les terres Luxembourgeoises pour des raisons que la raison ignore, mais pas le fisc.
Quand est-ce qu'on l'améliore cet axe de circulation? C'est bien beau de planter des panneaux d'interdiction de dépassement pour ces fichus PL, mais cela ne résoud pas tout, la preuve. Et je ne parle pas des trois stations services complètement inadaptées, et même honteuses, qui restent telles quel depuis des lustres entre Toul et Metz, en dépit des évolutions de trafic. Si cela ne tenait qu'à moi je n'y metterais jamais les roues, mais il faut impérativement prendre l'eurovignette avant de sortir de France : Ce matin j'ai fait un bref crochet sur l'Aire de Toul, la moins pourrie des 3... j'ai bien failli ne jamais en sortir, il m'a fallu taper une marche arrière sous les pompes et prendre ensuite le chemin étroit tracé entre les PL échoués et les bordures en béton pour revoir le jour... une honte. Certaines régions au relief escarpé justifient le manque de place... mais là? C'est quoi le problème? Pas moyen de goudronner une parcelle de pré de vaches pour pousser le parking? Faut-il impérativement attendre une société privée comme le messi?

Une fois ce joyeux bordel derrière moi j'arrive à Wasserbilig pour mettre un peu de gazole et faire 45 minutes de pause. Le restaurant est toujours en travaux : on construit un Burger King, génial, ça manquait un bon restaurant...
Je bois un café en flânant dans les rayons de la station Esso. Je regarde effrayé la liste des ingrédients sur l'emballage orange fluo d'une saucisse "Bi-Fi", ces sortent de hot-dog froids que l'on trouve un peu partout et que je n'ai jamais gouté par manque d'inspiration ou de témérité; puis mon attention se tourne vers l'espèce de comptoir à pizza où la jeune "pizzaiolo" prépare une pate avec sa chemise "Esso" sur les épaules... les mains dans la farine entre deux pleins de super? Je veux faire une photo souvenir en douce, c'est tellement grotesque, mais j'abandonne car il y a ici que des clopes, de l'alcool et des saucisses "Bi-fi" à vendre : mieux vaut-il ne pas faire des photos en douce, l'endroit est surveillé.
Je prends ma toll collect et je me casse de ce monde synthétique.

Sur la portion de route nationale qui va de Prüm à Blankenheim, je suis talonné par une sorte d'écervelé qui n'est apparemment pas assez courageux pour braver l'interdiction de dépasser mais qui préfère me suivre à un mètre, décallé sur ma gauche pour mieux voir devant. Voici le spécimen typique d'homo-débilitus maintes fois étudié dans ce cdb. Je roule effectivement à 70... car devant il y a collègue de chez Alainé qui roule à 70... et qui est dans son bon droit vu que c'est limité à 70. C'est chiant, certes, mais dans ce cas il y a deux solutions : soit tu doubles, soit tu restes derrière, et si tu restes derrière c'est à plus d'un mètre et sur ta voie... ça y est il m'a énervé.

Aujourd'hui je passe par Hannovre, parce que j'ai envie de passer par Hannovre.
En 9h52 j'atterris à nouveau sur une station Esso, avec à nouveau un Burger King. Rien à foutre : je ne me nourris plus que d'endives et de radis, si j'ai décidé de couper ici c'est uniquement pour y trouver une douche. Je tombe comme d'habitude sur une douche grand luxe, les Allemands sont vraiment au top à ce niveau là. Ca brille, c'est propre, ça sent bon, c'est grand, c'est bien fait, il ne manque rien, il y a même des choses étranges comme ce distributeur de savon automatique ou ce séchoir à cheveux high-tech... le tout pour 2 euros, c'est à dire 1 de moins que la pièce avec un pommeau entartré et une chaise, à Suse.

Aires de toul, Pont à Mousson, La Maxe : un scandale.

en haut : le Luxembourg

avec un écervelé dans le rétro

on se voit même dans la poubelle!

Mercredi 18

oufff... le réveil à 2h30... pas évident... surtout lorsqu'on s'est couché à 23h. Ce n'est pas de ma faute c'est de la faute à ma guitare : elle sonne tellement mieux depuis que j'ai changé les cordes ce week end que j'ai du mal a m'en séparer, même pour dormir.
Premier réflexe : aller boire un café... même si son prix est scandaleux; 2 euros la petite tasse - 2 euros 90 la grande pour du café servi au distributeur, ça frise le foutage de gueule. Bien entendu je prends une petite tasse parce que je suis radin, et puis parce qu'une petite tasse de café allemand équivaut à 3 grandes tasses de café italien en proportion, pas en goût, en goût c'est de la flotte. Heureusement la machine est vachement belle, elle clignote lorsqu'elle sert le café, elle sonne lorsqu'elle a fini, malheureusement elle n'a aucune conversation et conforte les bestioles dans mon genre dans leur mode de vie associal.

Départ à 3h. La nuit l'Allemangne est belle, éclairée par les gyrophares des convois exeptionnels qui s'accaparent l'autoroutes avec leurs éoliennes, leurs pelles où leurs transformateurs géants. J'en croise 50, j'en double 15, incroyable.
En 3h de route j'arrive au port de Puttgarden (en anglais "jardin de putt"), je prends mon billet et avance jusqu'à la file 20. Les files 18 et 19 sont complètes. Je pense qu'il va falloir attendre non pas le prochain bateau, mais celui d'après. Certes, on verra bien. Pas de Français, peu d'ouest-Européens, quelques scandinaves et beaucoup d'Est européens... voici le tableau. Le ferry de la Scandlines arrive, déverse un flôt de véhicules qui pars à l'assaut de l'Allemagne pour en reprendre un autre qui frémit d'impatience pour conquérir le Danemark. La ligne 18 entre, la ligne 19 entre... il reste quelques places... et je suis le dernier de la ligne 20 a monter à bord : gros coup de chance. La traversée dure 50 minutes, je ne sors pas du camion, je m'étale sur la couchette pour dormir un bout, bien au calme dans cette soute de bateau bercée par la Baltique.

Je m'attendais à de sévères contrôles douaniers coté danois, j'ai entendu la semaine dernière sur les ondes que le pays souhaite revoir le concept de libre échange par poussée de nationalisme chronique comme c'est tristement le cas à peu près partout même à Pont de Vaux... mais finalement rien : nous sortons comme ceux de tout à l'heure sont sortis coté Allemand : tel une déferlente à l'assaut du Danemark. Je sors le dernier et j'appréhende le nombre de grumeaux à doubler sur cette autoroute où cela m'est interdit depuis 6h... Je reste surpris de voir que je ne rattrappe personne : tout le monde roule. C'est très bien.
Je traverse le pays sans voir grand chose hormis des chevaux dans les champs et des champs dans le paysage; j'arrive à Helsingor sous un trou dans les nuages qui offre un soleil éclatant, comme ça d'un coup, alors que la grizaille semblait s'être installée pour la journée.
Cette fois-ci je sors du camion pour aller voir à quoi ça ressemble sur le pont du bateau. C'est beau. Il y a des gens qui prennent la pose pour garder un souvenir de leur tronche en train de prendre la pose devant le port d'Helsingor.

Je débarque coté Suèdois, pas de contrôle non plus. A 11h05 je suis à destination, sur la bascule, devant la cabane d'Ilgueugueu (oui, et je l'avais déjà écrit : cette suèdoise chargée de peser les camions est le sosie parfait d'Ilgueugeu de "Salut les musclés" - la pierre angulaire des programmes audiovisuels des années 90). Va savoir si ce n'est pas elle d'ailleurs? Que sont-il devenus? On ne le sais pas? On ne le saura jamais. Je suis sûr que c'est elle...
Quai n°6, je décharge de suite, puis je retourne à la bascule avec mes suspicions.

J'ai 3 rammasses et plus beaucoup d'heures au programme, j'échoue à la troisième avec 8h30 de volant, il y a du café et une bonne salle de bain, la suite du programme aura lieu demain.

au bord de la Baltique

Helsingor

celui-ci est célèbre

...oufff!

...oufff aussi!

Jeudi 19

Toujours au fond de la cour. Je me réveil à 9h, la bouche pâteuse et le cheveu ébouriffé, après avoir éteint mon réveil à 7H. Hier j'ai encore abusé, abusé de Sol et de Si pendant des heures; les caristes ont fermé l'entrepôt et sont passés me faire signe avant de partir, il était près de 2h du matin et je faisais toujours le Francis Cabrel sous une pluie intermittente probablement conséquente de mes plus lamentables reprises des Smashing Pumpkins, toujours les mêmes et toujours aussi mal jouées depuis mes débuts sur 6 cordes. Ils ont dû se dire : "c'est quoi ce type? il est fou?"... lorsque j'ai vu l'heure, je me suis moi-même posé ces questions.

Je me réveille sous la douche, puis je prends un non-café parce que la machine est en entretien... On me propose de déjeuner dans le réfectoire, en compagnie de la mère du patron, une dame très agée qui vient préparer le casse-croute pour toute l'entreprise chaque matin, depuis des années. Je trouve cela vraiment extraordinaire mais je décline l'invitation plus par timidité stupide que par manque d'apétit... j'ai simplement peu envie de me retrouver tout seul face à cette sympathique grand-mère à essayer de meubler le silence en Suèdois. Je ne parle pas un mot de suèdois... j'en parle deux : "Salut" et "merci", difficile de faire de long discours avec ça.

Hier on m'a dit "chargement demain - 10H"... et aujourd'hui à 10h on me dit "chargement 13H". Génial. Peu importe finalement, le tachy est toujours sur repos et moi aussi : je retourne dans ma cabine écouter la radio, puis "Bleach" de Nirvana volume 47 en triant mes photos de camions suèdois dans l'optique de les envoyer, un jour, si j'y pense, si je retrouve une connexion internet.

Il est 12h15 lorsqu'un grand blond avec deux chaussures noires traverse les 2km de cour pour me dire de me mettre au quai n°1. Dommage pour lui j'ai un risotto sur le feu : va falloir attendre que ça cuise mon gars, et puis attendre que je mange... on a bien dit "chargement 13h" non?
Je me mets à quai à 12h50, début officiel de ma journée.
Nous chargeons, complet, à ras les portes, à ras le plafond, à ras les 40t de ptra... le Suédois est du genre précis.

Vu l'heure et vu le temps de conduite qu'il me reste - 9h et 58 minutes-, je décide de descendre via le Danemark.
Le soleil est au rendez-vous et je shoote du train routier à la pelle. C'est bien simple je ne roule pas avec l'appareil à porté de main : je roule avec l'appareil DANS la main, à la manière d'un Mich07, tellement il y a du gros scania et du gros volvo dans mon champ de vision. D'ailleurs j'ai une pensée pour Mich07... survivrait-il à autant de jolis camions? j'en doute... et la rubrique "photos à gogo" de FDR serait vite saturée... alors qu'avec moi : pas de souci! tranquille! je garde tout dans mon disque dur!
Oui effectivement je mérite des baffes.

Helsingborg - Helsingor sur le pont du bateau, les cheveux au vent, toujours avec mon appareil photo.
Me voici au Danemark. Je roule en direction de Copenhague et la circulation s'intensifie de plus en plus, jusqu'à se paralyser complètement alors que la capitale est encore loin. Il s'agit simplement de l'heure de pointe, je suis en plein dedans. Je perds une bonne heure en compagnie des milliers de costards-cravates et je suis contraint de faire 45 minutes de coupure non-prévue pour atteindre le port de Rodby à l'autre extrèmité du pays. Pas de problème, j'ai le temps.

Un peu comme il y a deux semaines je prends le second bateau, vers 20h, au moment ou mon estomac commence à se manifester. Comme il y a deux semaines je choisis le poisson pané dégueulasse avec le kilo de frites grasses et la louche de mayonnaise qui vont avec, c'est un bon compromis entre les soucisses de Frankfurt écarlates et les schnitzel dégoulinants d'huile. 6 euros 99, avec les 35% de "réduction routier", mon premier resto depuis deux semaines. Je ne prends même pas à boire avec. Le coca à 3 euros n'a pas su me séduire.

Arrivé en Allemagne je prends ma toll collect chez Aral et je me lance pour 4h de musique, quasiment seul parmi les premiers convois exceptionnels qui commencent à sortir de leur tannière.

Je m'arrète quelquepart entre Hannovre et Bielfeld, il ne reste qu'une place tout au fond du parking, la mienne.

Suède

plein de gros scania...

retour au Danemark

quesqu'on se marre avec le capitaine!

bybye Sweden

un Finlandais au Danemark

Vendredi 20

J'irais bien boire un café mais la station est à 800 mètres et je suis fénéant. Je me contente donc d'une banane, un yaourt et deux pains au lait. Je décolle après 9h02 de pause, Le "Fou du Roi" commence, j'écoute la chronique de Morin, elle me fait marrer, j'écoute celle de Maihlot, elle me fait moins marrer, puis vient celle de Roca : une perle, une de plus, je suis fan. Les infos de 13h et les aventures tumultueuses de DSK au pays des avocats ne m'intéressent que très peu et sonnent le glas pour France Inter à qui je préfère les Queens of the Stone Age volume 59 pour mieux palier à l'ennui du bitume germanique.

Engoncé dans les bouchons de Köln, je chante "I can go... with the flow...", ce qui est presque risible.

Je m'arrète sur la dernière station autoroutière, près d'Euskirchen, pour manger une salade de tomates et prendre ma taxe.

Jusqu'ici il fait beau, mais le ciel se charge lorsque j'approche de Luxembourg. Je passe une bonne demie heure dans le rituel bouchon de fin de journée... puis quelques gouttes tombent... puis quelques glaçons tombent : une averse de grêle de 3 ou 4 minutes pour encore plus de stress.

Je fais une livraison dans la soirée, au Luxembourg.
Avant de repasser la frontière je remplis les reservoirs et le ventre à Berchem, profitant du "menu truck" à 5 euro 99 : un plateau complet à l'Arche pour moins cher qu'un poisson pané scandlines.

De retour en France je renoue avec les joies que procure un téléphone protable éteint depuis 4 jours. Je roule jusqu'à Nancy, il reste une ultime place sur l'aire de Ludre, j'ai de la chance.
La station est éclairée mais on ne peut y entrer par mesure de sécurité : on peut seulement demander des trucs au vendeur à travers l'hygiaphone :
_"bonsoir, j'ai besoin d'aller aux toilettes, vous pouvez y aller à ma place?"
_"mais biensûr monsieur! petite ou grosse commission?"

Je pisse contre un buisson et je retourne au camion...

les convois Allemands

oui oui, je fais une photo

Luxembourg

Samedi 21

Je me lève un peu en retard mais tant pis... je peux me permettre 9h30 de coupure un samedi matin.
Je prends le temps de faire ma toilette dans les sanitaires qui sont désormais accessibles, puis je bois un café au bar.

Il est presque 8h lorsque je m'élance sur la route nationale pour ne plus la quitter jusqu'à Bourg. Il me faut 4h45 pour rentrer, cela implique 45 minutes de repos que je prends en plein centre d'un bled isolé entre Lons et Bourg, afin de profiter de la boulangerie et d'un feuilleté au poulet pour accompagner ma 7ème salade de tomates de la semaine. Je reprends ensuite la route. Il y a des flics sur tout le parcours, à l'affût, près à déguainer le carnet de PV.
J'arrive dans la cour en début d'après midi.

Je suis en vacances.

Youpi.

Je laisse mon camion. A qui? je l'ignore... et peut-être mieux vaut-il ne pas le savoir dans l'optique de passer de bonnes vacances. Il y a déjà bien assez de choses qui m'énervent autant qu'elles me déçoivent en ce moment chez Asotrans, et ce n'est pas mon chef qui me rassurera en tentant vainement de me persuader que 2+2=5.

Merde.

Voici une photo que Thomas a trouvé sur internet, elle a été prise au nord de l'Allemagne. J'aime beaucoup!

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