Mon Carnet de bord... Suivez mes aventures, semaine après semaine!

Octobre 2011

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Samedi 1

 

Dimanche 2

J'ai comme les oreilles qui sifflent en ce moment?

Je suis d'excellente humeur aujourd'hui. Oui. Comme chaque semaine j'ai pris soin de choisir méticuleusement mon programme pour laisser les miettes aux autres, c'est ainsi que je me retrouve à Bourg dès 20h ce dimanche, pour aller livrer à.... Givors. Oui, Givors, 1h30 de route pas plus, ensuite coupure sur place pour recharger à 12h lundi à quelques kilomètres. Un programme de rêve non? Quitte à choisir autant prendre le meilleur...

Il est donc 20h lorsque j'arrive à Bourg. Je rentre tout juste de Weekend et je n'ai pas mangé. J'entrevois l'éventualité du Mcdo à défaut de mieux mais la file de djeun's pré-puberts qui s'agglutinent jusqu'à la porte d'entrée pour obtenir leur Big Tasty me décourage. Je passe tout droit.
J'arrive donc dans la cour, chez Asotrans. Je tente de discuter quelques instants avec Jozcef qui a passé le week end ici, quelques instant seulement car la barrière de la langue est un peu trop haute... Jozcef est un collègue qui a l'air vraiment gentil.
Je retrouve un semblant de sourire en découvrant que j'écoppe pour cette semaine d'une semie pas trop mal, une des dernière Lamberêt : bien entendu, en plus de choisir le programme je choisis aussi le matos. Je choisis tout, je fais ce que je veux, je suis un profiteur, un manipulateur, c'est moi le patron. Non? A force de l'entendre dire...

J'ai comme les oreilles qui sifflent en ce moment?

Me voilà sur la route. 1H30 pile plus tard c'est déjà fini, je suis à destination. Je reste Trois plombes à quai mais je ne suis plus à ça près... d'autant que sur le BL je peux lire "livraison le 03/10" et nous ne sommes que dimanche 02/10... no comment.

De toutes façon j'ai du mal à dormir : un petit problème de sifflement dans les oreilles, rien de grave...

le jour le plus long

allez... va pour les farfalles...

Lundi 3

12 heures de coupures plus tard je peux aller faire mes courses à Carrouf car j'ai encore quelques heures devant moi. Et dire que je vais cavaler en fin de semaine pour essayer de rentrer de Suède...
Carrefour Givors c'est grand, c'est chiant et je n'y metterais pas un pied si mon frigo n'était pas vide. Là en l'occurence il y a urgence, je n'ai plus rien à manger. Je me gare donc sur la contre-allée du Darty, et me voici parti avec mon caddie à la recherche d'un bonheur improbable.
Cela dure plus d'une heure, je suis une ménagère tatillonne, pas question de me faire arnaquer sur le kilo d'endives.

Vers midi je me dirige comme prévu sur mon lieu de rechargement. Complet pour Clermont, départ 14h, tout va bien.
J'arrive donc en Auvergne avant 17h, je décharge dans la foulée avec le concours d'une équipe de manars bien motivée comme on en rencontre que trop rarement. Je ne peux pas recharger aujourd'hui pour la Suède, il est trop tard. Alors, plutôt que de poireauter mes 15 nouvelles heures de coupures dans la zone industrielle de Moulins je préfère les passer en très bonne compagnie, devant des sushis.

Je me gare au centre routier, du moins à l'endroit indiqué comme tel. Il s'agit concrètement d'un parking sur lequel squate toute la misère du monde de la route. A peine arrivé un chauffeur portugais vient demander mon aide avec ses pinces à batterie. Je me gare à coté de son magnum, nous branchons, il ne démarre pas. Je reste quelques instants avec lui pour trouver l'origine du problème, en vain... alors je laisse le galérien avec son téléphone comme ultime recours : il n'a pas les moyens de payer les services du garage tout proche...
Entre tas de poubelles et flaques de pisse je trouve une place. Cet endroit est ignoble.

Une soirée à Clermont donc... et toujours cette vision singulière des pierres noires, des dômes noirs, de la cathédrale noire, dans la nuit noire.

je veux les mêmes drapeaux derrière Chef?

1 mois d'autarcie

Auvergne! me revoilà!

une grosse envie d'y mettre un coup de guitare derrière la tête...

Mardi 4

Après une journée de 1h30, une autre de 2h30, ma semaine débute véritablement aujourd'hui car j'ai bien entendu choisi une fois de plus mon boulot : un tour en Suède.
C'est bien connu : j'aime faire de la ligne.
Nous sommes le 04 octobre et il fait un temps estival lorsque je quitte à contre coeur la cité auvergnate. J'écoute ce gros taré de Nick Cave et je roule tout droit sur Moulins. Je charge avant midi.

Comme par enchantement je m'enquille juste derrière un camping-car sur la RCEA. Un VRAI camping-car. Celui qui fait bien chier. Aguerri à ce genre de specimen et en vertu de ma patience légendaire j'installe de suite une grande distance entre nous, je le laisse un peu filer, conscient que de toutes façons il n'y a pas de zone de dépasement avant longtemps. Horreur : rien à faire, le cauchemar ambulant oscille entre 75 et 95 Km'h, selon une loi geo-statique mystèrieuse. Je reste patient. La première zone de dépassement arrive, je me rapproche... plus que 1000 mètres, je colle au pare-choc... ça y est, nous y sommes, je déboite!... et voila mon camping car qui me laisse à gauche en accélérant tout tranquillement à 91 Km'h. Puis la deux-voies redevient 1 voie - puis le camping car se remet à osciller entre 75 et 95 Km'h. Dur la vie de routier! J'abandonne, il a gagné, je sors sur l'aire de Pierrefite pour anticiper ma coupure.

Première fois que je m'arrête ici : un bien joli squate où l'on pique-nique dans les coffres à palette et dans les vapeur d'urine; oui comme à Clermont...

Journal de 13h sur France Inter : "Amélie Moresmo a été flashée à 163 Km'h sur l'A6 ce dimanche, les gendarmes d'Avallon l'ont reconnue immédiatement (suit l'interview d'un des militaires), pour l'anecdote elle ne perdra aucun point dans l'aventure étant domiciliée en Suisse..." Non mais franchement? Qu'est-ce-qu'on en a à foutre? L'info est à peu près aussi promordiale que Strauss Kahn qui mange des pâtes aux truffes à sa sortie de prison... mais où est passé France Inter?

Seconde coupure à Toul, en vrac devant les pompes en attendant que l'on agrandisse le parking; je passe ensuite au Luxembourg pour échouer sur ma station Esso préférée, garé à l'envers dans un souci de courtoisie sonore avec mon frigo qui tambourine sans relâche.

le FH540, ça les fait toutes craquer

un camion-araignée

sous les lumières du Luxembourg

avant ou après manger?

Mercredi 5

Départ 08h. Ce matin tout va très vite : j'ai une pompe de libre pour mettre du gazole à Wasserbillig, j'ai une borne de libre pour prendre ma Lkw maut à la vitesse de l'éclair. Que dire de celle-ci aussi, l'aire de Wasserbillig... Rien que traverser à pied le parking c'est bouffer à plein poumon une bonne dose de vapeur de pisse, c'est dégueu. Bref, je ne vais pas me mettre à recenser les parking insalubres, la tache est titanesque! Alors passons...

Il y a toujours ces fichus travaux entre Trier et Bitburg, la déviation n'est pas des plus anodine, surtout lorqu'on se retrouve derrière un vieux Man TG polonais qui agonise tout ce qu'il peut dans les pentes raides pour trainer son trop lourd chargement à une vitesse ahurisante de 30 Km'h. Dès la première portion de deux-voies je prends le risque de dépasser car c'est interdit certes, mais c'est aussi insupportable.

Ma traversée de l'Allemagne est banale : pleins de gars de l'Est qui se courent après sur des autobahn surchargées.

En début d'après midi j'apprends qu'il n'y a plus de place pour moi sur le bateau. Génial. Ca fait 4 jours que je suis sensé prendre le bateau mardi soir et j'apprends mardi aprem qu'il n'y a plus de place... faut m'expliquer?
Je revois mon programme, l'objectif est maintenant de rouler jusqu'à Puttgarden et de passer via le Danemark demain matin.
En fin d'après midi : nouveau coup de téléphone, "finalement il reste une place sur le bateau"... je re-revois mon programme.

J'aurais dû arriver à Lübeck en moins de 9h mais finalement je suis content d'y arriver tout cour, c'est à dire en moins de 10h, car pour ce faire il aura fallu jouer de l'accordéon durant près d'une heure à hauteur de Reinfeld. Ma traversée de l'Allemagne est effectivement banale.

J'ai pris soin de me préparer à manger avant de monter sur le bateau, afin d'éviter le brou signé Nordline moyennant 6 euros qui empiète de surcroît sur mon temps de sommeil.

magnifique...

Pas mal le dernier Scania!

des convois, des convois, et encore des convois...

des bouchons, des bouchons, et encore des bouchons...

Jeudi 6

Debout à 6h15. Je lache 9 sverige kronor en échange d'un café bien chaud que je sirote en regardant les infos-traffic de Stockhölm à la télé. Certes je m'en tape des infos-traffic de Stockhölm, mais les pubs qui passent toutes les cinq minutes sont marrantes... et puis dehors il pleut, une pluie froide et horizontale, une pluie qui conforte à regarder les infos-traffic de Stockhölm.

Inutile de courir au camion à 7h : je suis garé dans les dernières positions. Cela dit aujourd'hui les camions sortent vraiment au compte goute, il est bientôt 8h et je suis toujours dedans. Je découvre l'origine du problème à la lumière du jour : il y a un filtrage de la "polis" à la sortie du bateau. A 8h15 du matin je me retrouve à souffler dans le ballon électronic... résultat négatif bien entendu... j'attends toujours 9h pour siffler mes 5 litres de ricard pur quotidiens.

La file indienne du port file unie vers l'autoroute E6, et comme il est interdit de doubler, il suffit d'un ralentissement anodin pour faire freiner tout le monde. Résultat : ça roule très mal. C'est usant, même de bon matin. Alors plutôt que je commencer à manger le plastic du volant je décide de couper à travers la campagne, par la même route que nous avions emprunté avec Thomas la dernière fois. Adieu autoroute, veau, vache, camions, je m'en vais barouder dans les champs!
Le cracha froid et incessant souille mon pare-brise sur tout le parcours, mais au moins ça roule.

A 10h30 je suis vide. J'ai pour consigne de recharger plus au nord, à Växjö, 2h de route. Il pleut de plus en plus, j'arrive dans la petite boite où je recharge sous le déluge. Je suis très bien acceuilli, les gens sont vraiment gentils, polis, serviables... on me propose 5 fois le café, on est soucieux de m'indiquer le temps de chargement, on se renseigne sur "qui je suis" et "d'où je viens", on m'explique l'activité de l'entreprise, on me fait une visite guidée, on me repropose encore du café, et enfin lorsque je m'en vais on me souhaite "bonne route" en français s'il vous plait. Bon sang... un seul chargement comme celui-ci et voici toute ma haine, mon aigreur, mon apitoiement sur mon pauvre sort de routier contemporain renvoyés aux oubliettes...

Aujourd'hui je suis chanceux : un seul chargement.

La pluie elle ne tient pas à se faire oublier! Cela fait près de 10h qu'elle me tombe sur la tête et gache mes photos. Et puis, je m'en doutais un peu car c'est toujours le même phénomène, lorsque j'arrive à Malmö dans la soirée un trou se forme dans les nuages et le soleil apparait, éclatant, dessinant ça et là les arcs en ciel de mes amis les Bisounours.
C'est le vent du large qui a fini par poussé tous ces nuages, il souffle très fort sur le béton du port de Malmö, accentuant la sensation de froid promulguée par 10 petits degrés qui se battent en duels. Le bateau est en retard, sans doute lui aussi à cause du vent. J'en profite pour m'envoyer un risoto, ce qui me permettra une fois de plus d'échapper au saumon mal décongelé avec sa sauce sucrée.

on souffle chacun notre tour à la sortie du bateau

un DHL parmi tant d'autres

non je ne peux pas être au four!

un vrai temps suèdois

précision suèdoise

Vendredi 7

Partis en retard nous arrivons en retard. Il est presque 8h lorsque et la baie de Lubeck est déjà sous la lumière du jour lorsque le Finntrader y trace son sillon, fait demi-tour et accoste pour relacher son nuage de petits camions. Je suis garé sur la passerelle, je suis aux premières loges pour assister à l'attraction du siècle : le tour de bascule qui remet le camion dans le sens de la marche; c'est génial.

8 dégrés, pas plus, je range mon bermuda pour enfiler un jean : les bornes toll collect sont dehors, exposées au vent. Et comme d'habitude il faut y faire la queue.

Un camion s'est couché sur le coté gauche dans l'autre sens de l'autoroute, tout près du port. Lorsque je passe une grue est en train de le relever, la portière conducteur est couverte de sang, c'est horrible.
Derrière il y a un énorme bouchon, sur plusieurs kilomètres.

Mon collègue Olivier est à Hambourg, sur le point de charger au moment où je passe. Je décide donc de l'attendre sur une aire, puis nous faisons route ensemble. ça roule fort, ça roule mal, parfois ça s'arrête même de rouler... un vendredi classic en Allemagne.
Nous ne prenons pas le temps de manger : week end en ligne de mire. Nous faisons donc tout juste 45 minutes vers les 15h30, Olivier se fait un café-saucisse, moi un café tout court... et puis nous continuons.
Après une ultime dose d'embouteillage à Cologne nous redescendons via la route nationale sur le Luxembourg, l'heure avance, le soleil recule, la route redevient fluide.
Nous n'avons pas de quoi aller jusqu'à Berchem, son gazole, son tas de camions sur le parking, et ses menu "trucker" à 5,99 euros. Je fais donc découvrir la super station Esso de la ZI Potaschberg à Olivier, là où j'ai déjà coupé mardi soir. Soirée frikadell - pizza - bitburger... ça y est nous sommes Allemand!

port de Lübeck-Travemünde

ne coupe pas n'importe-où cette nuit Michel!?

toi aussi! pars à la conquète de l'Ouest avec Rudolf!

Olivier apprécie la gastronomie Allemande

Samedi 8

5h ce samedi, je réveille Olivier et nous allons prendre un café à la station. Cette dernière est terre d'asile pour toute la jeunesse des environs qui repousse la fin de soirée entre potes pour l'amener vers le "buggage" au petit matin devant un ultime Red Bull et des gâteaux salés. Ils sont des dixaines tous pareils, le cheveux étudié, le jean slim et la jupe mini, à se succèder par petits wagons de Golf GTI devant nos yeux émerveillés.

Pause gazole à Berchem et connerie du jour : grace à mon carnet Aral je m'achète un nouvel atlas à la station... je paie avec ma carte bleue... la caissière me rend le ticket, pas la carte, et moi je ne percute pas, sans doute encore à moitié endormi. Ensuite nous prenons le café juste à côté de la caisse avec la caissière mais personne ne m'interpèle. Nous partons. Ce n'est qu'à hauteur de la frontière que je ressens comme un oubli. Je m'arrète sur cette dernière, je cherche ma carte, réalise, appelle Aral, et fais demi-tour.

Du coup je laisse filer Olivier, je perds une vingtaine de minutes à faire ma boucle.

Voilà, pas très fier de moi... et un peu amer envers la caissière quand même.

Je rentre à Bourg sous un temps humide et froid; ça y est, c'est l'automne, les jours qui déclinent, les feuillent qui tombent et les oiseaux qui vont voir ailleurs si j'y suis.

Dimanche 9

Lundi 10

Il y a eu à peine 10 minutes entre "Régis dans son lit qui en écrase sévère" et "Régis dans sa voiture qui ne voit rien parce que les essuie-glaces sont morts". Je suis à l'ouest; je n'aime pas les départs tôt le lundi, je préfère limite le dimanche.
Au dépôt je me fais un petit café, je mets un petit sucre et je le touille avec une petite cuiller. Il grand temps de rejoindre à grands pas mon grand camion pour un grand voyage. C'est très moyen ce que j'écris.

Ce lundi matin est d'un triste! Je roule la première demi-heure sans même mettre la radio, comme ça, en direction de Moulins, résigné. Et puis j'appuie sur le bouton "source" de l'autoradio : la radio en FM ne marche pas comme d'habitude, j'écoute le son triste (lui aussi) des grandes ondes qui s'accorde parfaitement avec la bruine et les 9 degrés.
Montebourg à cartonné dans les primaires, presque autant qu'avec son referundum concernant la RN73, il peut arbitrer le match Aubry-Hollande, les journalistes ont du grain à moudre pour la semaine à venir, c'est super. Allez, j'éteinds la radio, j'en ai déjà marre, il est temps de sortir Kurt Cobain de son boitier et de le laisser gueuler un peu.

J'ai RDV à 9h, j'arrive à 9h45. C'est volontaire, j'assume : la dernière fois j'étais en stress et pile à l'heure, on m'en a fait attendre 2 de plus. Aujourd'hui donc il était hors de question de s'inquièter plus que ça, rien à foutre. On me décharge de suite. Ma belle semi n'ayant pas plus de coffres que de bavette, que de publicité, je ne peux reprendre les palettes europes, je renonce en effet à les mettre dans la couchette.

Je recharge dans la foulée, avant midi, et je commence à monter en direction du nord. Nouveau voyage en Suède.

N79

après le linge aux fenètres, le linge aux portières

"Bitte ein Bit!" - "S'il vous plait une Bit!"

Mardi 11

J'ai bien entendu atterri sur la statin Esso, dans la ZI potaschbierg, au Luxembourg. Je dors ici tous les trois jours. J'ai ma place réservée. Je tape la bise aux caissières. J'ai la clé de la station. On m'appelle "Ray".

Un nuage de lait dans le café avant d'affronter d'autres nuages, gorgés d'eau eux, cette journée s'annonce splendide. Je pourrais presque faire un copier-coller de mon carnet de bord de mercredi dernier : il se passe exactement la même chose et cela me désespère. A une variante près toutefois : aujourd'hui le service public est en grève donc France Inter nous propose un super programe musical que l'on peut écouter en passant l'aspirateur ou en discutant au téléphone. Et oui, on a le droit à cela une quinzaine de jours par ans sur radio-France, certaines corporations sont très réactives... heureusement que pour nous les routiers tout va bien sinon les routes seraient souvent bloquées! J'ai écrit une bétise?

Je décide de passer par Hannovre, c'est une fois de plus très pénible dans les dévers de l'A2. Vive l'état d'esprit général : c'est à celui qui baisera l'autre, pas de pitié, pas d'intelligence, pas de solidarité, pas de cerveaux, c'est affligeant et cela justifie en partie mon paragraphe precédent. Prenons un exemple pour illustrer ce qu'il se passe concrètement : Nous arrivons près d'une zone de travaux. L'autoroute passe de 3 voies à 2 voies serrées sur la gauche. Un bouchon se crée. Le premier panneau avec une flèche à gauche est à 800m des travaux, la plupart des usagers se rabattent dès ce panneau et laissent donc la voie de doite libre sur 800 mètres... Que fait l'enfoiré moyen? il remonte toute la file à 90 km'h pour pointer son museau tout au bout. Ma stratégie est la suivante : je reste à droite moi aussi, jusqu'au bout, sauf que je ne double personne, uniquement pour bloquer les exités de derrière. Ce n'est pas forcément évident à raconter mais certaine situation foutent la rage. Mais où est donc passée la solidarité? pas sur l'A2 en tous cas...

Je passe Hambourg sans trop de problème et me pose une heure sur une Aral juste avant Lübeck. Je mange, je lis le journal et je repars en direction du port, volontairement pas trop tôt pour laisser les "mauvaises places" du bateau aux non-initiés. Bon sang, ça y est, je suis un vieux de la vielle.

automne en Allemagne

naissance d'une base logistique

paré pour la charge

dans les rangées de Travemünde

Mercredi 12

J'ai dû me coucher vers minuit, je ne sais pas, je n'ai pas regardé. Là il doit être environ une heure, je sais pas, je ne peux pas regarder. Je ne dors pas. J'aimerais bien, mais je ne dors pas. Le bateau bouge, les murs grincent, les draps sont raides, l'aération est bruyante et puis surtout mon voisin ne dort pas lui non-plus : il se retourne dans son lit sans arrêt et comme ils ont l'air d'être reliés, mon propre lit répercute chacun des mouvements. Je finis néanmoins par fermer l'oeil pour quelques heures.

6h20, je me lève, je saute sous la douche. Un quart d'heure plus tard je tends le museau dehors avec mon café pour prendre la température : le vent souffle toujours en rafales et me fait battre en retrait.
Je suis garé dans les derniers (oui, ma stratégie d'hier pour avoir une bonne place n'a pas fonctionné), donc je sors tard, vers 7h40. Et puis rebelote : comme la semaine dernière il y a la "polis" qui nous fait souffler à la sortie du bateau et nous fait surtout perdre du temps. Mais quoi alors? Plus moyen de rouler bourré c'est ça?

Je précise à l'attention des plus idiots de mes lecteurs qu'il s'agit d'une blague. Pas drôle certes mais blague quand-même... un peu comme si j'annonçais que Sweden porte en réalité un autre prénom, où que Phil26 habite dans le 07...

Je vide et je fais 4 ramasses dans le grand Helsingborg, une région que je vais finir par mieux connaitre que le grand Pont de Vaux. Je suis appliqué, je suis concentré, ça ne chaume pas, ça ne chaume jamais : je remplis ma semie en à peine 2 heures, et comme je suis décidément très motivé, je boucle mon chargement pour la France en début d'après midi. Pas mangé, pas même bu un café, je repars déjà en sens invers car je suis obligé de redescendre via le Danemark faute de place sur le bateau de Malmö... Il suffisait de réserver avant, mais bon... ça a l'air d'être une surprise qu'il faille me faire redescendre en France...

La journée est globalement belle, j'ai de la chance, seul le vent de plus en plus violent finit par être fatiguant. Sur le bac entre Helsingborg et Helsingor ça bouge pas mal, et je suis le seul crétin à monter prendre l'air de plein fouet à l'étage. ça requinque! ça décoiffe aussi. Je retourne en cabine avant d'avoir définitivement la nausée, quoique je ne prends pas trop de risque : je n'ai rien dans le ventre.
Me voici au Danemark, il ne me reste que trois heures de volant au compteur et je dois surveiller l'amplitude. Cet itinéraire n'est pas pour m'arranger du tout mais le programme reste faisable bien que légèrement tendu : trois livraisons vendredi entre Amiens et Paris, avec l'espoir d'un rechargement derrière.

Je roule jusqu'au port de Rodby, je passerai en Allemagne demain : ici je suis sûr d'avoir une place pour dormir, et puis je découvre qu'il y a un réseau wifi gratuit... cool... je vais pouvoir mater des concerts en streaming sur mon temps de sommeil.

Vers 0h15 je réalise qu'il est déjà 0h15... bordel!... et je suis toujours devant cet écran d'ordinateur! Il me reste moins de 5h à dormir...

c'est une Saab!

c'est un Saab!

bel ensemble

grrrr! je suis le grand méchand cormoran!

terrible !

Jeudi 13

Avec ma réducdion-conducteur le café ne me coûte que 1,78 euros sur le bateau, j'ai vraiment de la chance!

Ce matin je me suis levé à 4h45, j'ai pris mon billet - celui qui m'offre la fameuse réduction-, et j'ai aperçu au loin le flot de véhicules sortant du bateau. J'ai couru - car j'ai eu la bonne idée de me garer tout au bout pour mieux dormir-, j'ai donc couru, comme ça, à froid, j'ai attendu que le tachy affiche 9h00 pile de repos et je me suis rué vers la file numéro 13... trop tard. J'ai fait coucou au bateau, il est parti sans moi et j'ai dû attendre le suivant.

Je suis donc à bord une demi-heure plus tard avec mon café. Nous ne sommes pas très nombreux, il n'y a quasiment aucun bruit. Devant moi un écran me rappelle en boucle que pour seulement 12 euros je peux avoir un steack-frite - ou alors pour 7 euros un sandiwch... J'ai faim, bon sang, ça y est, je suis en train de me faire avoir par cette pub aguicheuse qui clignote et m'appelle alors que j'étais uniquement venu prendre un café à 1 euro 78... je finis par craquer : je me lève, je descends au premier niveau, je monte dans ma cabine et je me fais un sandwich jambon-fromage, avec du vrai jambon et du vrai fromage, mais par contre du faux pain parce que bon...

Il fait encore nuit lorsque je foule de la roue le sol allemand. Je suis en première position à la sortie du bateau : j'ai la route pour moi tout seul et mon petit 89km'h GPS me permet de creuser l'écart avec le peloton... c'est rare.
Le ciel est clair, le jour se lève, la brume recouvre les terres retournées, les chevreuils jouent à cache-cache, et moi je roule en direction de Hambourg, puis lorsque j'ai passé Hambourg je roule en direction de Brême, ensuite ce sera en direction d'Osnabrück.

Je passe la frontière germano-néerlandaise de Bat-Benteim à midi. Je ne rencontre aucun ralentissement : apparemment le Hollandais mange et il a bien raison.
J'arrive à Meer avec seulement 8h30 de volant, c'est parfait. Un peu de Gazole, une douche, pas d'eurovignette pour demain car il ne la vendent pas ici... j'avais oublié. Je tente la Shell de la douane : pas d'appareil non plus. J'ai de la conduite devant moi alors je tente la prochaine Total coté Belge... toujours sans succès! La vignette est obligatoire mais personne ne la vend, j'ai un peu de mal à comprendre?!

Je ne vais pas m'amuser à rouler vers Anvers à cette heure-ci, c'est un coup à finir garé en vrac n'importe où avec 10h30 de conduite. Donc je reste sur la station Total, station dont l'ambiance sur le parking PL n'est pas sans rappeller les bidons-villes de New Dehli.

levé de soleil au nord de l'Allemagne

saison du maïs

à Meer

la route en 2011

Vendredi 14

4h30 ring d'Anvers, à fond sous les lampadaires avec cette agréable sensation que tout est plus facile de nuit, que l'on roule beaucoup plus vite alors que le tachy affiche bien 90 km'h, rien de plus. Et puis on peut écouter de la musique, et ne pas se contenter de l'entendre, on peut se faire plaisir et choisir un CD qui s'écoute, qui ne s'entend pas - qui s'écoute, un CD comme Daydream Nation de Sonic Youth par exemple.

Il me faut 3h30 pour arriver dans la zone Industrielle nord d'Amiens. Je suis en avance, la boite où je livre est fermée, je me pose sur le parking à l'entrée de la zone et me laisse tenter par la chaleur d'un café-crème au bar d'en face.
Au comptoir je profite du courrier picard pour faire genre je m'interresse à ce qu'il se passe dans le coin... alors que bon...
Je retourne au camion, non sans avoir fait un petit crochet par la boulangerie pour un pain au chocolat bien gras (et oui ce matin je claque toutes mes tunes) Encore 20 minutes à attendre. Soudain je me dis qu'il ne serait pas inutile de jeter un oeil sur internet pour ma deuxième livraison, à Saint Denis. C'est une excellente idée mon vieux Ray : je découvre, grace à la magie de Google maps, puis de google earth, et enfin de google street, que mon google client est google merdique à souhait. Il se situe en effet au coeur d'un google boulevard avec beaucoup de google circulation et pas trop de google place pour une google livraison. Je sors mon google téléphone, j'appelle. Une google standardiste m'indique que le google accès doit se faire via une google rue parallèle... Dans quelle galère me serais-je embarqué sans google?

Pour l'heure, car ma coupure est maintenant terminée, je livre à Amiens, une moitié de semie. Cela dure 20 minutes.
Me voici en direction de la capitale, tuner sur 162 am (France Inter en grandes ondes) car nous sommes vendredi entre 9h et 10h, c'est l'émission de Pascale Clark avec les immancables chroniques de Frédéric Pommier et Nicolas Rey : quelques minutes de finesse dans une journée de François Hollande, de Martine AUbry et de pub malakoff mederik.

Je livre donc sur un boulevard merdique de Saint Denis. Grace à ma mémoire infaillible je reconnais les lieux découverts sur internet. J'essaie d'accèder à la fameuse rue parallèle mais je ne peux pas : il y a une voiture garée dans l'entrée qui me gène. Je roule 300m jusqu'à l'autre embouchure, rebelote : à nouveau une voiture dans l'angle. Il faut que je rentre là dedans... je prends large, très large, je vais chercher au maximum vers la gauche en utilisant les 4 voies du boulevard pour me présenter quasiment aligné en face de la rue, ça passe... non... il me manque pas grand chose, je pourrais passer en érafflant la clio mais je tiens à ma semie... malgré l'abscence de coffre, de bavette et de pub... Alors je suis coincé, comme un con, en Warning, à moitié sur le boulevard. Je sors (un peu en colère), et par chance la propriétaire me devance et va bouger sa voiture sans même deigner m'adresser un mot pour le dérangement... ce qui est très sympa.

Je livre 3 palettes et fonce sur Soissons faire le dernier, pas de repas ce midi.
L'objectif est de me mettre en coupure au plus tôt pour recharger ce soir.

Anvers et contre tous

tiens je me baignerais bien dans du café avec une crète de petites cuillers et des tasses accrochées aux oreilles...

Pognonland depuis l'A15

misèreland depuis ma fenêtre

Samedi 15

J'ai réussi à dormir au moins une demie heure. Je charge de nuit sur cette immense plateforme où le Polonais se confond avec le Slovaque, où le Bulgare roule Belge et le Roumain roule Espagnol; et puis il y a moi au milieu, seul Français dans un camion français, c'est une chance, j'aurais pû être Hongrois.

La "salle d'attente" m'est insupportable, je retourne au camion, ils viendront bien me chercher - je ne suis pas pressé.

Lorsque je peux enfin me mettre au quai numéro 9, un type en jogging, en t-shirt, avec les cheveux mal coupés et mal coiffés s'approche de mon camion. Il est en panne de batterie. Vu comme il est garé le plus simple serait de le dépanner avec un tracteur en solo, d'autant plus qu'il y en a plusieur : ceux aux couleurs de la plateforme, aux couleur d'un grand prestataire national. Alors je pars à la recherche de quelqu'un pour aider mon collègue en jogging... en vain. Tu peux toujours chercher mon vieux Ray, tout le monde renvoie l'éventualité de prendre une quelconque initiative sur son collègue...
J'abandonne : je dis au joggeur d'attendre la fin de mon chargement, puis je m'approche au maximum en cassant pour présenter le bon coté du camion, celui où se situent les batteries, et nous parvenons à brancher sur le FH. Le voici rassuré, moi un peu moins consterné : ce type est Roumain, roule pour un Espagnol, démarre tout les jours avec les pinces parce que ses batteries ne rechargent plus... cool non?
Je discute un peu avec lui car il parle français, il m'explique que ce n'est plus tenable, qu'il va arrêter, faire autre chose, peut-être venir en France. Va savoir, il peut se faire embaucher...

Je m'approche du bureau pour signer les documents et cette fois ci c'est un Ukrainien qui me demande de l'aide car il ne pige rien à ses papiers... et la je dis stop : il y en a marre, on marche sur la tête! Bien entendu j'aide ce type, car je suis tout comme lui un être humain qui peut avoir besoin d'aide. Mais il y en a marre quand même...

Nous sommes le 15 octobre, cela fait 29 ans que je respire des gaz d'échappement, pour fêter ça je m'offre un road trip nocturne.

mon Roumain-Espagnol et ses galères de batteries

joyeux anniversaire mon vieux, tiens, une tresse au chocolat chimique!... à non, elle est coincée.

Dimanche 16

Lundi 17

29 bougies plus tard, la panse encore rebondie par les excès de crème de marron, je suis sur la route de Bourg en Bresse car il parait qu'un voyage pour Modena m'attend. Un voyage avec des jambons, un voyage "typique" Asotrans, juste pour justifier que je ne choisis pas complètement mon boulot, que je ne suis pas complètement un privilégier et qu'il m'arrive parfois, c'est à peine croyable, de faire le même travail pénible que les autres. Bien entendu dès ce vendredi je vais pleurer au bureau.
Donc complet pour Modena. J'attèle la 5688, j'en fais le tour et je m'en vais sur la route du Mont Blanc. Le ciel est dégagé, l'air est frais, ce serait définitivement très agréable s'il n'y avait pas ce bruit de "truc qui grince" dans mon tableau de bord, vers l'autoradio. Un bruit pas très fort, pas toujours présent, mais insupportable dès qu'il recommence pour je ne sais quelle raison. Et là en l'occurence il est bien audible, il est bien insupportable, il ne s'arrète plus. J'essaie diverses techniques, de la plus brutale à la plus inutile en passant par la plus débile, mais rien y fait : le bruit insupportable résiste au gros coup de poing, résiste au calage avec des bouts de papier et surmonte le son de l'autoradio... plus psychologiquement que concrètement certes, mais si je sais qu'il existe encore je ne peux pas écouter mon CD tranquille. Je ne suis qu'un gros malade mental, complètement soumis à ce truc qui grince.

Durant la période d'attente au pied du Mont Blanc j'étudie cette partie de tableau bord d'où vient le grincement, pour trouver la solution. Puis le téléphone sonne et j'oublie.
Je passe coté Italien, je descends et roule jusqu'à Viverone... et soudain je réalise que c'est terminé, que cela fait un moment et que je ne m'en étais pas rendu compte. Je mobilise toute mon imagination pour penser à autre chose avant de rentendre ce bruit insupportable.

Je roule jusqu'à destination, je ne me gare pas devant chez mon client pour ne pas me faire réveiller : demain avant de vider je dois aller peser à la balance publique.

séquence émotion...

une campagne de communication pour justifier que nous ne sommes pas que des emmerdeurs

beau temps au Mont Blanc

Mardi 18

Toc toc toc!!!... bordel, qui est-ce qui tape!?! je ne suis ni devant chez mon client ni sur un parking à prostituées!? J'entre-ouvre le rideau. Sous ma fenètre un type en blouse blanche me demande ce que j'ai dans la semie. "C'est quoi ton problème?!" lui fais-je comprendre d'un ton aussi peu réveillé que courtois. Il me demande mes papiers, ce que je viens vider. Je comprends qu'il s'agit d'un ouvrier de l'usine au coin de la zone, usine dans laquelle je n'ai rien à décharger mais en voyant le camion le type est venu spontanéement me réveiller, avant de spontanément repartir sans même montrer le moindre signe de compassion. J'étais pourtant garé sur un parking public...

Ma coupure n'est pas encore terminée qu'on s'inquiète déjà de savoir où je suis... hé ho! je ne peux pas allez plus vite que la musique, il fallait me faire partir plus tôt.
Je vais peser à Vignola, rituel ancestral pour le vieux type qui habite en face et qui sort éditer un ticket dès qu'un nouveaux voyage de viande transite par sa bascule. Puis je vais chez mon client. L'accueil est peu chaleureux : on m'attendait à 6h, il est 10h30. Et oui, mais je serais venu à 6h si j'étais au courant mon ami.
Je me mets à quai sans trainer et à contre main, entre les cabines, guidé par deux chauffeurs italiens très sympas. Le déchargement dure une grosse heure. Un chauffeur breton arrive et tape la discute en attendant de prendre ma place. Alors qu'il m'interroge sur mes voyages en Suède dont il a lui aussi entendu parler dans un resto routier, (je ne veux pas imaginer de quelle façon mais le fait est que je ressents dans ses propos comme une suspicion d'être un privilégier à mon encontre), alors qu'il me parle donc, son regard s'arrête sur "fierdetreroutier" au bas de mon carénage... il me demande : "c'est quoi ça? c'est toi qu'a mis ça? ha non hun! pas fier d'être routier! à l'époque oui mais plus maintenant... ha mais t'as pas connu toi la belle époque, c'est pour ça..."

Et oui, je suis un perdreau de l'année et toi tu n'es qu'un vieux de la vieille engoncé dans son fatalisme larmoyant. Ouf, on a fini de me vider, le perdreau se casse et "non il n'ira pas manger au resto du coin..."

C'est incroyable mais les ouvriers qui ont déchargé on rangé les crochets, les tiges et les ficelles : je n'ai plus qu'à trouver un lavage. Il est 12h15, ce n'est pas chose facile, tout est fermé. Comme je recharge à Mantova et que je n'en connais pas d'autre sur la route, je roule jusqu'à la vela et j'attends 14h.

17h15, j'ai rechargé et je commence à revenir sur Bourg. Alors que je l'avais presque oublié il est de retour dès les premiers tours de roue : le bruit de grincement insupportable. ça grince, ça m'irrite durant plus de 2h et je décide d'anticiper ma coupure avant de définitivement péter un plomb : Sur l'aire de Brianza je sors la caisse à outils et je démonte mon autoradio. Je ne trouve rien, je tords des trucs, j'essaie de faire grincer pour voir... puis comme ma coupure est fini je remonte tout et je repars. Victoire : plus un bruit! par contre je n'ai pas mangé...

Le Mont Blanc est en alternance : une heure d'attente à Aoste. Je tente la douane à Cluses mais le parking affiche complet. J'échoue finalement sur l'aire de Bonneville, à terme d'amplitude.

lavage à La Vela

le style italien

ruine dans la campagne

bloqué à la régul' d'Aoste

Mercredi 19

Dans la cour de l'usine qui jouxte ma place de parking il y a un chien, un boxer, de type plutôt musclé qu'on a pas envie de contrarier. Manifestement il a décidé d'écourter ma grasse matinée : il jappe et il traine sans relache un jerrican dans les cailloux - car oui il ne joue pas avec une "baballe" mais avec un jerrican... et donc me voici réveillé à cause de lui, mais loin de moi l'idée de le contrarier : il est plus balèze que moi.

Je vais prendre ma douche. 2 euros. correcte si l'on est pas effrayé pas le tartre.
Un thé pour 1,20 euros supplémentaire et me voici de retour dans la cabine pour regarder médor trainer son bidon et japper lorsque cela lui chante. Et cela lui chante souvent.

Je coupe 11h, je peux me le permettre d'après mon chef. Un rapide détour sur le net pour voir que oui, ça sent la fin pour Sonic Youth, on en parle même sur le site du "nouvel Obs" - la référence de la culture underground. Et merde. Tout fout le camp.
Cette triste nouvelle est d'autant plus triste avec ce temps pourri et froid qui me sert de décors. Je pars sous des trombes d'eau. Je mets donc les feux de croisement et cela brouille ma réception des grandes ondes... je vais le jeter par la fenètre ce poste! Passer des semaines entières dans un camion qui ne capte rien... j'en viens à regretter les magnum 1ere génération de chez Inter Légumes : je pouvais au moins y écouter France Inter.

Je suis à 14h au dépôt. Je reste tout juste 15 minutes le temps de faire l'appoint en carburant et de sortir quelques palettes. Je garde mon "Paris", comme j'ai le temps je décide de monter par la nationale.

Le ciel devient de plus en plus radieux à mesure que je progresse sur la nationale 6 Morvandelle. Une pause parmi mes amies les vaches me permet d'observer leur vie en société qui s'apparente à celle de l'Homo Sapiens dans un Sofitel New Yorkais (voir figure 1). Je roule tranquille, détendu, léger, serein jusqu'à Sens où je reprends l'autoroute pour assurer le coup et arriver à destination en moins de 9h - je vide ce soir au Nord de la capitale.

J'ai rendez-vous à 23h, j'arrive à 22h45. professionnel. Le réceptionnaire met mon CMR de coté - "livraison 1h du mat'"... super.

Bon... ils n'auront qu'à venir me chercher quand ils veulent : je suis là, devant eux, en train de lire des chroniques de Vialatte en mangeant du chocolat parce que j'ai un peu faim.

Jean-Bertrand ne part jamais en vacances sans son hélico

froid et trempé à Nantua

un Ken

"laisse toi faire couquine!"

Jeudi 20

J'ai eu le temps de lire bon nombre de chroniques. Un cariste, très sympa, est venu se montrer sous ma fenêtre... on avait l'impression qu'il n'osait pas taper, qu'il ne savait pas comment demander mon attention. Sans doute un petit nouveau... dans quelques jours il ira réveiller du routier à grand coup de mimine dans la portière au beau milieu de la nuit...
Mais pour l'instant il était très sympa. Poli. Gentil. Je suis retourné au camion un peu moins blasé, je me suis garé au fond de la cour, j'ai tiré les rideaux et j'ai essayé de dormir avec mon frigo qui ne deignait pas s'éteindre, même en cycles.

9h plus tard, au petit matin, il fait un froid de canard sur le parking de la base logistique où quelques échoués de la veille dorment encore, les frigos hurlants pour ceux à qui il reste des livraisons - les portes de la semi ouvertes pour les autres. Je me paie un thé avant de partir, en ce moment je carbure au thé.

Mon second client se trouve à La Courneuve, le genre de ville où l'on aime peu se ballader en camion. Mon destinataire est au beau milieu d'une zone bien pourrie avec des hauts-trottoirs, des bordures, des bites en ferraille et des obstacles en tous genres un peu partout. Je ne m'attendais pas à autre chose. Devant l'entrée il y a chantier : on installe apparemment des nouvelles bordures en bétons encores plus hautes et encores plus résistantes... idéales pour plier du pare-choc ou accrocher du coffre à palette! Il passe un nombre considérable de camions ici mais prière leur recquise de se contenter de passer.
Encore une base, avec pleins de chauffeurs en gilets fluos, avec des mecs pas trop sympas derrière les hublots, et tout un protocole organisationnel digne des réceptions de l'embassadeurs.

Je me casse de là pour recharger à Nanterre. Les quais sont vacants à mon arrivée, on m'indique le 8, mais on refuse de me charger de suite car l'intérieur de la semie est encore gelé... le frigo, même réglé à 30, n'ayant pas eu le temps de faire fondre la glace depuis La Courneuve. Donc je referme les portes et j'attends. Midi arrive, je remets le camion à quai, un chauffeur arrivé entre temps m'invite à l'accompagner à la cantine de l'entrerprise car "on y mange bien, et pour pas cher!". Ok, je l'accompagne. Effectivement : on y mange bien, et pour à peine 5 euros... rien à dire.
Après cet élan de sociabilité je peux lever le camp, il est 13h, on a chargé ma commande, c'est parfait.

Cap sur Paris-Est pour une seconde ramasse, avant 16h. Puis me voici en route pour Bourg en Bresse, via autoroute cette fois-ci, livraison foulée.

Lorsque je m'arrète manger ma salade d'endive sur l'aire de la forêt, au sommet du Bessay, il fait 3 degrés. Et lorsque j'échoue dans la cour et que je décide de dormir au camion faute de connaitre mon programme je suis obligé de faire chauffer le webasto.

St Denis

base de supermarché

mon livre de chevet

Vendredi 21

Réveil à 8h, douche, café. Rien de spécial à faire aujourd'hui si ce n'est l'entretien du camion. Gros lavage donc, malgré les 3 degrés, puis vidange chez Volvo d'où je reviendrais finalement avec une voiture de prêt car il y a de l'attente.
Je suis en week end.

à la douche!

Samedi 22
Dimanche 23

Lundi 24

Retour de vidange.

Pourquoi toujours ces 15 kilos de graisse sur la sellette? Dès le premier attelage on en retrouve à peu près 10 kilos sur le chassis... on en retrouve aussi par terre, sur les tuyaux de gazole, sur les gants, les chaussures, partout. Une chose est sûr, aujourd'hui ça coulisse bien sous la Lamberêt, la belle "601" de prêt, chargée pour le Pas de Calais et le Nord.

Manifestement on a aussi "tenté" de résoudre le problème concernant l'autoradio. "Tenté" car cela ne marche pas beaucoup mieux : je capte les stations mais toujours pas d'option RDS... à noël peut-être.
Ma souflette a bien été réparée elle... fini le courant d'air permanent derriére la tête qui me donnait ce petit air de chanteur de variété sur un plateau de Michel Drucker.

Je décolle donc dans la soirée avec un camion tout neuf et après avoir passé une bonne partie de la journée au dépôt. Au bout de seulement 5 minutes de route j'ai déjà tout redémonté l'autoradio tellement le fameux bruit insupportable de grincement me met hors de moi par son simple retour. Je me calme un peu et je roule en direction de Paris, jusqu'à l'aire d'Avallon où je case un premier quart d'heure de repos sur le parking caravane vide.
Je continue et je prévois de faire la demi-heure complémentaire sur l'aire de Nemours. C'est complet. Pire : c'est harchi-complet, il est simplement difficile de traverser le parking pour atteindre la sortie, aucun moyen de se poser là, même en vrac. Je fais une croix sur mon café et me gare en dernier recours au péage de la sortie suivante, devant la gendarmerie, à même la route. j'attends sagement que l'on vienne me pruner...

Même pas. je repars, il est plus de minuit. Je traverse la capitale via son boulevard périphérique et attrappe l'A16 pour deux bonnes heures d'ennui profond rythmé par les grincements inssuportables de mon tableau de bord. Je roule jusqu'à 5h, même si cette A16 à de grandes vertues soporiphiques je reste lucide et même très en forme jusqu'à destination. Sans vraiment savoir pourquoi : je n'ai même pas une goûte de café dans le ventre.

je devais la mettre dans mon carnet de bord!

quel bonheur de dormir dans des nouveaux draps

j'ai coupé ici, comme ça

Mardi 25

J'ai dormi sur une sorte de bout de bitûme désafecté de la ZI de Berk. Un endroit de rêve où j'ai dû me garer "cassé" par manque de place, mais cela n'est pas si mal finalement : j'entends bien moins le frigo.

Comme il est bientôt midi je me tate : petit déjeuner ou déjeuner tout cour? pain au lait ou pain de mie? chocolat où paté? gras ou gras? Il fait beau, je suis à deux pas d'une zone commerciale, je décide d'aller me ballader un peu et de laisser venir l'inspiration. Après seulement quelques centaines de mètres sous l'étonnant soleil de Berk je rencontre un troupeau de poneys : je suis sous le charme. Puis ma route m'amène devant un incipide supermarché Carrefour et sa zone pleine d'endroits pour bouffer. J'ai le choix : la brasserie de Carrouf? les rayons de Carrouf pour acheter un bout de truc à manger? le McDo? ou la friterie là bas au bord de la route? Allez... je suis dans le Pas de Calais, va pour la friterie, histoire de respecter les valeurs locales.
Quelques instants plus tard, pas beaucoup plus réveillé, je me retrouve avec un "americain-cheese" dans les mains : une demi-flute avec deux steacks, du fromage fondu et des frites rutilantes de gras par dessus... une ode à la crise de foie pour 7 euros 20, c'est cher...

Je retourne au camion, repasse devant les poneys. Quelle vie simple que celle des poneys?! broutter de l'herbe pour même pas 7 euros 20, se gratter la croupe contre un tronc d'arbre, rebroutter de l'herbe, hénir sans raison pour faire croire qu'on est un cheval, ne pas se soucier de faire 9h où bien 11h de coupure... c'est fantastique.

13h40, ma nuit est terminée et je roule les 500 mètres qui me séparent de mon client. Il y a un Espagnol à quai, du moins un camion Espagnol avec un chauffeur de l'Est, je dois attendre.
Mon tour arrive et le cariste expérimente son nouveau fenwick sous mes yeux inquiets. Il n'a pas vraiment le coup de main... mais il y met de la bonne volonté, et puis il est très sympa, je prends mon mal en patience.

Mon deuxième client se trouve non loin de Saint Omer. Je prévois initialement d'y être à 16h30... mais malgré qu'il s'agisse d'une énorme usine, celle-ci s'avère être bien cachée au millieu de nulle part, avec une signalisation inexistante en amont. Je tourne en rond, et comme c'est la sortie des bureaux je perds du temps. Une demie heure précisément, le temps de localiser l'adresse sur internet.

Je vide in extremis, et pars me mettre en place dans une grande base logistique de la banlieue d'Arras. Le gardien se montre tout désolé de me virer de son grand parking : "c'est la consigne, je n'y peux rien"... il m'indique le centre routier, mais cela ne me tente que très peu, du coup je respecte la consigne et campe devant le portail de la base.

un gros Poney

le genre de quai où il faut viser droit

sur les routes du Nord

Mercredi 26

Le soleil tarde à se lever, on se demande même s'il va se lever. Il est 8h00, nous sommes 3 chauffeurs dont Une chauffeur à se lancer dans des prévisions météorologiques en se payant tour à tour des cafés. Je viens de charger un premier lot à l'endroit où j'ai passé la nuit, et maintenant je complète ici, à quelques centaines de mètres. La cour est envahie de camions, on peine à manoeuvrer, et il en arrive encore. Comme à la récré des petits groupes de discussion se sont formés en attendant que la réception ouvre, je me retrouve donc avec mes deux potes de circonstance pour une attente pas trop désagréable.
Un chauffeur Belge passe devant tout le monde, bourru, irrespectueux... personne ne moufte, moi y-compris, un peu décontenancé devant cette scène surprenante et un peu une tafiole quand même, il faut bien le dire.

A 9h pétante je suis au quai 4, c'était l'heure de rendez-vous. J'assiste au chargement pour m'assurer du moindre détail compte tenu que je ne vais pas livrer cette semi. Sans blouson (oublié à la maison), en pull, je peaufine ma crève du week-end.

10h c'est fini, je fouette les 540 poneys et décolle direction Bourg après avoir déscendu un ultime "café macchiato"... un café prononcé "café massito" par un des chauffeurs qui s'est servi avant moi... ça m'a fait rire... je suis joueur.

Quelle belle journée! Même dans le Pas de Calais! C'en est fini de cette nuit à rallonge et le soleil est bien là, il tape fort sur les champs de betteraves qui constituent l'essentiel du paysage. On s'y active, on y arrache les racines pour les entasser à l'entrée et former ces espèces de tas de cailloux - uniques reliefs à des kilomètres à la ronde.
Voici une journée de conduite particulièrement agréable (avec toujours biensûr ce petit bruit de grincement vers l'autoradio). Je descends par Reims, puis Saint Dizier histoire d'économiser un peu l'autoroute. Entre Saint-Dizier et Chaumont la palette de couleurs automnales est magnifique: des arbres verts, jaunes, oranges, rouges... et plus de tas de betteraves! On a envie d'aller courrir dans les bois déguisé en chevreuil, mais malheureusemnt c'est la chasse.

Une pause à chaumont et je roule jusqu'au dépôt où Thomas se démène pour gérer la maison Asotrans. J'attelle une penderie vide et je pars me mettre en place pour charger demain.

pays de la betterave

bah bon Dieu !

pause à Chaumont

Jeudi 27

On me cherche; j'arrive, je me mets au quai 8.

Je charge un complet de pendu, ou plutôt ON me charge un complet de pendu : j'ai 2h, voire 3h, voire même 4h de temps libre devant moi. Je commence par le plus important : régler une bonne fois pour toute le problème de l'autoradio, parce que bon... il s'agirait de ne pas le jeter par la fenètre. A l'aide d'une fourchette je démonte tout : le poste mais aussi l'espèce de vide-poche en caoutchouc, je les renforce avec des cales en ruban adhésif, puis je les remets. Quelques tests pour voir si ça grince... apparemment non.
Etape suivante : le carnet de bord. trois jours de retard à rattraper pour continuer dans mon élan de ponctualité hebdomadaire; depuis que Phil m'a fait des menaces de mort j'ai peur.
Etape suivante : la cantoche. Il y a moyen de manger pour pas grand-chose alors j'en profite. Manque de bol j'ai le choix aujourd'hui entre "langue de boeuf" ou "boeuf braisé"... les deux m'inspirant moyennement. Je suis dans un abattoir de boeuf : le poisson pané se fait rare.

Je suis sensé partir vers 14h... 14h30 dernier cara. A 14h15 le responsable du chargement vient m'annoncer qu'il y a du retard : "15h, si tout va bien", c'est à dire 15h30 selon mon pronostic...

Je pars effectivement à 15h30. Je maitrise parfaitement le langage des expédétions, j'ai fait "cariste moderne" en deuxième langue au collège.

Encore une très belle journée. Je traverse la Bresse bourguignone comme une balle jusqu'à ce Cayon qui m'impose sa vitesse de croisière déprimante de Louhans à Châlon. Ensuite : tout shuss sur l'autoroute. Je m'arrète à la sortie Pithiviers avec 4h28 de guidon, j'ai poussé au maximum pour ne faire qu'une seule pause.
Il y a un "point carburant" à la sortie Pithiviers, avec même une machine à café très utile pour accompagner mon bout de cake.
J'écoute des analyses footballistiques débiles concernant des matchs de coupe de la ligue dont on a rien à foutre : voici tout ce que m'offre la bande FM.

45 minutes tout rond et je repars direction la Normandie, car oui, je monte dans le 61 - livraison foulée.
La suite du parcours est tendue, sur la nationale avec mes bouts de viandes, encore plus stressante avec cette déviation qui m'impose de passer par Dreux.
Il me faut 4h24 pour arriver à destination, la route de nuit ayant bien participé à ce coup de bol.
Je décharge puis je lave, il est je-ne-sais-pas-quelle-heure-du-matin, je vais me coucher.

gros bestiaux

Cote d'or

les viandards nocturnes

Vendredi 28

Les routes grasses teintent progressivement les carénages du camion en beige, puis en marron; le brouillard cache un peu le paysage; je roule en direction de Mayenne. Je ne connais que très peu ce coin de la France, j'ai noté mon itinéraire sur un post-it car je ne fais aucunement confiance au GPS capable de me faire passer par les chemins de terre pour gagner 200 mètres.

Des champs, des forêts, des vaches. Des terres retournées qui fument, des arbres roux, des Normandes qui broutent l'herbe humide.

Arrivé à proximité de l'abattoir où je recharge, je suis docilement les panneaux "complexe de la viande", il y en a depuis plusieurs rond-points en amont. Et puis soudain je me retrouve dans celui-ci sans le précieux panneau. Cela fait un moment que je vais tout droit, ma logique de routier-moyen m'incite à continuer, mais il y a apparemment un pont à 4m tout droit... dans 100m? dans 1km? dans 10 km? aucune idée. Je vais tout droit. Et voici le pont à 4m juste derrière le premier virage... je passe peut-être dessous, on ne sais jamais vraiment combien on mesure suivant les semis, et puis les panneaux sont toujours eux-aussi approximatifs, mais dans le doute je préfère me taper la marche arrière et le demi-tour possible sur un parking à droite.

Il fallait prendre à gauche au rond-point, on retrouve ensuite les panneaux "complexe de la viande".

Entre la bascule, le parking, le quai-emballages, le quai-chargement, je tourne une bonne vingtaine de minutes dans ce fameux complexe de la viande. Ici la plupart des camions sont bougés par les ouvriers de l'abattoir qui se chargent des les préparer pour les remettre "clés en main". Ainsi j'ai des frissons en voyant des mecs monter avec les blouses pleines de sang, et parfois même les gants... mais bon cela ne me concerne pas.
Non, moi je me contente d'engueuler celui qui vient me prévenir de me mettre à quai en ouvrant direct ma portière alors que j'étais appuyé contre... le genre de détail qui m'horripile.

12h50, Le "jeu des 1000 euros" se déroule à Sainte Suzanne, je suis à 6 km de Sainte Suzanne, c'est dingue.

Complet de bidoche, je décolle en début d'après midi.
J'ai tout juste les heures pour arriver à Pont de vaux alors je ne vais pas plus loin. A 23h30 je suis en week end.

Domfront

routes grasses

un "Del Gaudio"

Sainte Suzanne

Samedi 29
Dimanche 30

Lundi 31

Pour garer un camion à Pont de Vaux, il y a eu pendant longtemps l'embarras du choix : le grand parking près de la Reyssouze, celui le long de la route de Fleurville, la rue de la gendarmerie, la place Poisat...etc Je ne parle pas de 50 ans en arrière, non, de même pas 10 ans. Depuis les choses ont bien changé : on a refait le parking près de la Reyssouze - sans oublier d'y mettre des barres de gabari, on a transformé les stationnements PL de la route de Fleurville en stationnement pour transports de voyageurs, on a interdit la rue de la gendarmerie aux plus de 3t5 et il est on s'est mis à verbaliser pour "pollution visuelle" losqu'on passe le week end sur la place Poisat. Heureusement la mairie à pensé à nous, les habitants de sa ville qui conduisent des camions : une magnifique parcelle en terre battue, non-éclairée, loin de la route, loin de tout, à l'entrée-Ouest de la ville. Ce week end j'ai donc décroché la remorque la dessus faute de mieux. Ce matin mon frigo est éteint et mon reservoir à fuel siphonné. A oui, j'oubliais, on a aussi délocalisé la gendarmerie : pour porter plainte et perdre son temps devant un type qui a d'autres affaires "bien plus importantes" à traiter il faut désormais faire plus de 20 Km...
Amis voleurs de toutes espèces, Pont de Vaux vous accueille et met à votre disposition ses plus beaux camions pour des pillages nocturnes en toute tranquillité.

Hier soir j'ai fait ma ronde et tout était encore normal. Ce matin il est 3h30 lorsque je reviens avec le tracteur et constate les dégâts. (J'ai quand-même eu la bonne idée de décrocher, ce qui m'a peut-être permis de sauver 500l de gazole.)
L'effraction a dû se faire il y a très peu de temps : le frigo est encore à température, il a juste désamorcé. J'ai 20 tonnes de viande, 4 clients, le premier est à seulement une demi-heure il n'y a plus une seconde à perdre : je fonce.
Sur ma route un SuperU avec pompe PL et service 24h/24. J'y vais. La pompe PL n'est accessible qu'en marche arrière avec un PL "normal" comme le mien... et surprise dessus on peu lire "paiement caisse", les autres pompes étant inaccessibles.
Sur ma route un Intermarché avec carburant 24h/24 mais portique à 4m de hauteur... j'essaie, j'approche le cul de la semi, impossible, je ne passe pas dessous, il est plus près de 3m80 que de 4m car le sol est pente.
Je commence à stresser, je cherche une solution. Je trouve.

J'ai un bidon de 25 litres pour me laver les mains, je décide de le sacrifier, je le remplis de 15 litres de gazole. Problème : il est techniquement impossible de l'incliner sous le plancher de la semi pour verser le contenu dans le réservoir : il faut un entonnoir, je n'en ai pas.
Petit j'ai beaucoup regardé Mc Gyver : je coupe le cul de trois bouteilles de chrystaline que j'emmanche les unes dans les autres pour me faire un triple-entonnoir. Pas con le Ray?! Seulement, il reste encore un souci : lorsque je verse le liquide cela fait pencher l'entonnoir vers le bas, alors le gazole arrose mes pieds et mon jean, ce qui me plait que très moyennement. A ce moment là intervient mon sauveur : une petite dame qui passe faire son plein comme ça, au milieu de la nuit. je lui demande si elle peu simplement tenir l'entonnoir de fortune avec mes gants, elle accepte sans hésiter. Alors nous parvenons à verser une bonne dizaine de litres dans mon réservoir, plus quelques-uns par-terre quand même. Cette dame est très gentille, la pauvre va puer le gazole toute la journée...

J'ouvre le capot-moteur du frigo, je pompe, impossible de ré-amorcer. Maintenant il faut agir vite. J'abandonne l'idée du dépannage, cela prendrait trop de temps, je pars faire mes livraisons, le frigo étant toujours à température.
J'expédie la première à l'ouverture de l'entreprise, puis je fonce dans la Bresse endormie pour faire la suivante. Une fois de plus je suis le premier, la température est bonne, j'enchaine avec un troisième client situé à 5 minutes, température OK selon le thermomètre. Il faut dire que d'une part il ne fait pas chaud dehors, et d'autre part la viande cela ne refroidit pas comme ça...

J'ai une dernière livraison à Lyon mais je ne peux y aller sans ré-amorcer. En passant devant chez Inter-Légumes j'ai la bonne idée de m'y arrèter. Une boite qui fait rouler autant de frigo a forcément un mécano capable de ré-amorcer le mien!? Bingo. Je me fais dépanner gratuitement : il fallait bien pomper, mais beaucoup plus longtemps que je ne l'ai fait, il fallait simplement insister... note pour plus tard Ray.

Tout re-fonctionne de plus bel, c'est parti pour Lyon, je livre en fin de matinée.
Ensuite je retourne au dépôt, je pars manger avec Thomas et Michel, la zone Cénord est déserte, on a l'impression d'être les trois seuls clampins à bosser.
Je passe l'après midi à bouger des camions dans la cour, puis je rentre chez moi, à Lons le Saunier, je suis devenu Jurassien ce week end.

le triple entonnoir maison

des quais merdiques

automne dans l'Ain

inside the 4L

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