Mon Carnet de bord... Suivez mes aventures, semaine après semaine!

Janvier 2012

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Dimanche 1

 

Lundi 2

2012. Fin du monde pour une partie des ses habitants, crise pour les autres. On arrête de faire tourner les serviettes , on se remet au boulot, on remonte dans le camion et on va charger à Châlon sur Saône. "Crise", "crise", "crise"... "présidentielles", "présidentielles", "présidentielles"... c'est bon, le ton est donné pour cette nouvelle année. Vivement les Jeux Olympiques qu'on ramène une médaille de bronze au tir au pistolet à 30 mètres pour entendre parler d'autre chose dans l'actualité. Vivement le 22 décembre aussi, qu'on sorte de sous la table du salon avec une casserole sur la tête en lâchant un grand soupir de soulagement. L'année s'annonce riche en évènements. Mais pour l'heure, je vais charger à Châlon sur Saône.

Il fait toujours un temps exécrable. QUasiment le même qu'en 2011. Le Magnum grince de toutes parts sur les petites routes de campagne qui traversent cette Bresse spongieuse avec toute cette eau qui tombe du ciel depuis la semaine dernière.

Je suis à Chalon à 12h30. Je charge des jouets. Une semaine après noël ça parait étrange... mais l'expéditeur m'explique que pour lui Noël est l'une des périodes les plus calme de l'année : "ici on ne fait que du jouet de merde, que des trucs à moins de 2 euros fabriqués en Chine, pas de le genre de jouets que l'on s'offre à Noël, mais plutôt les cadeaux pour tombolas ou fêtes foraines..." me dit-il avec l'oeil qui brille, pas peu fier de son business. Certes...

Je repars donc avec mes palettes de trucs tous pourris pour tombolats bidons, direction la banlieue Lyonnaise.
Je vide en foulée dans une sorte de caverne d'Ali Baba du pauvre, un endroit qui pourrait faire chialer un gamin tellement les jouets sont nuls et moches. Ensuite je me pose sur un bout de parking, j'attends des instructions en rattrapant mon retard carnet de bord. Je parviens à rattraper la semaine complète car les instruction tardent à arriver : la semaine s'annonce une fois de plus calme apparemment?

Je ne recharge que demain du coté de Saint Etienne, je reprends le volant dans la soirée pour aller me mettre en place devant l'entrepôt.

petit potager bio entre 3 autoroutes

pause carnet de bord

un peu de couleur sur la "ZI mi-plaine"

3h ici - 9h plus tard

Mardi 3

malgré le webasto les vitres sont embuées. Il fait 2 degrés, j'enfile mon bonnet, je sors. Il est 7h55 lorsque je me présente aux expéditions du grand bâtiment devant lequel j'ai passé la nuit. On m'indique le quai 15, on charge de suite. Bonne nouvelle. Je bois un thé, ou plutôt un truc qui ressemble à un thé, trop sucré, puis je me mets au quai 15. Le cariste est rapide, précis, et même sympathique. Tout va pour le mieux et je pars d'ici chargé avant 9h.

Direction Jarcieu : rendez-vous avec la médecine du travail pour la visite annuelle d'aptitude.

Ca roule mal à Saint-Etienne, ça coince à Givors : je perds une vingtaine de minutes, juste assez pour me mettre la pression par rapport à mon rendez-vous. Au dépôt je saute dans la Smart et je fonce à Beaurepaire. J'arrive pile à l'heure.
Incroyable cette visite : la secrétaire médicale essaie d'évaluer ma myopie et mon astigmatisme entre les coups de téléphone, les fax, et le Médecin qui s'acharnent à l'interrompre... puis j'ai le droit au test de l'audition, toujours avec les bruits du téléphone, du fax et du Médecin... bref ça tourne au n'importe quoi : une mention "apte" en bas à droite et roule ma poule.

A midi je suis de retour au dépôt. Je troc mon frigo Frappa contre un plateau... pas une première jeunesse : il est de 1988, nous avons presque le même âge. C'est la première fois que j'attelle un plateau. Non je ne suis pas ému. Je suis préoccupé à vérifier s'il y a bien les sangles et tous le bazar nécessaire : je charge des tourets et des longueurs pour le Sud Ouest.

13h30, je suis dans l'usine de tuyaux de canalisation. Le cariste c'est Rodolphe, il est bien sympa. Je lui dis que c'est mon baptème de plateau alors il prend le temps de m'expliquer comment on sangle. Il y a aussi un chauffeur habitué des lieux qui me donne de bons conseils... Je suis agréablement surpris... moi qui m'attendais à galérer, tout va pour le mieux. Sauf que l'opération prend un temps fou : je charge à deux endroits différents, il faut sangler, puis dé-sangler, puis re-sangler, le chargement n'est pas évident à mettre en place sur le plateau, Rodolphe se creuse les menunges et moi je n'en finis pas de dérouler des sangles. La hauteur doit avoisinner les 4m40, je n'ai jamais été aussi haut.

3h passées à l'usine.

Conséquence : au moment de partir je dois déjà surveiller l'amplitude : il ne me sera pas possible de rouler 9h aujourd'hui, à peine 8h30.
Sur les conseils du chauffeur habitué je repars par le col de "Toutes Aures"... un col que l'on peut passer à n'importe quelle heure (rire). Ca grimpe un peu mais je ne suis pas trop lourd. Par contre ça tourne et les tourets me font un peu flipper. Je m'arrête vérifier les sangles avant de prendre l'autoroute à Saint Marcellin.

A49, puis A7, je trace en écoutant France Culture et notamment une émission intéressante sur Led Zeppelin. Je passe Narbonne et j'ai la chance de trouver une place sur une aire du genre blindée.

en arrivant à Givors

en plateau!

chargé pour un chantier...

col de Toutes Aures

Mercredi 4

Il pleut. Mince. Du temps où je me languissais en frigo peu importait, mais maintenant, avec mon plateau, mes tourets, mes sangles... il pleut et cela me préoccupe.

Je n'ai pas d'adresse de livraison précise : juste un numéro de téléphone. Vers 8h30 je suis à hauteur de Carcassonne, j'appelle le client. Il a un méchant accent du Sud-ouest, on dirait un commentateur de rugby de France 2. Le chantier est trop difficile à trouver seul, alors il me donne un rendez-vous à son dépôt, dans un bled voisin. Petit problème : à cause de son accent de commentateur de rugby, j'ai beaucoup de mal à comprendre ce qu'il me raconte. Je lui fais répéter 3 fois le nom du bled, mais au bout de la troisième je ne suis toujours pas sûr d'avoir compris et je ne veux pas le contrarier... alors je trifouille mon GPS et je trouve un truc qui ressemble, tous près du village inscrit sur la lettre de voiture... il y a une zone d'activités, je la sélectionne, et je suis assidument le parcours.

Enorme coup de bol : le GPS m'amène devant le dépôt de l'entreprise. J'appelle le client, il m'y rejoint, assez surpris d'apprendre que j'ai trouvé tout seul comme un grand.

10 minutes plus tard voici la camionnette : c'est parti direction le chantier, je me retrouve escorté.
Notre itinéraire commence par un pont du genre très bas et raclé sur le dessous... je flippe. Je mets les warning, je baisse les suspensions, je me tords par la fenêtre, et j'avance au pas... ça passe juste. Ensuite nous traversons quelques hameaux, et nous nous enfonçons dans la campagne profonde. Effectivement je n'aurais jamais eu idée de venir ici seul. Et puis mon escorte m'est très utile avec son gyrophare orange : elle écarte les voitures en amont.
Au bout d'un périple tumultueux, pour lequel je suis vraiment content d'être en plateau plutôt qu'en frigo vu la hauteur des arbres, nous arrivons au chantier de canalisation.
Une pelleteuse, des tuyaux, c'est là. A même la route. Pas la peine de serrer sur le bas côté il n'y a pas de bas côté, je reste au milieu, et les quelques automobilistes qui se hasardent à pointer le bout de leur museau sont contraints de faire demi-tour.
Il pleut toujours, la pelleteuse me débarasse de mes tuyaux, j'ai de la terre plein les chaussures, plein les gants, plein le jean... Une fois vide on m'emmène faire demi tour dans le seul endroit adéquat : une cour de ferme. Je me remets ensuite en place dans l'autre sens pour reprendre des tourets vides.
Les ouvriers sont très sympas, ils m'aident à installer les sangles et me font gagner du temps.

Nous approchons de midi et la mission est accomplie. Pas mal d'adrénaline mais la satisfaction d'avoir été utile : J'aime.

Avec mes 4m40 je ne tente pas la nationale entre Bram et Foix, l'itinéraire logique, sur ma carte il y a un pont à 4m30 et dans le doute je choisis de le contourner.

Je roule jusqu'à Tavel où je trouve une douche bien grade comme je n'en avais pas vu depuis longtemps. Comble de misère, en me réhabillant, je trouve moyen de faire tomber mes deux téléphones dans l'espèce de jus qui souille le carrelage... désinfection aux lingettes obligatoire.

J'ai rendez-vous à Loriol avec Hervé pour un échange de semi. J'échange la hauteur pour la longueur : j'attelle un chargement de barres de 18m sur plateau extensible. Mon baptême de convoi exceptionnel!

demi-tour à la ferme, au milieu de nulle-part

un peu d'adrénaline...

retour avec les emballages

un camion-remorque-remorque-remorque

relais à Loriol, j'hérite d'une semi de 18m

Jeudi 5

Hier soir j'ai chu sur l'aire de Nîmes Marguerittes. A peine arrivé, j'ai surpris mon voisin de parking en train d'arroser le bitume... l'oeil était à peu près aussi vide que la vessie au moment où son regard a croisé le mien tandis qu'il remballait son bazar... voici la triste réalité qui sommeille derrière ce doux nom de "Nîmes Marguerittes". A quand "Nîmes flaque de pisse"?

Il n'y a vraiment pas grand monde qui roule en ce moment : le parking n'est pas plein à moitié ce matin, il est 5h. Avec ma semi de 18m j'ai pris le luxe de me m'installer confortablement sur deux places, en diagonal. Je démarre, roule jusqu'à la station, deux minutes, puis je m'arrête faire un premier quart d'heure car de toute façon il me faudra caser 45 minutes d'ici mon point de livraison. Stratégie pour gagner quelques minutes le temps de prendre le petit-déjeuner.

C'est parti direction Toulouse. Dans la nuit matinale je croise un Sweden de retour d'Espagne, j'étais fier avec mon gyrophare mais il ne m'a même pas reconnu...

Une seconde partie de coupure sur l'aire des Corbières où j'en profite pour resserrer mes sangles tel le chauffeur de plateau consciencieux. J'appelle le contact du chantier, je m'annonce pour 10h, il m'explique l'accès - cela n'a pas l'air trop compliqué.
J'emprunte une petite portion de route départementale, cela me permet de m'exercer un peu avec ma semi à rallonge que je découvre sur le tas. Pas de surprise : il suffit de prendre plus large. Ce qui me stresse tous comptes faits, c'est d'oublier et d'adopter les trajectoires habituelles... Je ne suis qu'un perpétuel stressé.
Il y a un seul passage qui me fera transpirer : un carrefour à angle droit en plein centre-village.

Je trouve le chantier sans difficulté, et pour cause : il est à même la route. Une fois de plus je tombe sur une équipe très cool, qui m'attendait, qui m'aide à défaire les sangles...
Pour décharger il y a deux pelleteuses, et nous devons avancer à mesure qu'elles descendent les tuyaux. Je perds une petite demi heure de volant dans cette opération qui dure plus de deux heures au total. J'avais peur qu'ils partent manger : il ont fini de décharger. Heureusement pour moi. Il est plus de midi lorsque je recule avec le frein de semi pour rapticir cette dernière : un petit tour de magie que j'effectue pour la première fois et qui fascine un des ouvriers qui me pose plein de questions... alors que bon... je n'ai pas grand chose à lui apprendre avec ma seule semaine d'ancieneté...

Je recharge dans une scierie, près de Castres.
Le temps se détériore jusqu'à devenir franchement pourri lorsque j'arrive à destination. Vent en rafale, pluie horizontale et froide... la totale. Mon chargement dure à peine un quart d'heure : 12 piles de bois et basta. Par contre une épreuve de taille se dresse devant moi : l'arrimage.
Une horreur. Un cauchemar. Va jeter les sangles lorsqu'il pleut averse et que le vent ne fait que les enlever le temps que tu fasses le tour du camion! Je passe une heure et demi à lutter contre les éléments... et dire que je me plaignais de pousser de la bidoche! un boulot de fillette ouai!
C'est non sans fierté que je sers ma neuvième sangle avec une barre, il est 15h50, je suis trempé jusqu'aux entrailles, j'ai terminé. Mon blouson pèse 10 kilos, mon jean est bon à essorer, mes gants dégoulinent, mes mains sont fripées... et assez bizarrement je suis content. Content d'avoir réussi. Satisfait. Aujourd'hui j'ai servi à quelque chose, et puis j'apprends beaucoup, je découvre, c'est cool.

Je décolle de la scierie à 16h, le ciel est toujours à la tempête, j'en reprends une petite dose après une demi heure de route - le temps de vérifier le sanglage.
Je redescends piano piano par la nationale tordue qui mène à Béziers. Ensuite c'est l'autoroute jusqu'à l'aire d'ambraussum. Fin de la journée.

Le vent secoue la cabine toute la nuit.

ici on fabrique l'A380

mon destinataire

chantier de route

pratique pour trouver la scierie!

aire d'ambraussum

Vendredi 6

Hier soir j'ai falli succomber à la tentation du McDo tellement j'étais fatigué. Finalement non, la file d'attente m'a découragé, et lorsque type est venu prendre ma commande avec sa petite tablette, lui aussi m'a découragé, j'ai définitivement abandonné. J'ai pris une baguette chez Total, j'ai failli m'étrangler en mangeant précipitamment le crouton sur le parking, puis je suis retourné au camion.

Il est 4h ce matin. En me voyant arriver avec mon cabas Auchan, le caissier de la station dégaine le trousseau de clés... bon réflexe... je ne suis apparemment pas le seul à venir me doucher avec un cabas Auchan.

Un café, il est 4h30, ma coupure est terminée, je décolle direction Morestel.
Je roule en vérifiant sans arrêt mes sangles, un brin parano...

J'arrive tout près du but vers 8h30 et j'ai la bonne inspiration de faire mes 45 minutes avant... persuadé que le déchargement ne prendra pas longtemps : 12 coups de chariots et basta. Donc coupure. Je regarde ma carte... deuxième bonne inspiration : je décide de chercher le numéro de téléphone du client en appelant les renseignements, car j'hésite sur la route à choisir. Le client me dit un truc du genre : "Holala, surtout prenez bien Morestel-centre malgré l'interdiction, sinon vous allez passer par l'autre route et vous serrez coincé dans un mauvais virage!"... J'ai eu froid dans le dos... j'avais bien l'intention de passer par le mauvais virage...

Vers 10h15 je suis vide et je rentre à Jarcieu en tirant tout droit sur la carte : par les chemins de traverse.
J'arrive pour midi et je mange avec le team Duarig. Galette des rois, pas de fève, tant pis...

L'amplitude menace, je lache mon plateau extensible contre une taut', la semaine prochaine je vais en Angleterre, content!

avec mes planches...

..en Isère

l'est ti pas beau mon Suèdois

haaa... le retour à la maison...

Samedi 7
Dimanche 8

Lundi 9

Il y a le siège passager qui s'affole dans des grincements, ou des couinements, à chaque irrégularité de la chaussée, dès que la cabine bouge.
Il y a le voyant "défaut lampe" qui s'obstine à s'allumer au tableau bord parce qu'une ampoule a grillé ce matin lorsque j'ai démarré le camion. Je peux l'effacer mais il reviendra toujours quelques instants plus tard, il est manifestement plus borné que moi. Du coup, je ne peux pas avoir ce qui m'est utile devant les yeux, mais "défaut lampe" affiché en gros.
Il y a le système de dégivrage des rétroviseurs qui, à l'inverse, s'éfface au bout d'une vingtaine de minutes; je m'en aperçois généralement lorsque j'ai justement besoin de regarder dans le rétroviseur et qu'il est totalement embué...
Autant de petites contrariétés qui s'accumulent et finissent par me mettre de mauvaise humeur ce matin... Il est 4h20, je viens de partir, et c'est l'esprit agacé par ces dysfonctionnements insignifiants sur l'échelle des contrariétés que l'Homme moyen est amené à rencontrer au cours de son éxistance que je réalise : bon sang mais... je suis toujours en train de me plaindre!
Le plaignant aime à partager sa mauvaise humeur, ça le rassure et le conforte dans sa position de victime des couinements et des voyants de tableau de bord ; j'appelle Fredo pour lui raconter mes malheurs...

Je monte comme prévu en Angleterre, y-a-t-il vraiment matière à être de mauvaise humeur? L'Angleterre est, des pays voisins de la France, celui que je connais le moins. Mon seul voyage in England avec un camion remonte à 4 ou 5 ans, j'étais jeune, beau, fougueux et hyper stressé : préoccupé à tenir ma gauche plutôt qu'à focaliser sur des grincements de siège passager. Aujourd'hui, je retrouve l'adrénaline d'antan avec d'autant plus de pression que j'ai mon titre de "meilleur routier du monde d'après mon pote Richard" à honorer. Pas simple.

Je commence par monter en direction de Paris. Mon bateau étant réservé à Dieppe, il s'agit là d'un bon début.
L'autoroute A6 me paraît longue et monotone sous ce triste ciel d'octobre, ou de novembre - c'est à s'y méprendre. Entre les coups de téléphone et les sms, j'essaie de trouver quelques occupations de base à mon esprit toujours embué à cause de ce fichu dégivrage qui ne marche pas. J'entrevois l'aire d'Achères comme une oasis, une oasis qui m'attire avec sa station Leclerc, ses toilettes qui puent à 100m et ses distributeurs de café fadasse. Enfin un peu de vie bordel!

Je suis en avance, je dors un peu.

Je choisis de contourner la capitale via l'A86. Bon choix. Aucun ralentissement. Du coup je suis encore plus en avance que prévu et je m'autorise une seconde coupure avant Rouen. Je mange des betteraves rouges avec du maïs et du surimi, ce n'est pas vraiment bon mais j'assume...
Ensuite je décide de bricoler un peu : pour commencer je change l'ampoule qui me vaut le fameux message au tableau de bord... 10 minutes le temps de trouver comment faire, et une coupure au doigt pour bien me rappeler que le bricolage ce n'est pas pour moi. Je n'ai rien pour colmater, ça pisse le sang, je trouve des mouchoirs à la station. Toujours avoir le minimum de secours Régis! C'est pourtant simple.

Je reprends le volant direction le port de Dieppe. J'arrive à 15h. Je ne connais pas les lieux, je fais attention à tout. Je tombe tout d'abord sur un type très peu sympa voire franchement désagréable qui me remet les feuilles d'enregistrement, ensuite je me pose dans la rangée numéro 3 et j'attends. J'en profite pour préparer un peu plus mes itinéraires de demain.
J'ouvre la semi pour un rapide contrôle par des douaniers du genre sympa : ils font des blagues, du coup moi aussi... en espérant ne pas tomber sur un groupe de clandestins lorsque j'ouvre la porte...

J'embarque à 17h15. Dans le bateau nous sommes très serrés : les deux rétros pliés je peux à peine sortir du camion.
Le bateau est récent et propre. 4h de traversée, on me remet le pass d'une chambre à partager avec d'autres chauffeurs : je me contente de prendre ma douche le premier et je n'y remets plus les pieds. Repas copieux à 5 euros : rien à dire.

J'avais prévu de lire, de bosser sur mon PC... mais rien de tout cela : le bateau bouge beaucoup, je ne me sens pas très bien, je consacre tout le temps du trajet à essayer de ne pas vomir. Quelle mauviette!

Je sors en dernier côté anglais et j'écope d'un nouveau contrôle douanier. Un des agents met des coups de couteau dans un big bag pour vérifier la nature du produit... les billes de matière plastiques s'échappent par milliers... et moi j'acquiesce bêtement en regardant le type : " ha merde, ça va en foutre partout hun..." Une fois de plus, quelle mauviette je fais!

Je prolonge ma coupure au port. Je suis à Newhaven, c'est franchement glauque.

Régis change une lampe

Régis a changé une lampe

port de Dieppe

on board

grande classe...

Mardi 10

Alors on roule à gauche, c'est bien ça. 7h du matin, 6h - heure locale, je démarre et je pars, à gauche. Je dois l'avouer : je n'en mène pas large. Certes ce n'est pas mon premier tour d'Angleterre, mais la fois dernière je n'avais pratiqué quasiment que de l'autoroute. Aujourd'hui je commence sur des routes "normales" et donc je n'en mène pas large. Il fait nuit. J'ai hâte que le jour se lève. Le GPS veut me faire couper au plus court pour rejoindre Londres, sans aucune réserve concernant les centres ville, les ponts, où les chemins de terre... heureusement sur le bateau j'ai eu l'idée lumineuse d'acheter une carte : toujours avoir une carte.

Pour commencer je dois livrer à Hertford, au nord de la capitale. J'ai un demi tour de M25 à faire, je choisis l'Est : il y a un péage pour passer la Tamise mais je gagne 40 Km. Oui, je sais, ici on compte en miles, je gagne donc... quelques miles. J'ai ouï dire que c'était souvent l'horreur sur ce périph, pas pour moi, pas ce matin. Le GPs remplit parfaitement sa seule véritable fonction : m'emmener dans la bonne rue, me faire trouver aisément mon destinataire.
8h30, j'arrive dans l'usine de transformation plastique, un camion vient juste d'en sortir. J'ai théoriquement rendez-vous à 14h, mon programme ayant changé en cour de route. Je me présente au destinataire, l'air de rien, tranquille, en confiance, en anglais avec accent moitié jurassien - moitié n'importe quoi. Je tombe sur LE type sur lequel je ne voulais pas tomber : indifférent, froid, antipathique et peut-être même con - il faut voir. En tout et pour tout j'obtiens deux renseignements : premièrement - "va mettre ton gilet fluo Régis"; deuxièmement - "déchargement 14h". Cool.

Jean-Noël me débloque la situation et je n'attends finalement qu'une dizaine de minutes, contre plusieurs heures envisageables...
Je débâche la Krone pour la première fois, je suis étonné : elle va vraiment bien. Je réalise que le baché c'est facile lorsqu'il ne pleut pas... Je ne regrette pas mes bouts de viande.

Il me reste un lot à livrer près de Manchester : c'était ça le changement de programme. Le client se situe au coeur du parc national de Peak District, entre Sheffield et Manchester. Je prépare mon itinéraire et c'est reparti. Pas de temps à perdre pour livrer avant 16h.

Je connais mal ma géographie anglaise. Hormis Londres je ne sais pas situer précisément les grandes villes comme Leeds ou Maubeuge. Ainsi je ne suis pas très à l'aise avec les panneaux de circulation et je dois me réconcilier avec le GPS. C'est préférable.
Pas évident non plus de traduire les unités de mesure concernant les panneaux de vitesse, de hauteur, de distance. J'imagine qu'au bout de quelques voyages c'est acquis, mais pour l'heure je roule un peu "au pif".

On croise de drôles de camions sur les autoroutes, beaucoup de semi profilées et très hautes, beaucoup d'Eddie Stobart, beaucoup d'Axor... bref ça ressemble à l'Angleterre.

Je monte via la M1 jusqu'à Chesterfield, ensuite je traverse le parc naturel par de plus petites routes, et j'ouvre très grand les yeux... cette traversée est tout simplement magnifique. Du vert partout, des murs de pierres pour délimiter des champs où quelques moutons bien gras paissent tranquillement au millieu de rien. On voit loin. On respire. C'est beau. C'est immense. J'aime. Pas de pluie : je peux faire quelques photos. mais je surveille aussi le chrono, il s'agirait de livrer avant 16h.

Grâce au code postal, le GPS m'amène une fois de plus à destination. Les 5 derniers Km étaient un peu difficiles, un chauffeur anglais m'explique que je n'ai pas pris la bonne route.
Un vieux type avec un bonnet de Manchester United manie le Fenwick... on dirait Alex Fergusson (le Guy Roux local)

Une fois vide j'ai pour consigne d'aller recharger en direction de Liverpool. En moins de 9h je parviens à me caler dans la rue, avec des camions turcs, devant la boite où je recharge demain.
Cette journée a été riche. J'aime mon métier.

Highway to hell

mon nouveau fond d'écran

Peak District

grands espaces

failli faire un carnage...

décor de film d'horreur

Mercredi 11

Il fallait que cela arrive. Hier pour me garer sur une place plus "confortable", j'ai remis en route et roulé jusqu'au rond-point du bout de la zone, afin d'y faire demi-tour. Et que s'est-il passé alors? Et bien, j'ai fait ce petit parcours en roulant à droite, comme un poney... ce n'est qu'une fois arrivé au rond point que j'ai réalisé, en voyant un type l'air désabusé dans sa voiture... j'ai dû tourner à l'envers, en warning, comme un grand, devant lui, avant de me resserrer à gauche et d'aller me cacher. La honte. Je mets cet oublie sur le fait qu'il s'agissait d'une route déserte de ZI... comme il n'y avait ni circulation, ni marquage au sol, ni panneau, je suis machinalement parti à droite...

Mon premier enlèvement se fait sur une plateforme de groupage. Je me présente à 8h, j'aurais peut-être pu venir avant, mais dans le doute j'ai attendu avant de démarrer mon amplitude.
Casquette sur la tête, moustache blanche, l'air égrillard, voici celui qui s'occupe de mon chargement. Il me guide pour la manoeuvre, prend mes clés et m'indique la machine à café car je n'ai pas le droit de monter sur le quai. Le café coûte 30 pence et s'avère très bon. Sur la table il y a Thierry Henry qui fait la grimace et la couverture du Sun. Vu sa tête on dirait qui vient de cogner le doigt de pied dans le bois du lit, mais non, en lisant l'article on apprend qui a mis un but avec Arsenal. Cool. Mon cariste à tête marrante revient, il a fini de charger et m'amène les papiers. Je lui parle de Thierry Henry, il me dit que c'est une tapette. David Douillet n'aurait pas dit mieux.

Je sors le mètre et je mesure. 8 mètres, plus une palette, voici ce qu'il me reste. Je descends sur Hinckley, à l'est de Birmingham. Il y a une rocade qui contourne la ville, par l'Est justement, j'hésite à la prendre car il s'agit d'une portion payante. J'hésite... puis je me retrouve dessus, tant pis, elle est idéale pour mon itinéraire. Je comprends très vite que ce choix n'est pas judicieux : la rocade est déserte. Déserte car chère : je m'en sors pour 10 pounds. Erreur de débutant.

Je trouve ma deuxième ramasse à 11h et je prends peur : une toute petite cour dans une toute petite zone... à peine suis-je posé en warning dans la rue que le voisin me dit de bouger, du coup j'entre directement dans la cour en marche arrière pour être "à ma main". Un des types du quai m'interpèle : il me dit de me mettre à la place vacante. Cet endroit est en réalité tout l'inverse de ce que j'imaginais : je passe à quai sans attendre, deux caristes s'occupent de mon chargement et se montrent vraiment sympathiques : ils ne rechignent pas à sortir mes 13 palettes pour tout remettre dans le bon ordre, et avec le sourire. Je n'en reviens pas. Il faut dire que l'Angleterre est vraiment appréciable au niveau de la compréhension : je parle à peu près couramment anglais, assez pour faire un peu d'humour, avec peut-être même plus de succès qu'en français, du coup ça passe beaucoup mieux chez les clients.
Comme une journée sans une pointe de stress n'est pas concevable il y a tout même un problème de taille : la commande prend ici plus de place que prévu, j'ai beau tourner et retourner les palettes je n'en gagne pas.

Ainsi j'appréhende en arrivant dans l'énorme entrepôt d'une grande enseigne française, pour ma dernière ramasse. J'appréhende car généralement dans ce genre d'endroit on n'a même pas accès au quai... alors s'il s'agit de demander des services pour refaire un chargement j'imagine que sera difficile.
Contre toute attente je ne charge pas à quai mais dans la cour : c'est mieux, au moins je suis à côté. Le cariste se montre assez froid et m'annonce la couleur : hors de question de gerber leurs palettes ou de toucher aux miennes. Je sais que cela ne tiendra pas mais il commence à charger... alors je le laisse faire... persuadé qu'arrivé à la fin il n'aura pas trop le choix... et comme prévu ça ne tient pas. Au début il grogne puis je parviens à le persuader qu'il suffit d'en mettre une là dans le coin et on n'en parle plus; ça marche.

Je n'ai plus qu'à redescendre en France. Direction le tunnel sous la Manche. Avant cela je perds une bonne heure pour traverser Londre et je gagne le droit de refaire 45 minutes de pause sur une aire de service avec 10 places pour 30 camions... du coup j'attends devant les pompes.

Il paraît que c'est l'effet Seafrance : il y a du monde au tunnel. Je perds à nouveau une heure avant d'embarquer sur le train. Ce n'est pas une première, je connais la procédure : la navette qui passe de cabine en cabine, puis qui amène tout le monde dans le wagon-chauffeurs où l'on se regarde en chien de faïence en se demandant quelle tête appartient à quel camion, de quel pays... Pour passer le temps j'ai avec moi mon bouquin de chroniques de Vialatte. Comment je me la pète. Je suis détestable : sorte de routier bobo pseudo cultivé qui s'affirme avec son petit bouquin au milieu des gros durs. Moi même je détestais ce genre de types qui sortent un livre dans le métro juste pour en montrer la couverture et supposer qu'il savent lire. Aujourd'hui j'ai l'impression d'être ce type. Mais j'ai aussi envie de voir autre chose que le distributeur de boisson pendant la demie heure de trajet - le paysage étant plutôt restreint sous la Manche...

J'arrive en France à 21h30; à la sortie du train, en haut de la rampe, je reste persuadé de n'avoir pas pris la bonne direction malgré les 30 panneaux : j'ai tourné à gauche - tout le monde a tourné à droite... je n'ai pas trop compris ce qu'il se passait, mais je suis sorti sans problème, personne ne m'a poursuivi, en éternnel paranoïaque je n'étais quand-même pas très tranquille.

Je roule jusqu'à Arras, je me pause sur l'aire des "trois crètes". Deux camions, rien de plus.

au pays d'Eddie Stobart

hauteur libre

Queen Elizabeth II Bridge

rampe d'accès au train

Jeudi 12

Réveil à 8h10, il y a François Bayrou qui parle dans le poste. On dirait Cantelou, ou Gerra, mais c'est bien Bayrou... c'est nettement plus drôle d'ailleurs.
Pas de station - pas de café, une bonne gorgée de Volvic, deux pains au lait et c'est parti. Il y a Sweden une heure derrière, j'envisage de l'attendre pour qu'il m'aide au cas où j'aie une roue à changer ou un café à payer, mais je ne sais pas si je peux me le permettre, j'attends les instructions du bureau concernant mes livraisons. Seul problème, et je ne le saurais que plus tard : mes sms n'aboutissent pas... je continue à attendre.

De toute façon nos routes se séparent, Sweden file vers Troyes ramasser une ultime palette tandis que je file vers St Dizier à la recherche d'une douche. En 4h16 j'arrive au restaurant de Semoutiers, près de Chaumont, je n'ai rencontré aucun grumeau. J'ai 45 minutes pour me laver... j'aimerais pourquoi pas manger mais cela risque de prendre trop de temps si je veux tenter mes clients à Lyon ce soir. Du coup, une fois propre, je me contente d'un café en lorgnant sur le buffet plein de charcuteries à ma droite...
Le parking est recouvert de boue liquide et claire, on a l'impression de marcher dans du béton frais, on a peur que ça fige. Bien entendu j'en ramène un peu sur et dans le magnum... j'en suis ravis.

Coup de fil aux renseignements pour choper le numéro de mon premier destinataire. Je m'annonce à 17h, le type me dit qu'il n'y aura plus personne pour vider... je demande s'il y aura encore un chariot et si je peux m'en servir, il me dit "faut voir".
16h50, je suis sur place. C'est lui qui décharge et l'opération n'est pas des plus faciles car les palettes sont au milieu : un changement de programme m'obligeant à livrer dans le désordre. Tout va très vite car c'est la fin de journée, à peine fini de décharger que le chariot est déjà rangé alors que j'aurais aimé bouger la marchandise qu'il me reste pour ne pas repartir comme ça : au risque d'en faire tomber. Il a déchargé, c'est déjà pas mal, pour le reste on va mettre des sangles.

J'ai une deuxième livraison à Bron mais elle nécessite un hayon, que je n'ai pas. Alors j'ai pour consigne de rentrer au dépôt, à Jarcieu.
Fin de la journée, nous partageons un bout de saucisson avec Nico, Aurélien et Didier. Puis je retourne dans ma cabine, je baisse les stores, je mets le webasto et j'écoute "Under my Thumb" des Stones.

Picardie

Tiens, Cuicui et un collègue!

bien embarrassé avec ça

avec Aurélien, à Jarcieu

Vendredi 13

Une douche, un café et même un croissant : il fait bon se réveiller au dépôt. Aujourd'hui je tourne en régional. Pour commencer je décharge l'intégralité de ma marchandise anglaise pour n'en reprendre qu'une partie à livrer près de Romans. Je coupe à travers la brousse drômoise, je passe les 35 rond-points de Romans, puis je grimpe les premiers reliefs du Vercors pour atteindre mon destinataire : un batiment perdu au bord d'une rivière. Une fois vide et avant midi je recharge une moitié de semi dans une usine de plastique. Tout se passe bien, je suis productif.
Midi approche et Sweden aussi : il est environ 2 minutes derrière moi et nous partons vers la même direction. Du coup nous décidons de prendre une pause déjeuner, tranquille, nous sommes vendredi. Le seul problème c'est qu'il n'y a pas de restaurant sur notre itinéraire, il y a juste Saint Marcellin... alors nous nous casons sur des emplacements voitures, près des lycées, puis nous partons à la recherche d'un truc pour combler nos panses taries.

Le cahier des charges n'était pas très exigent : juste un truc à manger, si possible chaud. Ainsi nous nous retrouvons dans une sorte de snack-bar à deux pas des lycées. D'ailleurs on s'en rend très vite compte en y observant la population : des djeun's avec plein de téléphones portables et plein de gel dans les cheveux. Les deux barmans sont des sortes de loubard-biker-zztop-gay qui servent des shweppes agrum à des jeunes filles avec du Madona à fond dans les haut-parleur : c'est à n'y rien comprendre. Nous faisons un peu tache. Tant pis. Pour le prix d'un bon resto on bouffe des trucs réchauffés au micro-onde mais tant pis aussi : l'essentiel était de partager un bon moment.
Nous reprenons la route et le col de Toutes Aures, (à 13h30), ... Je laisse mon chargement à Lionel, un collègue, puis je rejoins à nouveau mon Suèdois, nous rechargeons dans la même boite.

La suite se passe au dépôt. Je laisse ma Kogel pour un frigo Frappa. Tiens un frigo? ça faisait longtemps. Je recharge quatre lots pour la Normandie, je lave, et je rentre.
Sur les trois heures que dure le retour je roule serein, content d'avoir passé une semaine digne d'intérêt, avec la sensation d'apprendre encore et encore.
Les portes de la 4L sont figées par la glace, ça y est, il gèle enfin, je dois même gratter le pare-brise avec un vieux sachet de pains au chocolat, à défaut de mieux...
Je rentre à Lons.

13A Saint Nazaire en Royans

rechargement avec Sweden

plutot de l'aider je préfère le prendre en photo, c'est mieux...

Samedi 14
Dimanche 15

Lundi 16

1h30, la musique du réveil retentit comme le glas qui m'extirpe de sous la couette. J'y étais pourtant bien sous la couette. J'y serais bien resté quelques heures encore, mais je parviens à trouver la motivation pour en sortir dans l'angoisse d'un retard peu souhaitable. Alors je je m'active et une dizaine de minutes plus tard me voici dans la 4L en train de gratter l'intérieur du pare-brise (car il gèle aussi). 2h15, je suis au camion, je démarre et je range mes affaires. 2h30 ma journée de travail débute.

Il fait froid. Enfin. En traversant la Bresse endormie sous son manteau de brouillard le mercure tombe à -5°C; on aperçoit parfois quelques paillettes sur le bitûme, je reste vigilant : pas de radio, pas de téléphone, la main et le pied souple. Je ne croise personne durant la première heure de conduite qui m'amène à Beaune. Arrive enfin l'autoroute et ses éternels lignards qui chacun amènent leur éphémère distraction avec une plaque lumineuse, une guirlande verte ou quelques veilleuses à outrance. Je monte en direction de Paris via l'autoroute A6.

Je tiens la forme, je ne me gave pas de madeleines pour rester éveiller, je ne me mets pas de grandes claques, je ne sors pas la tête par la fenêtre : je reste normal, là, derrière le volant à écouter tantôt un reportage de France Culture sur des écrivains que je ne connais pas, tantôt un live des Cure, tantôt une rediff des Grosses têtes de 1991, tantôt les interférences insupportables entre deux stations lorsque j'oublie de tourner la molette.
Comme lundi dernier je me pause sur l'aire d'Achères, j'ai 3h50 de volant, je dors 45 minutes.

Certes c'est très mal calculé mais je n'ai pas vraiment le choix avec mon programme du jour : je me retrouve à l'entrée de Paris en pleine heure pointe, ça roule très mal. Je monte en Normandie, quatre clients à livrer entre Evreux et Honfleur.
Toujours comme la semaine dernière je décide de passer via l'A86. Seulement dans mon emportement j'oublie qu'il est deux heures plus tôt... 9h très précisément lorsque j'entrevois un motard sur le bas côté à hauteur de Wissous. J'ai vu qu'il m'a regardé, puis il a sauté sur sa Harley, puis il a fait pété le gyrophare et m'a prié de le suivre parce que je suis un bandit. Oui, il n'est que 9h et je n'ai pas le droit d'emprunter l'autoroute sur laquelle je me trouve avant 10h : c'est écrit sur les panneaux illisibles à Villabé. Je n'ai même pas cherché à frauder quoique ce soit cela m'est tout simplement sorti de la tête... peut-être parce que les fameux panneaux sont trop bien adaptés (pour réussir à les lire il faut les prendre en photo et zoomer sur un ordi...) Bref, je me fais sortir de l'autoroute, je suis ravis.

Nous sommes 5 ou 6 camions, français, sur une sorte de contre-allée. On se regarde avec ce mélange de fatigue, de dérision, de désappointement, de lassitude...
Je sors toute la collection de documents à fournir à mon motard, direction le bungalow. "Vous savez pourquoi je vous arrête?"... "Non..." J'ai dit non, comme ça, parce que je m'en fous qu'il sache si je suis un benêt, un rebelle, un cassos, un casse-burne ou une pleureuse. Pas envie de communiquer avec lui. Alors j'observe la procédure. Pour les documents - pas de problème, par contre pour ce qui est de lire la carte : je vois direct qu'il ne s'y connait rien : il se reporte machinalement à ce que lui sort sa machine et ne voit pas plus loin... c'est ainsi qu'il m'annonce que vais être sanctionné pour un 9h13 avec 13 minutes en trop sur ma journée de vendredi dernier... "Donc je coupe à 13 minutes de chez moi, j'appelle ma femme et je lui dis "désolé on se voit demain, embrasse les gosses"". Il plisse les soucils, il acquiesce, et me sort comme tout bon contrôleur qui se respecte "bon... allez je ne vous la mets pas, mais faite attention la prochaine fois".

"faite attention la prochaine fois"... On ne fait plus que ça "faire attention"! On devient parano, obsédé par la montre, près à sacrifier une hygiène de vie pour respecter cette fichue RSE. Docile le routier : tu te lèves à 1h30, tu roules dans le brouillard, tu fais une pauvre infraction par inattention, tu te fais pruner par type qui ne connais rien de ton job, et tu signes l'infraction dans le bungalow - juste en dessous de l'affiche "partageons la route" avec un camion, une voiture et une moto. 90 euros, mon job tape direct dans mon porte feuille, tout est normal.
Avant de partir il y a un autre motard qui vient aux renseignements : "Heu Michel... l'A12 et l'A13 c'est interdit aussi ou pas?". Ici on s'occupe de poser des prunes, comme on a appris à l'école, comme c'est écrit sur le panneaux...

Je repars en retard. Je livre 3 palettes à Evreux, un chantier à Pont Audemer et deux clients dont un bien merdique à Honfleurs. J'ai réussi à tout caser dans la journée. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître j'essaie de faire mon métier le mieux possible. Tous les jours.
14h d'amplitude, 9h30 de volant, 90 euros en moins.

sous le soleil de Pont Audemer

maisons normandes traditionnelles

Pont de Normandie

Honfleur

Mardi 17

Ce matin il me faut patienter encore un peu pour connaitre la suite des évènements. J'essaie de lire, entre deux coups de téléphone.
"roule en direction de Paris", voici ma consigne tandis que je tourne la page 68 des "Nouvelles de Pértersbourg". Revenons à la réalité donc. Je démarre, je fais un rapide tour du camion, je quitte Honfleur.

En route pour la capital je prends connaissance du programme dans les détails : chargement à coté de Cergy pour vider dans la foulée à Viry Chatillon, au sud de Paris... pas le genre de mission qui vend du rêve mais qui a au moins le mérite de faire tourner les roues, un peu.
Pas le temps de manger : je fonce sur Cergy.

En arrivant de l'A13, je décide de couper par Les Mureaux pour rejoindre l'A15. C'est durant cette traversée, en zone urbaine, que je vais connaitre une belle frayeur : Je roule pénard sur une 4 voies avec une circulation moyenne, nous sommes en pleine heure de déjeuner. Au loin j'aperçois deux petites filles qui attendent devant un passage piéton que les quelques voitures daignent s'arrêter. Personne ne s'arrête. Conscient du danger avec ces deux voies de circulation je m'arrête, mais je ne fais pas d'appels de phares aux gamines, car ça roule encore à ma gauche. Je m'arrête pour faire arrêter les autres. Les deux filles s'engagent, un type arrive comme balle... on évite le drâme d'un cheveux, elles ont eu le réflexe de se cambrer en arrière pour l'éviter. J'en tremble encore. Le mec a piler après le passage piéton, ce qui ne servait à rien mais disons qu'il a sans doute eu lui aussi très peur... ensuite il est reparti, ce qui m'a évité de descendre lui faire manger son volant.

Bizarrement lorsque je suis le seul à m'arrêter devant un passage piéton on ne me donne pas 90 euros.

J'arrive à 14h devant le lieu où je suis sensé recharger mais il n'y a rien qui correspond : ni le numéro, ni le nom de la boite que je cherche. Je demande dans les vitrines voisines : personne ne connait. J'appelle. On me dit que je ne suis as au bon endroit : le chargement à lieu dans un dépôt tout proche. J'aime ce genre de plan.
Je charge dans le "dépôt tout proche", puis je descends à Viry Chatillon. Je cherche une enseigne discount et l'adresse que j'ai se situe en plein centre ville. Il y a la totale : ponts à moins de quatre mètres, bordures, interdictions PL... mais j'avance, je me fie à cette adresse... j'y arrive tant bien que mal. Pas de discount. Au numéro qui correspond il y a un immeuble avec un cabinet de médecins, et moi je suis en double file devant. Je n'ai pas de contact téléphonique alors j'essaie de me débrouiller avec les renseignements et le numéro du fournisseur. J'apprends avec joie qu'ils m'ont envoyé à l'adresse de facturation, ils se sont trompés. Génial. Je sors de là avec à peu près autant de difficulté que pour y entrer. La deuxième adresse, la bonne, n'est pas forcément mieux : je perds un temps fou pour y arriver dans le bon sens, engoncé dans les sorties de bureau. Et puis une fois à destination il faut décharger en pleine rue, au hayon, faire sauter les palettes lourdes par dessus les trottoirs, et faire vite car un rechargement m'attend. Bref, aujourd'hui je galère, et pas qu'un petit peu.

Je recharge des pommes à Sens, le mec m'attend, il en a marre, je le comprends. Je me chope encore une bonne dose d'embouteillages pour sortir du grand Paris, J'arrive à destination à 20h30. Le mec fait un peu la gueule mais il semble néanmoins sympa; Nous chargeons à deux : une bonnes heure travail car il faut toutes ré-étiqueter les palettes.

Je roule ce qu'il me reste pour arriver sur l'aire d'Avallon. Ce soir je dors avec le frigo allumé (même s'il reste muet), cela faisait longtemps.

minou-minou...

la Seine, Paris

l'air pur, Paris

je suis sensé être à destination (?)

tout plein de pommes

Mercredi 18

-5°C ce matin. Le parking PL est loin de toutes commodités, il va falloir affronter le blizzard pour aller se laver : difficile de se convaincre de sortir de la couette. Je vais au restaurant, je prends un café et je demande la douche... la serveuse me dit qu'il n'y en a pas. A la station BP? Non plus, c'est en travaux. Il n'y a donc aucun moyen d'être propre sur cette aire d'autoroute. Par contre des Pringles, des Pasta Box, et toutes les saloperies hors de prix pour automobiliste naïf sont bien là, malgré les travaux. Vis ma vie de chauffeur routier. Qui pue.

Je dois vider mes pommes à coté de Jarcieu. Je peux me permettre une pause sur l'aire de Roussillon car rien ne sert d'arriver entre midi et 13h30. Donc pause : taboulé et douche bien chaude.
13h30 je vide mes pommes, et j'en mange une au passage en guise de dessert.
Dans la foulée je vais au dépôt, je fais mon plein, et j'attends Sweden. Il doit m'amener de la marchandise pour l'Espagne. Au début je culpabilise à l'idée d'aller en Espagne à sa place, je me dis qu'il va finir par me détester si je continue à les piquer ses voyages... mais finalement j'apprends qu'il y va aussi, en Espagne, je ne ferai pas casser la figure aujourd'hui.

Avant de descendre il y a deux enlèvements à Montélimar qui m'attendent. Je parviens à caser la demi-heure de coupure qui me manquait, il me reste environ 3h à rouler aujourd'hui, je rattrape l'autoroute à Montélimar sud.

En pleine conférence téléphonique durant laquelle Phil26 s'impose en maître et nous déroule l'éventail de ses meilleures blagues à moi et Sweden - ses disciples, j'arrive sur un véhicule qui n'a pas de feux à l'arrière. Il s'agit d'un porteur de 19t, un Renault G. Je le rattrape, je me dis que peut-être le chauffeur n'est pas au courant, alors en doublant je mets un coup de klaxon et je lui fais un signe de la main pour lui faire comprendre. Pas de réaction. Je poursuis mon dépassement et je constate que... le véhicule n'a pas de feux avant non-plus. Le type roule sur l'A9 sans phare, en pleine nuit. Je ne le vois même plus dans mon rétro lorsqu'il s'agit de me rabattre. J'hallucine. Comment peut-on être aussi imprudent? Je devine l'ombre derrière moi, au moment de passer la sortie Roquemaure je constate qu'elle ne sort pas... et en plus ce camion est peut-être en train de faire un long trajet! Maitre Phil26 me suggère d'appeler les flics, je pense que c'est la chose à faire : s'ils peuvent se montrer plus utiles que lundi matin, pourquoi s'en priver.

L'ombre est restée une vingtaine de minutes derrière moi. Pas vu de gyrophare.

Je n'ai pas assez pour aller jusqu'à l'aire de Béziers, je coupe sur l'aire de Mèze. Il s'agit de cette nouvelle génération d'aire où les camions manoeuvrent pour se garer en épis. Je choisis le coté "à sa main", de peur qu'un clampin m'arrache la cabine au coté "contre main" où les reculades sont parfois hasardeuses.
Il y a ici quelque chose comme 5% d'immatriculations françaises, c'est à dire 2 ou 3 concrètement. Je suis sur une sorte de ghetto du routier des temps modernes. Un parcage avec rien d'autre pour agayer l'esprit que du bitûme, des bordures et des chiottes automatiques. Aucun contact extérieur. Reste dans ton camion, ne parle à personne.

Aire d'Avallon

pas de douche mais des Pringles...

pas de douche mais des bio de Gérard Holtz, ou de Jacques Seguela...

18D A6

camions en batteries à Mèze

Jeudi 19

5h30, le Régis part à la découverte des toilettes automatiques. Il semble peut en confiance au premier abord, il a besoin de prendre ses marques. L'endroit n'est pas insalubre, il parait même propre, l'odeur y est supportable et le Régis n'est pas obligé de battre une nouvelle fois le record de monde d'apnée - catégorie chauffeur-sur-aire-d'autoroute (la catégorie reine). Quelle chose étrange que ce système pour se laver les mains!? Il faut passer ses mimines à travers le mur, et Ô surprise! du savon! Ô surprise! de l'eau! Ô surprise! de l'air chaud! Bien pensé tout ça mais quelque peu angoissant : on passe les mains dans le mur et on ne sait pas sur quoi (ou sur qui) on va tomber...

Départ 5h42. Oui, je suis à la minute près. Je suis remonté, dans les starting block, près à en découdre avec ma tournée de Barcelone. Jusque très tard dans la nuit le vieux sage Phil26 m'a défriché le terrain en donnant les itinéraires et les astuces pour chaque client, avec une précision surprenante pour quelqu'un qui approche tranquillement de la sénilité. Du coup je suis en confiance, certes, mais j'ai d'autant plus la pression : si ça se passe mal j'ai du souci à me faire.

Cap sur le sud via autoroute A9.
A hauteur de Narbonnes je dépasse un autre camion. Il fait encore nuit et je ne vois qu'au dernier moment une grande plaque métallique - un coffre de semi-remorque sans doute -, jonchée sur la voie centrale. Au même moment une voiture commence à me dépasser : je ne peux aller ni à droite, ni à gauche... je roule sur la plaque en balançant ce que j'ai de mieux en matière de grossièreté pour matérialiser ma colère. Merde. Pas de bol. Le bruit n'a pas été trop méchant mais il faut que je vérifie si tous va bien. Je fais un quart d'heure sur l'aire "du village catalan" je sors ma lampe torche, j'examine les pneus, le chassis, les coussins d'air... rien à signaler. Un café et je continue.

Me revoici en Espagne. Il fait très froid et le spectacle du givre sur fond de lever de soleil est d'une rare beauté. C'est plus joli par exemple que Maubeuge sous la pluie.
Avec mon travail pré-mâché par Phil26 je trouve mon premier client sans me perdre. Une palette, une demi-heure de pause et je poursuis avec le tachy à zéro.
Je livre ensuite dans une très grande usine de lessive. On cherche mon numéro de commande pendant vingt minutes et c'est tout un troupeau de chauffeurs qui me passent sous le nez. Résultat : j'attends docilement mon tour dans la cour, derrière ceux qui sont arrivés après moi. Le déchargement se fait au tire-pal manuel. Rude épreuve. Je tire de toutes mes forces, je souffle, je grogne, je gueule... et j'amène une à une les palettes d'1,2 tonne. Je fini lessivé... (blague) ("usine de lessive") (drôle)
Je fonce chez le troisième comme si je savais où j'allais. Je trouve et je vide tout de suite. Alors je fonce chez le dernier, et là grosse désillusion : c'est la pause - on me vide à 15h. J'avais oublié qu'ici on ne vit pas aux mêmes horaires que qu'à Lons le Saunier. Du coup je voulais briller avec mon SMS "je suis vide", mais je dois le reporter à plus tard.

Je recharge chez un transporteur, du côté de Granollers. Les conseils de Phil26 m'amènent devant le portail... Aujourd'hui j'ai vraiment passé la journée avec Phil26 en co-pilote.

Sweden revient de Tarragone et nous devons échanger de semi demain matin première heure. RDV indéterminé sur l'AP7, on verra bien où il y aura de la place pour décrocher.

les toilettes du futur

bienvenue chez les Catalans

des voitures partout, partout... partout

dernier client

un peu de body building

Vendredi 20

J'ai tellement peur de me louper ce matin que je me réveille un quart d'heure avant la sonnerie de mon portable. Du coup, pour me venger de tous ces matins cruels, aujourd'hui c'est moi qui lui souffle une mélodie pourrave dans les oreilles. Il est 1h30. La zone industrielle est déserte, pas un chat, pas une voiture, pas un bruit, rien. Je démarre, je fais le tour du camion et je décolle; direction l'AP7.

Quelques kilomètres après m'être engagé sur l'autoroute, je trouve un bout de parking très glauque qui fera l'affaire pour le relais avec mon Suédois. Il s'agit d'une aire sans rien dessus, si ce n'est quelques camions échoués et de grands panneaux "attention risque de vol dans les véhicules sur ce parking". Pas très rassurant tout ça.
Je case un quart d'heure de coupure. Anto arrive et me troque sa Curioz contre ma Frappa. Ensuite direction la France. Je dois impérativement décharger avant midi à Vienne. Pas le temps de faire la route ensemble. Une prochaine fois...

Retour intra muros, tout shuss sur l'A9. J'attends d'arriver vers les 4h de volant pour faire ma seconde fraction de pause. Stop sur Montpellier Fabrègue, ses places rares, sa station BP, son gobelet de café à 1euro10. J'ai seulement une demi-heure au programme, je décide de ne pas dormir : j'aire à la station BP avec mon café trop chaud dans la main.
Le contrat s'annonce largement faisable : je prévois d'arriver à Vienne avant 11h.

10h47 très exactement, je suis à destination. A peine me suis-je étiré de tout mon long, tel le chat qui sort du canapé - alors que je ne suis qu'un routier qui descends du Magnum, qu'un type vient me voir, alerte. Il m'explique qu'on m'attend comme le messie, que la production est arrètée faute de matière première, que ce serait une bonne idée de vite débâcher. Je m'exécute. Quel pied ce serait d'être partout attendu de la sorte... mais ne rêvons pas.

Je suis vide à midi. Je pars faire un premier enlèvement à Mions, un type m'annonce qu'il est possible de charger entre 12h et 14h... mais une fois sur place le type en question s'est transformé en grosse secrétaire et m'annonce : "pas avant 14h". OK. Je reviens plus tard, de toutes façons j'ai mieux à faire : une bouffe avec mon pote Romain qui bosse juste à côté.

Retour à 14h, il faut jouer des coudes au bureau d'enregistrement pour se faire une place parmi les Polonais, les Roumains et les autres. Ici il y a des employés bi-langues (avec une moitié de langue de l'Est) au bureau. Cela facilite les choses.

Deuxième ramasse sur une autre plateforme de groupage des environs, une sorte d'entrepôt pourri où tout le monde entre comme dans un moulin et se balade entre les palettes... un endroit surprenant et stressant, surtout un vendredi après midi où l'objectif est plus que jamais de ne pas perdre de temps. Je n'en perds pas trop.

Retour à Jarcieu sur réserve d'heure de conduite, et d'amplitude. Tout est calculé.
Ce soir il a du beau monde : des Sweden, des Dridri, des Alain, des Mister Blagues, des Chefs... ça charge des camions et ça fait des blagues, bref c'est la bonne ambiance.

Pour achever cette journée je retrouve mon Suédois pour un tête à tête à Sonnay. Décidement on ne se quitte plus; on partage un boeuf bourguignon, on commence à parler d'avenir...

dans une impasse merdique

les derniers carrosses de Norbert

allez... tu verras c'est pas cher...

un mamouth chez Duarig

Samedi 21

Dimanche 22

Lundi 23

45 heures plus tard me revoilà. J'ai un complet d'oignons à vider près d'Auxonne; étrange mais c'est bien ça : un peu comme si j'allais vider un complet de clairette à Die, ça ressemble à un non-sens, on appelle ça les échanges économiques. Auxonne tire en effet sa renommée mondiale, voire planétaire, voire intergalactique, des oignons... et puis la ville possède le titre honorifique de "capitale du val de Saône", un label farouchement jalousé par Vesoul (mais n'est pas Auxonne qui veut...)
autant dire qu'il s'agit de "the place to be", entre deux week end à Maubeuge.
Ce matin le temps y est triste et la Saône y est en crue. Je cherche mon usine d'oignons.

Soudain, le flash. Je me revois à bord du Magnum 385TI, nous sommes en 2004, je suis un jeune conducteur avec un peu plus de cheveux et un peu moins de confiance, je reviens de ma livraison chez Carrefour Besançon et j'ai pour mission de recharger des oignons chez le type à moustache. Le détestable type à moustache. Celui qui nous prend pour des moins que rien et qui ressemble à étrangement à un autre type à moustache plus célèbre... huit ans plus tard je viens vider ici et je n'ai qu'une envie : revoir le type à moustache pour le crucifier dans mon carnet de bord. Manque de chance, la réception se fait de l'autre côté du batiment. Le type à moustache ne restera qu'un sombre souvenir.
Même Phil26 s'en souvient, de sa période Lubac où il venait lui aussi se faire prendre pour un moins que rien. Certains "personnages" laissent des traces.

Il y a un Roumains-Espagnol à quai, j'attends mon tour. Ensuite ce sera au Polonais-Allemand de prendre ma place. Vivement 2014 et encore plus de diversité culturelle.

Je suis vide pour midi et j'ai pour consigne de recharger à quelques kilomètres de chez moi, sur les hauteurs de Lons.
J'ai rendez-vous entre 15 et 17h, je prends donc le temps de me couper une endive et d'écouter France Inter - sans manquer de me consterner devant l'évolution chaotique de la programmation du 12-14 qui m'insupporte.
Et puis en passant devant carrefour market, je vais y faire mes emplettes : pain, eau, yaourts natures, conserves... un vrai régime militaire.

Malgré tous mes efforts pour perdre du temps, je me présente à 13h30 pour recharger. La secrétaire m'annonce, puis me dit de me mettre à quai parce que "vous avez de la chance, la commande est prête". Bien.
Je charge du vin pétillant à destination de la région de Die; étrange mais c'est bien ça : un peu comme si je chargeais un complet d'oignons pour Auxonne, ça ressemble à un non-sens, on appelle ça les échanges économiques.
Avant même l'heure de mon supposé rendez-vous, je lève le camp. Direction Jarcieu.

Je prends la nationale jusqu'à Lyon, histoire d'économiser de l'autoroute et de plomber ma conso déjà préoccupante. J'arrive à 18h au dépôt. Je reprends un frigo chargé par Phil26-le-nouveau-cariste, puis je commence à descendre, rassuré part les plan du même Phil26 qui s'apparente pour moi à une sorte de mère-poule.

En 8h59 de conduite journalière je parviens jusqu'à l'aire d'Ambrossum, ce qui me permettra d'atteindre Barcelone sans refaire 45 minutes de pause demain matin.

paysage jurassien

caisses de vin

et biime, une nouvelle interdiction!

Ray mange équilibré

Mardi 24

Non je ne me lève pas à 6h comme prévu pour taper mon carnet de bord en attendant la fin de ma coupure, je me lève au dernier moment, à 7h. Je fonce prendre un café et je décolle, pas de temps à perdre.
Deux livraisons à Barcelone, une à Tarragone, la journée s'annonce belle. Je descends vers le sud et j'écoute "Loaded" du Velvet Underground avec mes lunettes de soleil; je me surprends à fredonner les paroles en yaourt, je me prends pour Lou Reed.

9h30, me voici en Espagne. En passant La Jonquera j'échappe de peu à un contrôle derrière la barrière de péage... les flics choisissent le camion suivant, manifestement ils savent que je n'ai pas que ça à faire.
En 4h je suis chez mon premier client : tout était calculé. Il y a des camions dans tous les sens dans la rue et il s'avère difficile de stationner près de la plateforme de groupage. Alors je me pose loin et je marche, avec mes portables, porte-feuilles et clés en poche car cette zone ne m'inspire pas confiance. L'espagne toute entière ne m'inspire pas confiance en ce qui concerne les vols dans les cabines. Je dois être parano.
Une secrétaire m'explique une consigne que je ne capte pas très bien compte tenu que mon niveau de compréhension de cette langue est comparable à mon aptitude à communiquer avec un chien. Du coup j'attrape un cariste, je lui baragouine un dialecte bizarre avec des mots français, des mots italiens, et des gestes... il m'indique le quai "3", je lève le pousse et je dis "OK"... car je maitrise plutot bien le "Ok", partout où je vais.
J'ai tout juste le temps de faire ma coupure de 45 minutes à quai, je récupère les papiers et j'enchaine.

Deuxième livraison à Cerdanyola. Le GPS me conduit à destination sans erreur : une zone industrielle moderne et étroite, laissant très peu d'espace aux camions même là où ils doivent se rendre. Ainsi lorsque je trouve l'entreprise et que je vois le quai, je réalise que je ne peux pas manoeuvrer pour m'y mettre : les voitures gènent. Le cariste m'indique la rampe je lui réponds : impossible. Il est très sympa et accèpte de décharger à même la rue. 13h, j'en ai fini avec Barcelone pile avant la pause déjeuner, je peux descendre serein vers Tarragone. Je roule 1h30.

Pour ma dernière livraison il s'agit d'une grande usine chimique. Je dois attendre 15h pour une nouvelle séance de body building avec le fidèle trans-pal manuel. Ce dernier pousse le vice jusqu'à soulever la charge au compte goutte malgré toute le vigueur de mon acharnement. Je m'énerve sur les 15 palettes une à une.

A 16h pétante la semi est vide. Un rechargement est déjà au programme chez un transporteur: je reviens sur Barcelone.
Je ne sais pas vraiment sur quoi je vais tomber en entrant dans la Zona Franca, j'espère simplement ne pas perdre trop de temps pour ne pas couper ici.
Je me rassure en voyant que la boite est de "dimension humaine", et que je passe à quai sans attendre. Sur le chariot il y a un vieux type pas très vaillant, d'autant plus lorsqu'il parle ou chante tout seul. Il est drôle. Il me chante dans les oreilles, comme ça, tout naturellement... et moi je le regarde, je l'écoute, je suis fasciné. Le roulage des R est toujours aussi impressionnant, ce n'est pas la première fois que je tombe sur ce genre de cariste expert en la matière.
Il chante bien, certes, mais il est surtout très mou : j'attrape un tire-pal manuel et je m'occupe de ranger les palettes dans la semie pour qu'il se concentre à faire les aller et retour dans l'entrepôt.
L'opération dure plus de deux heure et je décide d'attendre une heure de plus pour que ces trois heures consécutives me permettent de faire 9H de coupure équivalentes à 11H ce soir.

Facile d'entrer dans la Zona Franca... impossible d'en sortir! C'est à n'y rien comprendre : je tourne en rond pendant un gros quart d'heure, je m'énerve, le GPS m'indique n'importe quoi. Et puis soudain la délivrance : l'AP2, l'AP7 - direction Girona.

Je ne peux aller plus loin que l'aire de Montseny, je me pose dans l'entrée, près des pompes, sur une place qui semble correcte mais je tends tout de même une sangle entre les portières, je suis bel et bien parano.

un LKW Augustin dépecé

Tarragona

il me fait peur avec son gros chariot...

Barcelona

à quai

Mercredi 25

Départ 6h10, AP7, retour en France. Je roule dans le noir jusqu'à la frontière, ensuite j'ai le soleil dans les yeux : le pare-soleil du Magnum, bien conçu pour le coup, me permet d'y voir à peu près clair. Je croise le Suédois juste avant Béziers, on se fait coucou, on se prend en photo, on est content.
Toujours sur l'A9, je me fais rattraper par un scania bleu qui dois supporter ma vitesse de croisière ahurissante - 88 km'h - le temps d'une zone de travaux comme il y en a tant entre Jarcieu et Barcelone. Lorsque l'autoroute redevient à trois voies, le Scania me double, puis me klaxonne... dans le rétro je peux lire "olonam" : il s'agit bien de Manolo84. IL tombe bien, j'avais envie d'un café! Nous nous arrêtons faire connaissance, le temps d'un quart d'heure de coupure sur l'aire de Béziers. Nous repartons, j'arrive à suivre Manolo pendant au moins 2 minutes puis j'abandonne...

Je fais la demi-heure complémentaire sur l'aire de Nîmes : station Avia, toute neuve. Je paie ma douche 2 euros, la caissière m'ouvre la porte à l'aide d'une pièce de 5 centimes... la prochaine fois je le saurai : inutile de passer par la caisse, j'irai ouvrir avec ma propre pièce.
Et quelle désillusion! les douches sont neuves, aucun doute; par contre elles sont réduites au strict minimum : un box avec un pommeau et des portes-manteau; pas de toilettes, pas de lavabo, pas de miroir, pas de chaise, pas de place, nous sommes bien en France : on pourrait s'inspirer du modèle Allemand où les sanitaires sont toujours au top, mais non, en France on fait des box pour laver les routiers... comme pour les chevaux.

Je laisse mes affaires, je referme avec une pièce, et je vais aux toilettes. Yannick Noah nous offre sa dernière soupe humaniste à fond dans les hauts-parleurs, ça aide. Il parait qu'il faut s'aimer les uns les autres et que la guerre c'est pas bien... bon sang je suis sur le cul.
Douche dans le box, une demi-heure s'écoule, je repars.

"A votre écoute, coûte que coûte", 12h20 sur France Inter, la dernière émission qui se veut comique mais qui s'avère vraiment nulle. Au secours! je ne sais plus quoi écouter! Si persiste à zapper sur France Culture je vais vraiment devenir ce "routier-bobo-écolo-pseudo-cultivé", et on va se foutre de ma gueule.

Pas de pause déjeuner : je monte direct à Saint Priest pour décharger mon premier client à 14h. C'est un peu la panique sur cette plateforme : j'en vide et j'en reprends, il y a un tire-pal pour 3 chauffeurs, j'ai la chance de l'avoir et la pression des autres qui se battent pour le récupérer. Bref, je passe une petite heure ici à me dépécher, je fonce ensuite sur Chaponnay pour vider la suite. Changement d'ambiance : ici on bosse avec la musique à fond, les gens sont relax, on se croirait chez des potes...

Je retourne à Jarcieu, je termine ma journée avec 8h51 de volant, je dors dans la cour.

le jour se lève sur l'A9

ça touille du café avec Manolo

 

Jeudi 26

Ce matin c'est la vidange! je file chez Renault Saint Vallier en solo, puis comme j'ai quelques heures devant moi je pars à la recherche d'un endroit pour me poser dans le centre-ville (ou plutôt centre-village). Je me ballade un moment sur les berges du Rhône et lorsque j'en ai marre je pousse la porte d'un café pour me poser avec mon ordi tel le "routier-bobo-écolo-pseudo-cultivé". Manque de bol - mais je m'y attendais un peu -, ce n'est pas l'endroit idéal pour peaufiner son carnet de bord : il y a l'écran géant avec les derniers clips pourris de DirectStar juste à côté de moi, et puis de l'autre côté il y a Bébert, Josette et Raymond qui racontent des trucs pas très intéressant comme : "bah oui, te vois ben, quand t'as mal au pied c'est pas facile parce que t'es toujours appuyé dessus..." Oui Josette, c'est effectivement vrai...

Tiens, Corneille fais un duo avec La Fouine... génial! Allez c'en est trop, je retourne chez Renault Trucks à pied.

Le camion est prêt à midi : plus de trois heures pour faire une vidange, j'aurais peut-être moi-même fait mieux.
Je reviens à Jarcieu, j'attelle une tautliner et j'attends un moment dans la cour avant d'aller charger des arbres à quelques centaines de mètres de là.
“Pour réussir sa vie, un homme doit faire un enfant, écrire un livre et planter un arbre.” a dit Compay Segundo ou Jacques Seguela - je ne sais plus. J'en déduis que les gens qui travaillent là où je charge aujourd'hui ont un fort potentiel d'accomplissement du fait qu'ils plantent des arbres toute la journée... il leur suffit de s'adonner à quelques occupations gymnastiquatoires en dehors de leur travail puis de lire la version reliée du carnet de bord de Phil 26 pour atteindre la consécration ultime.

Une fois ma trentaine de petits platanes chargés, je fais le voyage du siècle : Jarcieu - Jarcieu. Oui, du transport communal, ça arrive.
Je pose cette semi dans la cour et je m'exerce à quelques occupations de manutention pour finir la journée.

Le soir nous nous retrouvons une petite équipe pour aller manger à Sonnay, bonne ambiance au menu.

vidange

carnet de bord

Tps Brenier

chargement d'arbres

Vendredi 27

Réveil à 5h15. Difficile de se trainer jusqu'à la douche. Dans la cour tout le monde dors : Hollanden, Dridri, Hubert, et deux affrètés. J'essaie de me faire discrèt... Quoique je mettrais bien un coup de trompes en passant devant le FH d'Adrien, comme ça, juste pour lui faire plaisir.

Ce matin je vais faire un relais à Corbas et avant toute chose je m'arrête sur l'aire de Communay pour acheter une paire de gant, une énième paire de gant, suite à un énième oubli quelque part.

Relais à l'AS24, Corbas. Je récupère une semi chargée pour Roche-la-Molière (42). Il y a du poids sur l'avant, je peine à "passer dessous" pour l'atteler... la tartine de graisse posée hier par le généreux mécano de chez Renault trucks se retrouve sur le chassis, super.
Je livre dans une boite spécialisée dans la fabrication d'une pièce du siège d'un modèle de chez Renault. Une énorme usine pour une pauvre pièce en tole... On croirait un reportage de Groland sur l'usine qui fabrique un bout de cable de frein de solex depuis 1954...

Vide je reviens à Jarcieu. Repas à Sonnay, le désormais traditionnel.
L'après midi je recharge un complet de sac d'urée dans une tautliner : autant dire que je ne me ferai rien voler ce week end... quoique... plus rien ne m'étonne - dixit Orelsan.

chuuut, y'a Dridri qui dort...

St Etienne ou la déprime totale

la photo - Sweden de la semaine

Samedi 28
Dimanche 29

Lundi 30

La semaine dernière à Auxonne, cette semaine entre Gray et Vesoul. Oui, le lundi rime avec évasion, avec à chaque fois une contrée reculée sur les bords de Saône. Pour donner une touche encore plus glamour, je livre aujourd'hui des big bag d'urée sèchée, un produit qui sert d'engrais pour faire pousser les chocapic.
Départ 7h, à la fraiche, pas trop rassuré par cette neige qui tombe timidement et teinte à peine le paysage au lever du jour. Mon destinataire : une ferme. J'appelle, je m'annonce pour 9h, comme prévu, puis je prends des nouvelles du temps là-haut, le paysan me rassure : "juste une neige qui tombe timidement et teinte à peine le paysage au lever du jour". C'est dingue.

Je traverse Gray, puis je roule quelques kilomètres biens tordus pour atteindre la GAEC, toute croisure étant impossible sur les routes étroites.
Le déchargement n'est qu'une simple formalité grace au manitou télescopique : j'oriente des "hanses", le paysan les attrape, un vrai travail d'équipe. Je suis vide à 10h.

Je recharge à Beaune et j'ai la malchance d'arriver à 11h45. Le cariste m'explique que 10 minutes plus tôt c'était jouable, mais que là il a vraiment trop la dalle... donc il faut attendre 13h30. Peu importe, moi aussi j'ai la dalle.
13h30 précise le revoilà. A peine un quart d'heure et c'est complet : 24 tonnes de plastique pour bien tenir la route sur les routes glissantes. Bien.

J'appelle le destinataire, à Bourgoin Jailleu, pour m'annoncer en fin d'après midi... mais il m'informe que les livraisons se font uniquement le matin. Donc mardi 8h, pas avant. J'ai tout le loisir de prendre mon temps alors je descends par les petites routes, en me demandant si l'autoroute ne serait pas finalement plus rentable vu que je suis chargé lourd. Bref. L'avantage c'est que je peux me permettre de m'arrêter faire mes courses chez Intermarché Feillens, car j'avais peur qu'on me reconnaisse à Atac Pont de Vaux : je suis sensé être un routier de l'extrème à l'autre bout du monde pour tous ceux qui me connaissent, j'ai une réputation à préserver.

Je roule laborieusement jusqu'à destination. Je me pose devant le portail de l'entreprise, il fait froid, mais ce n'est qu'un début.

campagne Haute-Saônnoise

Régis à la ferme

Gray

le chauffage à fond

Mardi 31

Drôle d'impression au réveil : c'est tout blanc! Au début, naïvement, je suis content. Comme si j'allais faire des bonhommes, de la luge, des batailles et surtout rater l'école! Mais je me ravise très vite, force est de constater que je n'ai plus 9 ans, la neige "merveilleuse" est sensé être un souci dans ma vie de vingt ans plus tard; ça craque sous les pieds, c'est déjà ça.

Bonnet visé sur la tête, avec pompon au bout, je me présente à la réception en "aventurier qui à bravé la neige pour venir livrer". L'accueil est glacial. Manifestement je suis embarrassant avec mes palettes car on ne m'attendait que le 02 novembre :
_"Bon sang, c'est pas vrai, c'est du harcèlement, déjà votre chef m'a appelé hier pour vider à tout prix!!!"
_"non ce n'est pas mon chef qui a appelé hier, c'est moi, juste pour savoir quand est-ce ce que je pouvais venir..."
On croit rêver. Du "harcèlement" me sort-il! Je viens le "harceler" avec ma livraison! Encore, si le quai était plein à craquer et les caristes débordés... mais rien du tout : il y a de la place et ça boit du café entre deux complaintes météorologiques. Déconcertant.
Et puis lorsque je demande s'il y a du sel ou une pelle pour dégager la fosse enneigée on m'envoie bouler, on me dit de reculer car "ça ne craint rien". Ces même types vont m'apprendre mon métier...
Après avoir vidé, comme prévu je dois gratter le sol et jouer du différentiel pour me sortir de la galère. Bande d'enfoirés.

Je roule une bonne heure sous la neige pour aller recharger des tuyaux. C'est à peu près dégagé, tout le monde roule entre 60 et 70 et ce n'est pas pour me déplaire vu que le camion n'accroche pas des masses à vide.
Mon rechargement est un casse tête géant qui consiste à faire tenir des rouleaux de toutes dimensions les uns sur les autres, dans tous les sens. Nous passons plus de deux heures là dessus, je termine à moitié gelé.
J'ai beau retendre la bâche et mettre des planches, la semie ressemble à une montgolfière. Rien de bien grave : le chargement se tassera tout seul en roulant.

Je ramène la taut au dépôt et j'attèle le vieux plateau, le 229, chargé d'une bonne couche de neige. Je repars aussitôt à Aix les Bains pour charger une charpente. J'hésite : par Lyon ou par Grenoble? Où vais-je me retrouver coincé sous la neige? plouf plouf... allez, direction l'A48.
Je ne suis pas très fier avec mon plateau tout nu... j'aurais préféré un complet de parpaing. Ca glisse mais ça roule. Prudemment. En arrivant sur Chambéry ça glisse encore plus, en témoigne cette pauvre automobiliste échoué dans le rail central dans la descente du tunnel de Dullin. J'arrive doucement à Aix, je charge ma "charpente" qui n'est pas un bout de toiture comme je l'imaginais mais un pauvre cadre en ferraille dont on se demande bien comment il faut le sangler pour qui passe le premier rond point... Encore un casse tête.

Même route en sens inverse : je retourne au dépôt. Je n'ai pas réussi à caser une coupure à Aix et le tachy s'emballe alors que je suis à deux pas de Jarcieu... Je me retrouve à rouler tout stressé sous la neige parce qu'il me faudra peut-être - au mon dieu - 4h31 pour rentrer. N'importe quoi. Finalement ce sera 4h34, parce que j'ai définitivement envie de profiter de la douche Duarig plutôt que de poireauter à Lapeyrouse en regardant l'horloge. Une douche à 135 euro? l'avenir nous le dira dans les 28 jours.

Avec Philippe nous complètons mon chargement et nous posons une bâche.

Je décolle en soirée, toujours avec mon plateau, à destination de la Belgique et de l'Allemagne.
Stop à Gevrey Chambertin, 8h50 de volant.

surprise ce matin

piano piano

et je recharge dehors...

...des trucs bizarres

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