J'ai eu une idée de génie. Enfin de génie, c'est quand même cette idée qui m'a emmenée où je suis actuellement, c'est à dire en prison.

Pour avoir un peu plus de marge, il suffisait de se passer des intermédiaires, c'est tout. Donc je devais acheter ma ferraille, moi-même en Bretagne et la revendre directement en Espagne. Chose dite, chose faite, ce ne fut pas trop compliqué de négocier avec les ferrailleurs Bretons et les usines en Espagne que je connaissais. L'affaire et l'idée étaient, je qualifierais de géniales et rentables. Pour l'être encore plus, il suffisait de court-circuiter l'état Français et ses charges sociales, et fiscales. Donc à ce niveau, il n'y avait pas trente six solutions mais une seule, le Luxembourg.

En une demi-journée, la Société « ARABIAN LINES », était née. Capital social versé, numéro de registre de commerce, comptes bancaires ouverts, tout était prêt pour fonctionner. Par la suite, ce fut un plaisir de travailler au Luxembourg. Il n'y a pas de fonctionnaires véreux à essayer de faire chier le monde. Là bas, tout est étudié pour le travail et la rentabilité.

Le schéma de mon activité était simple, il me suffisait d'acheter la ferraille en Bretagne comme d'habitude, mais au lieu de la vendre en Espagne, je la vendais à ma Société au Luxembourg, avec un minimum de bénéfice. Puis la Société du Luxembourg la revendait en Espagne, avec elle un maximum de bénéfice commercial. Voilà, ce n'était pas compliqué. Pour les raisons invoquées plus haut, il était évident, qu'il fallait mieux avoir le maximum de bénéfices au Luxembourg, plutôt qu'en France.

Par la suite, le volume d'affaire avait évolué, je me suis résolu, à affréter à mon tour d'autres camions, dont mon collègue qui avait la même remorque que moi, et qui donc convenait parfaitement au transport de notre 50 étamé. Je n'achetais d'ailleurs que cette catégorie de ferrailles. Dans mes contrats d'achats, j'avais l'obligation de vider le stock des ferrailleurs, pour le dernier jour du mois. Le cours de vente de la ferraille se faisait tous les mois, je jouais la dessus pour la revente. Il me fallait donc stocker, c'est pour cela que j'avais acheté un terrain dans la zone artisanale de Noyal. Terrain qu'il a fallu aménager avec plate forme en béton armé, et mur de soutien ferraillé au maximum. De plus l'achat d'une grue à griffe devenait indispensable pour pouvoir recharger les camions. Souvent, ce fut Sébastien qui avait alors dans les 11 ans au début, qui était aux commandes de la grue de 25 tonnes. Il chargeait mon camion, et moi j'étais sur la passerelle de la remorque pour le guider, afin de lâcher la ferraille au bon endroit. Il travaillait bien le con. Il chargeait même mieux que moi. Il avait l'œil. A onze ans quand même, il faut en vouloir, j'étais fier de mon gars.

En 1997, Jeanne et moi avions été à Paris, Porte Maillot au salon Mondial de la coiffure. Après avoir visité les stands, nous rejoignons la voiture, dans les parkings en sous-sol. Au hasard des couloirs, nous nous apercevons, qu'il y avait aussi un salon de la voyance, dans le même bâtiment. N'étant pas un adepte invétéré de ces croyances, je ne sais qu'elle force m'a poussée à demander une consultation à Madame Sabbath, une jolie femme, d'origine Marocaine, qui faisait des consultations.

Ayant bien pris le soin de ne rien dévoiler de ma personnalité, afin de savoir vraiment si elle avait des dons, je me suis retrouvé proprement sur le cul, quand elle a sortie tout mon passé. Mon travail, mes enfants, mes parents séparés etc.… J'en suis reparti tout bouleversé.

Par la suite, ma mère s'est adressée à elle par courrier, avec une photo ancienne, elle a reçue un dossier correspondant exactement avec ce qu'elle avait vécue à la période correspondante à la photo.

Plus tard, j'ai eu l'occasion dans trouver une autre qui habite à Surzur. Elle est devenue notre amie, car nous l'avons souvent consultée depuis le début de mon affaire. Ses prédictions se révèlent efficaces, pour l'instant. Il y avait eu des choses étranges, qui se sont révélées par la suite exactes, entre autres l'accident de Sébastien. Quant aux lettres anonymes, dès le début, elle nous avait indiquée de qui elles provenaient, maintenant que nous avons les preuves, tout correspondait.

Au Luxembourg, j'avais acheté une voiture, une BMW 525 TDS, au frais de la Société, la loi m'y autorisait, et de plus, le coût d'achat de cette voiture passait dans les frais généraux, avec TVA récupérable. Ce n'est pas en France que l'on verrait cela. Mais comme elle était immatriculée au Luxembourg, cela avait fait jaser à Noyal. D'autant plus que les camions commençaient à circuler un peu plus souvent que d'habitude, pour aller à la zone charger. Donc cela devait gêner les jaloux, suivez mon regard. Tout ces mouvements de matériels avaient certainement du aider au déclanchement de mon affaire. Parallèlement à tout cela, j'avais fait faire une peinture sur mon camion, qui relatait mes expéditions au Moyen Orient, et le nom de cette peinture était « Nostalgie des années 70 ». Nostalgie, car j'ai toujours rêvé d'y retourner. Je me suis toujours dit, que si un jour ma femme disparaissait, décès ou divorce, je reprendrais la ligne, mais elle est toujours là, et maintenant, vu mon âge, serais-ce bien raisonnable ?

Au cours d'une semaine de vacances, où nous étions partis en Alsace, nous avons eu l'occasion de voir des touristes Allemands en trikes. Un trike est une sorte de moto à trois roues, à ne pas confondre avec un side-car. Pour moi, cela avait fait tilt. Moi qui était un fana de motos routières de mon époque, et qui ne trouvait pas de goût pour les machines aseptisées actuelles, j'avais trouvé ce que je voulais. Les trikes n'étaient pas homologués en France. Enfin presque pas, car mon beau-frère, (le mari de ma sœur, pas les frères de ma femme), qui était un ravagé de motos aussi, avait vu un article sur un gars qui essayait d'en homologuer un qu'il avait construit avec un moteur Renault. Ce gars habitant en Lorraine, j'avais été le voir, lors d'un voyage en voiture au Luxembourg. Avec sa petite équipe, il devait présenter son trike au salon de la moto à Paris. Mais le trike n'était toujours pas homologué. Au salon, j'avais rencontré Gérard Grisard, le commercial officiel, qui reprendra la suite de l'affaire. J'ai donc versé mon acompte de 25 000 FRF, afin d'une part de les soutenir financièrement, et d'acheter un trike, dès qu'ils seraient homologués. Comme quelques futurs clients, j'ai attendu un an avant de l'avoir. Le jour J, c'était donc en train, que Sébastien et moi, ainsi qu'un jeune couple de Belz, avions pris le chemin du Mans, afin de prendre possession de nos bêtes. Dément, les sensations. C'est carrément sublime.

 

page 26 /32