FDR - Carnet de bord
Carnet de bord de Octobre 2014 Partager sur Facebook
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  • Jarcieu, 1h
    dans les ruelles bordelaises
    technicentre Aquitaine
  • Mercredi 1 Octobre 2014
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    Il est 1h du matin, Jarcieu, je bois mon café dehors, en terrasse. Silence absolu, parfois percé par quelque cri d'animal noctambule qui essaie de me faire peur. Il doit faire 17 ou 18 degrés et je suis pénard, là, avec ma tasse, le cheveux encore humide de la douche, et le dessous de bras bien frais. Il s'agirait de se mettre au travail : je ne me suis pas réveillé à minuit et demi uniquement pour regarder dans le vide et écouter les chouettes. Je démarre et file discrètement afin de ne pas réveiller les copains qui dorment.

    Cap à l'ouest. D'aucun diront que j'y suis en permanence, à l'ouest... donc cap encore plus à l'ouest. Je vais à Bordeaux, au "technicentre SNCF Aquitaine", tout un programme.

    Par où va-t-on à Bordeaux au départ de Jarcieu ? Plusieurs choix possibles : Mon imbécile de GPS tente de me convaincre de passer par Toulouse, en vain. Je préfère faire au plus court, quitte à ne pas faire au plus plat : direction Clermont - Brive - Périgueux .
    Quelques zones de travaux animent mon parcours mais dans l'ensemble ça roule, ça roule tout seul, ça roule tranquille, je n'ai pas sommeil.

    En quatre heures et quelques je fais connaissance avec la nouvelle aire de Chavanon, près de la Bourboule, où l'on a planté une station sur un ancien parking insignifiant. Pas mal, ça manquait dans le coin. Pas mal, sauf ces saloperies de places en épis. On a l'impression que les chargés d'études sur la réalisation de nouveaux parkings ont découvert soudainement la place en épis ?
    Isaac Newton s'est pris une pomme sur la tête et en a déduit la loi de l'attraction universelle - Michel Boulachon s'est entravé dans un champ de blé, il est devenu créateur de parking...

    En évoquant La Bourboule, j'ai une pensée émue pour "La Boule" de Fort Boyard qui nous a quitté hier... mais je m'égare et j'écris vraiment n'importe quoi.
    Je bois un nouveau café sur cette aire de Chavanon. L'endroit est désert, il n'y a qu'une pauvre mouche pour profiter des miettes de mon pain au chocolat, une pauvre mouche dont on se demande bien ce qu'elle fout là, à quelques centaines de Km de Pomezia.

    Je repars et traverse Creuse, Corrèze, Dordogne dans un épais Brouillard ; le jour peine à se montrer.

    Je n'ai pas de RDV au Technicentre, du moins je n'en ai pas la connaissance. Je prévois d'y arriver à 11h.
    Ce n'est qu'à hauteur de Libourne qu'un franc ciel bleu finit par s'imposer, effaçant d'un trait cette chaotique nuit Auvergnate.

    Les choses sérieuses commencent. L'adresse que j'ai n'a pas l'air facile, comme souvent avec les technicentres SNCF : centre ville, vieilles infrastructures, jamais de place pour se garer, et rien pour faciliter l'accès aux camions.
    Pour le coup l'accès au centre Aquitaine est vraiment pourri, sans le GPS je n'y serais pas allé, avec, j'avais l'impression de me tromper. Il est 11h et je suis à destination. Il y a un autre camion dans la toute petite cour pleine de voitures. Apparemment nous nous sommes trompés tous les deux d'après le réceptionnaire : il faut livrer à l'autre entrée, Boulevard Albert1er, "et attention c'est très très fin pour entrer dans la rue" nous met-il en garde. Certes... moi on m'avait donner cette adresse.

    Va pour Albert1er....
    Et effectivement, c'est "très très fin", on n'a pas idée de tourner là dedans en camion... mais c'est l'accès officiel ! D'après le mec il devait y avoir de la place pour se garer dans la rue, il n'y a rien du tout, je me case sur la droite, comme je peux. Mon collègue n'est pas derrière... j'apprendrais plus tard, en le voyant enfin arriver, qu'il n'a pas oser tourner à l'intersection, persuadé que j'étais en train de me tromper.

    Il est 11h15. Il faut maintenant attendre 13h. J'aime.
    Nous sommes dans une impasse avec barrière SNCF fermée au bout. Deux autre camions arrivent d'ici 13h et ça devient un sacré bazar.
    Débarque alors le gros con du jour. Un type dans une 307, jeune, armoire à glace, l'air énervé... il s'arrête à ma hauteur tandis que je discute avec le collègue de derrière :
    "C'est à vous les camions ?! faut pas rester là, vous voyez pas que vous emmerdez tous le monde ?!"
    Dès cette phrase de présentation je comprends qu'il n'y a que très peu de matière grise là dedans, et comme pour m'achever il poursuit :
    "non non vous reculez, je suis de la police nationale, faut pas rester là"
    Comment rester calme ? C'est vraiment difficile. Commençons par la base : je lui montre le portail fermé devant ma calandre, puis les trois autres camions derrière... afin qu'il comprenne qu'il n'y a aucune manoeuvre possible. J'enchaine en tentant de lui expliquer que je ne suis pas dans cette rue pour le plaisir de la boucher, mais afin de faire mon travail, à savoir décharger de la marchandise chez des gens qui me maintiennent dehors parce qu'ils sont en pause. Quand à faire ressortir 4 camions à contre main, sur un boulevard sans visibilité, entre les murs étroits... on peut le tenter - il faudra toute l'après midi je pense.

    Bref, un pur abruti, qui ne comprend strictement rien à notre métier... il finit par dire "bah fallait pas vous engager dans la rue"...
    Je suis bête aussi ? mon destinataire est Boulevard Albret1er... pourquoi je n'irais pas y livrer dans la Zone de Bègles, et puis merde, pourquoi être venu à Bordeaux, j'avais qu'à y décharger au technicentre de Lyon ?

    Et dire que des cons comme lui nous mettent des PV sur les routes...

    Il finit par se barrer, persuadé d'avoir raison, persuadé que l'on a rien à faire ici et que les routiers sont vraiment de gros emmerdeurs. Je reste consterné par cette rencontre.

    A 13h30 on nous ouvre enfin la barrière, je vais décharger en traversant un parcours du combattant fait de pièges multiples en haut, en bas, à gauche, à droite.
    Cette journée et surtout cet environnement commencent à me stresser sérieusement.
    Au moment de partir c'est le camion qui s'y met : voici que le témoin d'alerte "frein de parc déverrouillé" ne cesse de retentir, comme si le camion était arrêté et que j'avais effectivement oublié de le verrouiller... or je suis en train de rouler.
    Bref ça hurle dans la cabine dès que je roule sous les 10km/h... J'ai beau éteindre et rallumer le camion, rien n'y fait.

    Je ressors de l'impasse en coupant un terre plein, devant les automobilistes grincheux : je ne peux pas sortir autrement.

    C'est incroyable cette sensation de faire chier la terre entière alors que je fais mon travail, consciencieusement, depuis 1h ce matin...
    ça fout la rage, tout comme cette alarme à la con et ce frein de parc automatique révolutionnaire. Révolutionnairement nul.

    Je termine ma journée avec 9h59, manoeuvre comprise,  sur l'aire d'Onesse-et-Laharie, en compagnie de mes collègues Roumains, Hongrois, Polonais, Bulgare et Tchèques. Pas de Français, plus de Français, c'est finit tout ça, quelle idée de s'acharner à faire un boulot de pestiféré.

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  • Pays Basque
    les quais pourris espagnols
    Bayonne
    Bordeaux
  • Jeudi 2 Octobre 2014
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    Celui de droite a fait tourner le moteur un bon quart d'heure vers 3h du mat, celui de devant encore plus longtemps un peu plus tard... bref j'ai très bien dormi.
    Non je ne décolle pas à 1h ce matin, mais à 4h42 précisément. Je vais à Amorebieta, près de Bilbao.

    C'est incroyable cette spécialité espagnole de pondre des adresses à la con. En faisant un peu d'Espagne, j'ai l'impression de revenir 10 ans en arrière, à une époque sans GPS, sans Google, avec la carte et le flair comme ultime recours.
    Mon premier client par exemple, n'existe nulle part : rue introuvable, pas de nom de zone, aucun indice malgré tout ce dont je dispose.
    J'arrive à Amorebieta et j'y vais donc au pif : je tente une première sortie sans succès, je fais vite demi-tour avant de m'enfoncer dans la pampa... je reprends l'autoroute. Comme par enchantement, il y a une nouvelle sortie quelques Km plus loin, avec une nouvelle zone d'activité, et mon client est là, immanquable, avec des lettres de 2m de haut sur un bâtiment énorme. Il suffisait de le savoir.
    Il est 7h30 et c'est fermé.
    J'ai une palette qui se trouve dans la remorque à sortir : en voyant le quai je prie pour qu'il y ai un chariot élévateur.

    8h15, on m'ouvre. J'ai positionné le camion devant la rampe, j'ai ouvert ne porte latérale avec la palette juste en face, je n'ai rien a expliquer au type - juste à montrer du doigt en disant un truc du style "descarga un palette ?". Je suis parfaitement bilingue.
    Le mec me sort une espèce d'explication qui semble signifier qu'il n'a pas le droit de sortir avec le chariot... mais je fais mine de ne rien comprendre, et comme je bouche le passage il finit par faire les 20 mètres dehors pour prendre la palette.
    Ma performance d'acteur me fait gagner un quart d'heure de manoeuvre.

    Il me reste une palette à décharger en remontant, à Irun. Une zone escarpée, une petite boite dans une impasse, je trouve le client en demandant non pas à mon GPS (qui est décidément nul en Espagne) - mais à des vrais gens, toujours comme en 2004.

    Il est 10h, je suis vide, tout s'est bien passé.
    Au programme : Technicentre SNCF Aquitaine. Il s'agit de recharger ce que j'ai laissé hier, et de le ramener à Maclas. Je m'annonce pour 14h.

    Je remonte tranquillement, m'arrête manger sous l'ombre d'un grand pin des Landes, et entrevois Bordeaux paisiblement, sachant où aller et comment ça va se passer.

    13h45, je suis en place, nous chargeons.
    Le temps d'ouvrir et fermer toutes les portes, de sangler et de changer de T-shirt, il est déjà 15h. Je reçois une ultime mission, initialement prévue pour demain : charger une machine près de Bergerac. Je quitte le technicentre, en passant comme hier sur le terre-plein, cette fois-ci en charge donc vraiment tout doucement : impossible de sortir autrement.

    J'ai les heures pour tenter Bergerac, alors je tente, et je fais bien. Nous chargeons la machine ce soir, le chef de la petite boite de réparation revient exprès sans même que je lui demande, parce que "bah on va pas vous laisser planter là quand même ?!" ce sont ces mots. Super sympa !
    Du coup je ne plante pas là, mais 10 km plus loin dans une petite ZA... 9h de volant tout pile et une bonne place sous un lampadaire.

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  • Auvergne
    douche pour laver les chiens chez Total
  • Vendredi 3 Octobre 2014
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    Régis ou l'art de se tirer une balle dans le pied.
    Le chef m'a dit "y'a qu'à rentrer à la maison". Je pouvais donc techniquement me retrouver vers 10h du matin ce vendredi à Mâcon. Seulement remonter à Mâcon, pour redescendre à Maclas lundi, ça fait un sacré détours avec toutes ces tonnes de leste et autant de gazole à cramer. Je suis soucieux de mon bilan carbone merde quoi ! J'ai donc proposé en réponse d'aller vider à Maclas, quitte à refaire une coupure... en partant tôt l'idée étant de mettre en coupure tôt pour être dans la soirée tôt à la maison.

    Seulement si c'est un écolo dans l'âme, Ray n'en est pas moins un imbécile qui éteint son réveil avant de se rendormir, ce matin, à 3h.
    Du coup, en me réveillant à 5h je vais être à Maclas après midi, il faudra donc attendre 14h... mon plan foire complètement et je prévois de rentrer bien plus tard que ce soir à la maison.
    Bravo...

    Je roule en direction de Maclas, agacé par moi-même.

    Le soleil se lève magnifiquement sur l'A89, sur le Limousin et sur l'Auvergne, dans un éventail de couleurs belles et émouvantes, à l'instars de la chronique de François Morel de 8h55 qui me scotche à mon siège et me rassure sur l'Etre Humain.

    Aire de la Limagne, quelques Km plus loin : voici une douche absolument dégueulasse pour laver les routiers. Et la caissière m'a prévienu :"y'aura pas beaucoup d'eau chaude"... ce à quoi j'ai enchainé "ha cool, bah je ne paie pas alors ?" et je n'ai effectivement pas payé.
    En ramenant les clés, cette dernière me demande : "alors ? c'était comment ?" toujours allusion à la température de l'eau. Et moi de répondre : "c'était sale, très sale".  "A mais vous savez, c'est très vieux ici, on n'arrive pas à entretenir"
    Mouai... une serpillère et de l'eau de javel ça fait des miracles.

    Bref, n'y allez pas c'est pourri.

    J'escalade la côte de Thiers à 40Km/h, pendant que dans l'autre sens les motards courent après les routiers qui descendent au delà de 50.
    Je suis à deux doigts de m'arrêter manger au relais des gorges mais le parking est blindé... pas envie de me tordre sur la N86 devant les spectateurs attablés. Je trace, et j'arrive à destination à 13h30.
    C'est Laurent qui me décharge, et qui me paie le café, sympa.

    Alors que je pensais rentrer pénard à Jarcieu, j'écope d'un ultime chargement, chez Scandex, à Reventin-Vaugris.
    Que dire de Scandex qui n'a pas déjà été dit ? Rien, je suis fatigué. Je m'illustre devant les Bulgares en sortant une reculade parfaite pour m'aligner sur un quai pas forcément évident. Un cariste sympathique s'occupe de charger, une gentille dame me donne les papiers, il est 17h, je me sauve.

    J'arrive à Jarcieu avec 8h30 de volant. Je laisse le camion ici pour le week-end, un mystérieux taxi vient me chercher.

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  • c'est reparti de nuit
    coupure à Santa Oliva
  • Lundi 6 Octobre 2014
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    Un mystérieux taxi m'a déposé au dépôt ce dimanche soir. J'y ai retrouvé mon camion en train de se faire autocoller les fesses par de grands stickers "DUARIG TRANSPORT" : on travaille même le dimanche à Jarcieu.

    Après une courte nuit dans la couchette me voici d'attaque ce lundi matin, 0h30, devant la machine à café, regardant couler le précieux breuvage sensé stimuler mes neurones pour la nuit.
    Castagnette est là, lui va se coucher avant d'amener à son tour 20 tonnes de tournesol pour les petits oiseaux de Bourg en Bresse qui ont déjà fini leur gamelle de la dernière fois.

    Je décolle effectivement à 1h17. Direction le Sud, l'Espagne, c'est d'ordinaire du boulot d'Alain26 ou de Phil26, aujourd'hui c'est pour Ray26.
    La descente est tranquille, je suis seul sur la majeure partie du voyage qui m'amène, pour commencer, sur l'aire de La Palme - une heure de sieste.
    Le café est bien crade, je repars avec ce gout de chaussette amère, le jour se lève tout doucement et j'entrevois déjà la frontière.

    Les choses sérieuses commencent : il faut faire 3 passages en douane à La Jonquera. Concrètement : donner 3 CMR à une employée administrative et attendre qu'elle les rende. J'arrive pile pour l'ouverture, je peine à me garer, la rue étant squattée par des copains de l'est garés partout, avec linge qui pend au rétro et restes du barbeuc devant la calandre.

    8h30, je repars. Je transpire une demi-seconde lorsque j'aperçois un flic au milieu de la route qui rabat tous les camions sur l'aire d'autoroute de La Jonquière : il s'agit simplement d'un contrôle d'alcoolémie. Je souffle bien fort dans le machin... et le petit verre de crémant d'hier après-midi ne laisse pas même la moindre trace. Je poursuis ma route.

    J'ai cinq livraisons à faire, dont deux dans la zona Franca.
    La première est chez un dégroupeur. Je sors une magnifique manœuvre malgré la pression de tous les mecs qui passent dans la rue comme des sauvages ; mais le problème est de voir mon camion à quai beaucoup trop gros, ça dépasse, et j'appréhende de me faire balayer la cabine par ceux qui manœuvrent autour...
    Aussi je suis content de quitter les lieux, pour ma deuxième livraison chez Nissan, juste à côté.

    Je sais où aller dans l'usine (grâce à GPS26) mais la gardienne me dit d'attendre au portail. J'attends. Et ça traine sérieusement. Je m'impatiente, elle continue à me faire attendre. Dans ce genre de situation je regrette de ne pas parler plus de trois mots d'Espagnol. Le fait est qu'en voyant "carburant" sur mon CMR, la gardienne a cru qu'il fallait faire appel à l'escorte de pompiers pour aller livrer. Lorsque l'escorte en question est arrivée, le mec m'a dit un truc du genre "bah pourquoi tu nous appelles ? Y'a pas besoin de nous ?"
    Personnellement je n'ai appelé personne, et voici 40 minutes que je perds mon temps.
    On frise le drame lorsqu'enfin je peux entrer : Il est 12h50 et le mec qui décharge termine à 13h. En me voyant arriver il gueule, je ne comprends pas grand chose hormis qu'il parle de "corones"...  je suis perspicace, j'en déduis qu'il en a "plein les couilles", mais il décharge.

    Me faire engueuler parce que j'arrive tard, qu'il finit dans 10 minutes, que cela va lui en prendre 5, que j'attends depuis des lustres au portail, qu'il a fini sa journée et moi pas, alors que je suis dessus depuis 0h30... il faut avoir la foi.
    A l'instar de la très distinguée Ophélie Winter, Dieu m'a donné la foi. 
    Je fonce à Santa Oliva, pour livrer le troisième, un centre d'essai où l'on me fait encore attendre 3 plombes pour une palette. Peu importe, j'ai 9h30 de volant, je me trouve une place dans l'immense zone de l'Albonar et j'essaie de rattraper le sommeil en retard.

    Rude épreuve, il fait chaud, il fait moite, il y a du bruit.

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  • matin à Saragosse
    Alhama de Aragon
    Madrid, de loin
  • Mardi 7 Octobre 2014
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    Sursaut dans la zone de l'Albonar.
    Bordel, mon réveil n'a pas sonné : il est 4h30 - soit 1h après l'heure. Je trifouille mon portable et constate que l'onglet "uniquement le lundi" est sélectionné. Nous sommes mardi.
    Il est 4h30 donc, mais il aurait pu être 5, 6 ou 7h, il faut relativiser. D'autant que je n'ai pas de RDV pour mes deux livraisons restantes.

    Je quitte Santa Oliva et roule en direction de Saragosse.
    Le pire, c'est que je suis fatigué. Sur cette A2, tout seul, dans le noir, avec du brouillard. Je lutte.
    Après seulement 1h30 de conduite, je cesse de lutter : je m'arrête sur une aire pour un quart d'heure de profond sommeil.
    Je repars, et je me languis que le jour se lève car il n'y a strictement rien pour aiguayer mon esprit dans ce désert nocturne.
    Musique très forte, claques dans la tronche, rien n'y fait, j'ai l'impression d'avoir pris un somnifère, ou pire, de regarder "Vivement Dimanche" un dimanche pluvieux avec Line Renaud en invitée... J'ai carrément sommeil, et je suis sur le point de m'arrêter à nouveau. Heureusement Saragosse arrive et les premières lueurs d'un jour nouveau. Du violet, du rose, rouge, orange, des ombres d'éoliennes, des taureaux géants, des horizons lointains, le désert rocailleux... bon sang c'est magnifique. Et plus je roule, plus c'est magnifique.

    Ma première livraison du jour se situe à Alhama de Aragon, entre Saragosse et Madrid. Pour ne pas y arriver avec 4h15 de volant et le feu aux fesses, je fais ma demi-heure de pause au milieu de nulle part, en choisissant peut-être le pire restaurant de l'A2 malgré moi : parking défoncé, sale, café au distributeur, chiottes payants... tant pis.
    10h j'arrive à Alhama de Aragon, petite ville inerte et enclavée où seuls quelques grabataires se promènent près du centre thermal. Je laisse la remorque sur un grand parking à l'entrée puis file vider mes 5 palettes. J'ai l'impression d'être tout seul dans cette ville, personne ne roule sur l'ancienne NII.

    Je poursuis : direction Madrid, plus précisément Valdemoro, au sud de la capitale.
    Voici un bon bout de temps que je ne suis pas venu dans les parages, la dernière fois il neigeait. Aujourd'hui il fait beau, et ça roule très bien.
    J'arrive à 14h chez mon client, et il ne faut pas moins d'heure pour sortir 5 pal.

    Vide à 15h, j'ai pour mission d'aller recharger demain, près de Burgos. Une très bonne nouvelle : j'appréhendais un coin pourri de la banlieue madrilène, Burgos c'est mieux, je peux rouler jusqu'à un endroit avec douche si possible.

    Je trouve mon bonheur au terme de 8h58 de conduite, au milieu de rien, près de Cerezo di Abajo, une station Repsol-autogrill avec un immense parking derrière.
    Bonne coupure en perspective.

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  • Matin à Logrono
    épaves sur le parking des douanes, Irun
  • Mercredi 8 Octobre 2014
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    5h. Personne à l'autogrill, les tasses et les soucoupes souillées jonchent le bar, après un peu d'attente le serveur débarque, me sert un expresso que je bois rapidement avant de reposer la tasse et la soucoupe souillées avec les autres.

    Direction Burgos pour commencer, puis Logroño. Quelques gouttes viennent mourir sur le pare-brise, pas longtemps. Je roule dans le noir, profitant par moment d'un rayon de lune pour entrevoir les paysages apparemment superbes.
    Comme hier le lever du soleil est digne des meilleurs calendriers de la poste : Tout plein de couleurs sur les vignobles rocailleux en ligne de mire... éblouissant.

    J'arrive avant 9h à destination, pour charger... et surprise il y a 4 camions dans la cour, dont un container. Ici commence la longue attente du jour, à regarder passer les tracteurs avec leur cargaisons de raisins tandis qu'un cariste ultra mou, et un seul, s'occupe de charger les camions qui me précèdent.
    Il est 11h lorsque je passe enfin à quai ; et 13h lorsque c'est terminé. Comble de misère il y a une douane à faire à Irun. Cette journée n'avance pas.
    Je fonce à Irun, le pire serait de ne pas pouvoir faire les formalités douanières aujourd'hui.

    Le parking des douanes est gratuit, à condition d'avoir quelque chose à y faire. Je me gare sur une des places matérialisées au sol, et parce qu'il y a des bonnes vielles bordures en bétons derrière je dépasse dangereusement dans l'allée centrale, avec l'éternelle peur de me faire balayer la cabine. Pas le choix.
    J'ai de la chance, tout va très vite : à peine un quart d'heure chez le transitaire et je peux me sauver, sans même prendre le temps de m'arrêter acheter quoique ce soit dans les nombreuse boutiques pour Français de passage : alcool, clope, club... à croire que le Français de passage ne cherche que la débauche. Pas même une boulangerie pour acheter mon pain.

    Me revoici en France. Je ne pensais pas faire aussi vite à Irun et du coup j'ai le choix entre faire 9h ou 10h aujourd'hui.
    Je roule en direction de Bordeaux engoncé dans un flot pénible de crétins qui se talonnent sans rien lâcher. Alors moi-même je relâche à 80 de temps en temps pour regarder s'éloigner tout ce beau monde ankylosé du pied droit.

    J'arrive sur la rocade de Bordeaux avec 8h et quelques, je file direction Angoulême. J'aimerais ne pas faire plus de 9h aujourd'hui mais je ne trouve pas parking à mon goût, alors, un peu agacé, je roule jusqu'à Barbézieux où j'échoue avec 9h35 précises. Pas mécontent de me retrouver là finalement.

    Je ne suis pas un habitué des lieux, mais ce centre routier présente bien. Autant je ne mange pas souvent au resto, autant j'approuve le système le parking gratuit à condition de consommer, ça évite les sursaturations, comme à Moulins par exemple. 

    A table, je fais connaissance avec Luc, Vosgien, sympa, et pur passionné de camion. Luc est un photographe chevronné qui part débusquer la perle rare jusqu'au fin fond de l'Europe, en atteste les nombreux clichés de vieux camions et de moins vieux qu'il me présente jusqu'à tard dans la soirée. Naturellement je tente de le convaincre de publier son trésor sur FDR... pas facile.

    Cette sympathique soirée s'achève vers 11h30, il pleut, RDV avec Luc demain matin sous les pompes pour la photo de la croisure.

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  • croisure avec Luc !
    semi à la mode anglaise
    Charolais
    Salut !
    dans l'enfer de Genève
  • Jeudi 9 Octobre 2014
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    5h. Je coure sous la pluie avec mon sac carrouf pour aller prendre ma douche. J'aurais plus vite fait de de sortir directement le gel douche là, sur le parking.
    5h30, je retrouve Luc au gazole comme prévu ; et comme hier soir il tombe encore des cordes. Difficile de prendre une bonne photo.

    1,239 euros, c'est le prix du gazole ce matin à Barbézieux. Cet endroit vaut décidément la peine d'y faire étape, plutôt que d'aller perdre son temps à chercher l'accès PL de je-ne-sais quel supermarché.
    Un petit café, et c'est parti, sous des trombes d'eau.

    Je vais à Genève, et pour ce faire j'opte pour l'itinéraire Angoulême-Confolens-Guérêt-Montluçon-Mâcon-Bourg ; il y a moins de péage et c'est plus plat que par Clermont.
    Le temps ne se calme pas. Il y a un premier accident entre Angoulême et Confolens, une voiture sur le toit, puis un second dans la grande descente de Montluçon, un camion en porte feuille. Piano-piano.

    Je roule 4h29, pas plus, pas moins, afin de ne faire qu'une seule coupure de 45 d'ici Genève et dans l'espoir de pouvoir décharger cet après midi. En contre partie je suis obligé de prendre mon repas de midi à 10h30, ce qui n'est pas très ragoutant, surtout lorsque ce dernier se compose d'une boite de maquereau avec une tomate...

    Tout schuss vers la Suisse. Mon programme se déroule à merveille : j'arrive à la douane de Bardonnex à 14h30, je fais faire une ID CARD pour mon nouveau camion, je présente mes papiers à la douane Française, puis à la douane Suisse, tout va très vite.
    Si bien qu'à 15h15 je suis chez le transitaire et une demi-heure plus tard chez le client pour décharger. La boite ferme à 16h... On me décharge bien mais c'était inespéré.

    A 16h15, j'envoie le SMS "vide à Genève", pas peu fier de la performance... et je reçois "reviens côté Français".

    A ce moment précis j'ai 8h23 de conduite journalière, 3h49 de conduite continue, je suis à 10 minutes de Bardonnex, il est 16h15.
    Pour moi il n'y a aucun danger : j'ambitionne d'aller simplement me poser sur le parking de la frontière afin d'y faire une bonne coupure.
    Mais non, les choses ne vont pas se dérouler comme prévu. Pas du tout.

    L'autoroute est bouchée d'un bout à l'autre et je me retrouve pris au piège  de la transhumance quotidienne des travailleurs Français qui rentrent au bercail. Une horreur. Pire, un cauchemar. Pire, l'apocalypse. 10 minutes dans un sens - 1h20 dans l'autre. Ce qui me contraint à regarder impuissant le tachygraphe égrainer les minutes jusqu'à me sortir la plus belle infraction de ma modeste carrière : 5h10 de conduite continue arrivé à Bardonnex. Impossible de faire autrement,  pris dans le flot, à 2 Km/h, nulle part où s'arrêter.

    Voilà, 28 jours avec ça au dessus de la tête, telle une guillotine que n'importe quel crétin à képi se fera un plaisir d'activer sous prétexte que "bah fallait anticiper monsieur". 

    J'assume complètement.

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  • Suisse
    automne en Isère
    passage au garage
  • Vendredi 10 Octobre 2014
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    Difficile de s'aérer l'esprit.

    Allons-y gaiment, vers une nouvelle journée de conduite dans la joie, la bonne humeur et la RSE.
    Je recharge aujourd'hui près de Rives. Je ne décolle de Bardonnex qu'à 8h, rien ne sert de courir le vendredi matin pour se trouver dépourvu d'amplitude le soir venu, comme l'explique si bien la fable "Le routier et la RSE".

    Je charge à 11h et je débarque à Jarcieu à 12h30.
    Avec Nico nous élucidons le mystère du bruit bizarre lorsque je démarre, ou lorsque je tourne : il y a du jeu dans la flèche de la remorque. Les deux gros écrous sont manifestement mal serrés. Pour trouver une clé assez grande je rends visite aux voisins réparateurs de tracteurs : on ressert tout ça et effectivement il y avait beaucoup de jeu.

    J'ai un ultime chargement à faire avant de rentrer, à Belleville.
    J'y suis à 17h30, sous le déluge. Ils n'attendaient que moi.

    Je rentre tranquillement à Mâcon, il est 20h, semaine terminée.

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  • déluge à Mâcon
    Rouen, passé - présent
  • Lundi 13 Octobre 2014
  •  


    J'en ai pris l'habitude ces dernières semaines : venir faire un semblant de nuit directement dans le camion avant de partir. Ce matin je débarque à 1h15 chez les Routiers Bretons, j'installe mes affaires, et je saute dans la couchette. Réveil programmé à 2h55 pour départ 3h. La nuit s'annonce longue...

    2h55 donc, il pleut à l'horizontal, un vrai temps de Bretagne. Et ce fichu marche pied m'a une fois de plus inondé une chaussure, pied gauche cette fois-ci. Elle est longue la liste des petites choses qui agacent au quotidien dans ce camion, pour un râleur de mon rang.

    Pluie à l'horizontal, rafales de vent, branches sur la route... ce départ de 3h est des plus rock&roll.
    Je monte du côté de Rouen via Moulins, Bourges, Orléans, Chartres, Dreux, Evreux. L'intérêt de cet itinéraire soporifique et moche résultant moitié dans le contournement de Paris, moitié dans la gratuité : vu que les portiques sont et resteront inertes, avant d'être recyclés en boite de thon et de finir dans une poubelle de la RCEA.

    L'ami Phil26 m'accompagne téléphoniquement  sur la portion la plus chiante du parcours, la traversée du Berry, et moi-même je l'accompagne téléphoniquement sur sa partie chiante à lui, les environs de Dole, par là-bas... Solidarité sur itinéraires pénibles.

    Avant que le jour ne se lève je me pose sur une place douillette de l'aire de La Ferté St Aubin, et je dors. C'est le SMS matinal du chef qui me réveille, j'ai pris ça pour la sonnerie du réveil et du coup je gâche 10 minutes de sommeil, c'est à dire un quart de ma sieste. Je suis ronchon.
    J'attrape un café dégueulasse avant de partir. Je suis encore plus ronchon.

    Première livraison à Louviers, chez les transports Hirsch. Je ne sais pas si c'est fait exprès, mais la zone industrielle où j'arrive s'appelle "zone de la fringale" et il y a une immense chocolaterie au milieu qui nous diffuse une odeur enivrante de chocolat chaud... de quoi attiser une bonne fringale pour un Ray en manque de petit-déjeuner.
    Tout va très vite chez Hirsch, je vide la remorque et je m'en vais. Mes deux autres livraisons sont pour Saint-Jean-de-Cardonnay, au nord e Rouen.
    Prévoyant d'y arriver pour la pause, je prends moi-même le temps de manger.

    La remorque est vide et il s'agirait de ne pas m'embarrasser avec chez les deux grossistes en matériel TP où je dois livrer. Je la décroche dans la zone. En porteur tout est plus facile.
    Il est 13h45, j'ai fait mon programme du jour, je réattelle la remorque, j'en suis à 8h20 de conduite journalière et pas de ramasse prévue pour l'instant.
    Du coup je me jette dans la couchette pour une nouvelle nuit de 20 minutes, avant que mon portable m'indique un rechargement à Mantes la ville prévu demain.

    J'hésite à rester dans la zone, là, à St-Jean-de-Cardonnay, il s'agirait de ne pas faire une Genève 2...
    Finalement je pars quand-même, je roule jusqu'à l'aire de Vironvay, à cette heure-ci je peux choisir une belle place en bordure.

    Grosse coupure, j'ai du carnet de bord sur la planche.

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  • saletés de branches !
    aujourd'hui une pelle...
    Villabé
  • Mardi 14 Octobre 2014
  •  

    La femme de ménage vient d'apprendre que son mari a gagné 15000 euros "au grattage" comme elle dit, elle jubile devant les présentoirs à chewing gum, cela se passe à la station shell de Vironvay, ce matin. Je ne fais que passer, direction la douche.

    8h15, pas avant, je file à de Mantes-la-Ville, la boite où je charge n'ouvre qu'à 9h.
    D'un côté il y a Mantes-la-Ville, de l'autre Mantes-la-Jolie. De là à en déduire que Mantes-la-Ville n'est pas vraiment jolie, et que Mantes-la-Jolie n'est pas vraiment une ville, il n'y a qu'un pas.
    Dans la zone de Vaucouleur il y a cette rue des Codeliers qui file entre les arbres, sinueuse et truffée de bordures. Mon client est bien au bout, et je manque de rester coincé dans un carrefour tellement l'accès est peu commode. Il faut bel et bien frotter les branches, pas d'autre alternative...
    Porteur ? Remorque ? Ne connaissant pas grand chose de mon programme du jour je me tâte une demie seconde en voyant le quai étroit. Et puis je me motive, j'y engage la remorque, je suis chaud.

    C'est fou les prouesses en manœuvre que peut engendrer la flemme d'aller décrocher ; étant de nature très fainéante je pense devenir très vite balaise. 

    Deuxième ramasse : une pelleteuse à Cergy.
    Il y a un gros contrôle de Dréal dans la zone des Béthunes lorsque j'arrive. Je passe entre les mailles en cherchant mon client, et je constate après coup que le contrôle a lieu juste devant l'entrée de ce dernier. Il faut que je fasse demi-tour, pour me représenter à nouveau devant les gilets fluo à moustache. Quel imbécile je suis. Je passe heureusement une nouvelle fois entre les mailles du filet, et je peine à entrer chez mon client tellement tout ce beau monde est bien garé... et c'est qu'ils ne bougent pas d'un poil ces enfoirés !

    Il y a donc une pelle à charger, elle est là, sur le quai. Mais il faut attendre, les modalités de paiement ne sont apparemment pas au point, donc stand by.
    Un cariste, une secrétaire, tous deux sympathiques, m'offrent le café comme pour s'excuser.

    Je me tâte toujours sur la répartition de mon chargement, ne connaissant pas la suite du programme c'est compliqué... et je n'ai pas fini de me tâter.
    2h d'attente, c'est le tarif. Je fais mettre finalement la pelle dans le porteur, puis je complète avec mes palettes initialement mises dans la remorque : porteur quasi plein, remorque vide.

    3ème étape : Gefco Gennevilliers, le QG de notre Pascal national. Par chance les quais 121 et 122 sont libres, ce qui me permet de mettre la remorque au 122 en moins de 2h30, et de ne pas boucher le passage (le quai 120 est dans un angle et je suis beaucoup trop long pour m'y mettre). Je laisse l'ami à moustache (dont je n'arrive pas à retenir le prénom) charger, pendant ce temps - et pour en perdre le moins possible -, je vais faire les papiers et boire l'indispensable café avec Pascal.
    Passage éclair, il est 14h30 et je m'affole : je reçois un 4ème chargement à Villabé avec le classique "avant 16h" en ouverture du SMS.

    2h d'attente chez l'un, avant 16h chez l'autre... c'est parfois (toujours) compliqué.

    Il me faut traverser Paris, je téléphone au client et m'annonce "entre 16h et 16h15"... le responsable des expéditions me répond "ok jusqu'à 16h15". Je n'ai presque pas la pression.
    Par chance ça ne coince pas trop. Je roule avec le feu aux fesses, en regardant la carte, faute d'avoir pu préparer mon itinéraire avec ces infos au compte goutte.
    L'endroit où je charge se trouve dans Villabé, et heureusement le type au téléphone m'a indiqué les pièges à éviter : il y a des ponts de chemin de fer à 3m90 d'un côté, des accès limités à 2m20 de large de l'autre... la bonne route étant celle simplement interdite au PL. Bref, un accès hallucinant. Et lorsque j'arrive, à 16h15, tout seul comme un grand, le gardien m'indique qu'il vient d'aller chercher deux camions Polonais perdus pour les escorter. 

    Je complète la remorque après avoir bougé les palettes pour les remettre dans l'ordre.
    4 mises à quai de remorque aujourd'hui. J'ai ma dose.
    Reste à rouler tranquillement en direction de Lyon.

    Je pourrais couper à la maison ce soir... mais arriver à 23h pour repartir à 7h (voyages en 4L déduis), cela ne me motive que très peu. Je roule jusqu'au Mas Pommier, Pont d'Ain.

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  • Mas Pommier
    dédicace Pascal !
    un tour en porteur
  • Mercredi 15 Octobre 2014
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    Le Mas Pommier est un restaurant où j'aime m'arrêter. Le parking est grand, la douche est propre, l'assiette est  bonne, la tenancière anime la conversation au petit matin derrière son bar et devant BFM TV. Un restaurant routier type.

    Je décolle à 7h40.

    Premier client : une base au cœur de PIPA. Non pas Super Pipa, ni Pipa Middleton (la sœur de l'autre), encore moins Pipa Diballe (l'actrice X low cost), mais bien Parc-Industriel-de-la-Plaine-de-l'Ain au sujet duquel l'ami Lagaffe a consacré un texte acide comme il en a le secret.
    PIPA donc, et un quai hyper facile ou je dois mettre... le porteur, hélas.

    8h45, je réattelle et fonce en direction de Meyzieu.
    Une usine, un quai pas trop dur, un cariste... je laisse une partie de la remorque et j'enchaine.
    Troisième étape : Villeurbanne. Lorsque j'arrive devant l'usine il y a deux camions des tps Félix - spécialistes des déménagements industriels. On ne m'a pas donné la bonne adresse, mais par chance, la nouvelle n'est qu'à deux pas d'ici. J'y vais.

    Dans une rue pas forcément étroite de Villeurbanne, il y a ce camion immatriculé en Belgique garé en warning, à cheval sur le trottoir et rétroviseur plié. Ça passe à gauche, théoriquement... seulement il y a un arbre avec de grosses branches bien raides. Et si je m'engage, je signe pour de belles rayures sur la carrosserie. Il suffirait que le Belge avance de 10 ou 15 mètres. Je klaxonne. Personne. Je reklaxonne. Toujours personne. Derrière ça commence à grogner. Je pars chercher le mec à pied, le trouve, il me fait grosso modo comprendre que ça passe, que "pourquoi je viens l'emmerder" ; le tout dans sa langue d'usage : le belge de Bratislava, ou de Prague - je discerne mal les variantes.
    On croit rêver... il faudrait que je dise "oui Monsieur et que je m'encastre sous les branches parce que c'est lui qui a décidé..." Le ton monte, à l'image de la pagaille dans la rue. Il finit par comprendre et monte dans son Daf pour avancer de 10 mètres en m'insultant par la fenêtre... moi même je lui réponds en gueulant.

    J'espère que personne n'a assisté à cette scène pathétique. Honte à nous les gros cons de routiers qui s'insultent parce que leur boulot n'est pas encore assez pourri.

    Je vide le troisième, puis attends la suite.
    La suite arrive : une ramasse à Villefranche, en début d'après-midi, puis le quai à Jarcieu.
    J'y suis à 16h, décharge le tout et ne recharge que le porteur pour un programme assez particulier : une descente dans le sud sans remorque pour deux livraisons, puis une traction de remorque au départ du 83 pour le 38.

    Je passe plus de trois heures au dépôt : quai, pleins, graissage, lavage. Puis je roule jusqu'à Avignon.

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  • on a connu route plus désagréable
    dans les friches...
    St Tropez
    la classe !
  • Jeudi 16 Octobre 2014
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    Je me réveille dans mon tout petit porteur, sur le parking d'un nouveau parc logistique, au Pontet. Hier j'ai eu de la chance : lorsque je suis arrivé le portail était en train de se refermer, j'ai couru pour passer le pied devant le capteur, il s'est rouvert et j'ai pu dormir clandestinement à l'intérieur, sur le parking d'entrée. Malin le Ray !

    Se balader en porteur c'est la tranquillité absolue : on se gare n'importe où, on manœuvre n'importe où, aucun souci, j'ai l'impression d'être en voiturette.

    Cela dit, ma seconde mission du jour, après avoir déchargé un premier client au parc logistique, est à la mesure du véhicule que je conduis : livraison dans Aix en Provence centre, un chantier de climatisation.
    Rien ne sert de courir pour arriver à Aix avant 9h, j'ai pour l'heure comme seul souci de trouver un café et un truc à tremper dedans.

    Aire de Lançon de Provence, chez "Paul". Arnaque garantie : 1,70 euro le pain au chocolat ! Ils peuvent le garder et se le carrer où je pense. Je me contente d'une formule à la con, café-croissant, tout aussi arnaquante... mais j'ai quand-même envie de petit-déjeuner.

    9h30, je suis dans Aix et je peste contre ces putains d'arbres qui me griffent de toute part. Et là il n'y a pas de Slovaquo-Belge à dégager, il n'y a pas le choix, il faut passer. Ma foi...
    Je trouve le chantier, parviens à me caser dans un coin l'espace de 10 minutes pour sortir mes palettes au hayon ; il faut faire vite je gène.

    On pourrait d'ailleurs résumer mon boulot à cette phrase : "Il faut faire vite, je gène."

    Je ne garderais pas un bon souvenir d'Aix, mais juste : des arbres, des gens pressés et pas de place - même pour un porteur.

    Je suis vide et je roule en direction de la mer : Port Grimaud, environs de St Tropez. Il ne s'agit pas d'aller me faire bronzer la croupe où de boire du champagne avec Bernard Montiel et Massimo Gargia ; il s'agit d'aller atteler une vielle remorque qui pourrit depuis deux ans dans un terrain vague, pour l'amener dans un autre terrain vague moins jet set où elle pourra pourrir plus paisiblement.

    Je suis sur place à midi. Il y a en fait 2 remorques et une semi-remorque à convoyer. Je fais le premier voyage et dois donc aussi faire un état des lieux pour les deux autres missions.
    Je vais passer 5 heures sur place avec l'expéditeur :
    _ sortir une première remorque des friches, constater que la flèche est trop haute, trop courte et donc l'attelage très périlleux.
    _ sortir la seconde remorque, plus vieille et plus pourrie, résoudre le problème de l'essieu bloqué en tapant comme un barbare sur les leviers de frein (grâce aux conseils avisés de mon frère Fredo, via assistance téléphonique), disquer une béquille récalcitrante, faire la pressions des pneus avec un compresseur limité à 6 bar... le tout en plein soleil et sans avoir mangé.
    A 17h c'est à peu prêt apte à rouler et j'ai l'impression d'être en Roumanie vu ce que l'on vient de faire. 

    L'expéditeur me suis en voiture jusqu'au péage, mon attelage tient la route, nous avons fait du bon boulot.

    Je m'en remonte tranquillement, calé à 80, avec ma vielle remorque Pierangeli témoin d'une génération révolue de frigoristes du sud; Mon attelage est affreusement laid, mais j'aime bien ce mystérieux convoyage.
    Quand à la remorque autoportée : jamais de la vie, c'est bien trop facile à reculer. Qu'est ce que je raconterais dans mes carnets de bord avec une merde pareille ?

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  • lac de Paladru
    il fait beau, ils sont de sortie
    propre !
  • Vendredi 17 Octobre 2014
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    J'ai dormi dans la zone des Auréats, Portes-Lès-Valence, avec mon camion de forain. Ce choix est stratégique : il y a la boulangerie avec le café et la petite part de quiche pour midi, c’est à dire tout ce qu’il faut pour me mettre de bonne humeur ce vendredi. Ma coupure est terminée depuis 7h, mais je trainasse encore 45 minutes parce que bon... y’en à marre de toujours courir.
    Avant de partir je fais un rapide tour de ma belle Pierangeli pour voir si on m’a rien piqué (trop lol) ou s’il n’y a rien d‘anormal. C’est bon : c’est tout vieux, tout grippé, tout pourri, mais ça tient.

    J’ai utilisé un « trop lol » et je n’en suis pas fier du tout.

    Par je ne sais quel miracle ça tient jusqu’à destination : le lac de Paladru. Non pas pour la couler, mais pour la décrocher sur un parking et la laisser à son propriétaire qui en fera une cabane, un entrepôt, ou qui la coulera lui-même va savoir...
    Content de me débarrasser de cette épave, je vais faire une ramasse en porteur, à Rives. Puis je rentre au dépôt pour atteler MA remorque et retrouver un ensemble que je trouve plus que jamais harmonieux.

    Lavage, gazole, entre midi et 2, juste avant qu’une benne vienne me déloger pour laver comme chaque vendredi.

    Mon programme : aller charger à Hauterives. Ce matin Rives, cet après-midi Hauterives... et ce soir peut-être inatteignablerives.

    Il n’y a plus qu’à rentrer sur Mâcon, tranquillement, en coupant à travers la campagne dauphinoise.
    La semaine se termine à 18h, pincez-moi je rêve.

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  • Fontenay Sous Bois, 8h
    Domaine de Courson Monteloup
    Château de Courson Monteloup
  • Lundi 20 Octobre 2014
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    Plus la peine de me chercher le dimanche vers minuit : je m'endors dans le camion, sur le parking des Routiers Bretons, pour me réveiller une heure plus tard. Chaque semaine commence de la même manière, avec un déficit de sommeil, le temps de week end disponible n'étant manifestement pas suffisant pour mener de front mes carrières respectives de rédacteur de carnet de bord, glandeur assidu, musicien hypothétique et bon père de famille... bien que je n'ai pas d'enfant connu à ce jour.

    1h20, il faut y aller, il faut bel et bien y aller, il faut malgré tout y aller... mon programme s'apparentant à un véritable cauchemar prémonitoire.
    Il s'agit d'une mission bien connue d'Alain26, une mission qui abime deux fois par an son camion : aller charger des arbres dans un château au sud de Paris, avec comme principal inconvénient d'autres arbres qui s'occupent de rayer la carrosserie sur toute la traversée du domaine.
    Je ne pouvais y échapper, l'accès ne se faisant qu'en porteur et le chargement le plus tôt possible ce lundi matin. Avec ce que m'a raconté Alain, j'ai cherché tout le weekend une éventuelle solution pour ne pas subir les griffures : filmer des morceaux de carton sur le haut du camion ? Recouvrir les parois avec une espèce de bâche ? Acheter du matériel d'élagage et s'occuper personnellement du parc du château ?  Finalement rien de tout cela : je monte fataliste en direction de Paris.

    Avant toute chose, j'ai une livraison à faire à Fontenay sous Bois. Ça a l'air de rien, mais cette livraison n'est pas un cadeau : Déjà Fontenay sous Bois, proche banlieue est de la capitale, un lundi matin en heures de pointe, c'est la galère. Comme prévu : un client tout sauf accessible, en plein lotissement, à vider à même la route. Mais surtout, le plus gros problème est encore ailleurs : comment aller à Fontenay au plus tôt, tout en respectant l'interdiction d'accès à Paris de 6h à 10h, tout en gardant de l'amplitude pour aller faire du 4x4 au château, tout en sachant que je ne peux stationner devant mon client ou même dans les alentours, tout en prenant en compte les temps de bouchons de l'A86 ? Comment faire ? C'est un véritable casse tête. Et je ne parle même pas du gros point d'interrogation sur l'accessibilité en camion remorque... ça on verra au moment venu.

    Je pars donc de Mâcon à 1h20. Je monte laborieusement en direction de Paris : coupure de 45 à Courtenay, une demi-heure de perdue dans les embouteillages, serrage de fesses devant la plateforme de contrôle vers Chilly-Mazarin - (heureusement les flics ont déjà trouvé leurs proies) -, j'arrive à destination à 7h30, pile pour l'ouverture, à 8h15 je suis vide.

    Voici pour la partie "facile" de ce lundi. Je roule maintenant en direction de Courson-Monteloup. Alain me fait du radioguidage jusqu'au portail du château, puis me souhaite bon courage. C'est gentil.
    Il pleuviote, les chemins de terre sont humides mais pas trop. J'embarque avec moi le fils de l'expéditeur qui me sert de copilote jusqu'au point de chargement. Quelques passages, étroits, quelques frottages d'arbres, quelques arrêts pour écarter le balisage... mais dans l'ensemble rien de terrible.

    Et moi naïvement je pense avoir fait le plus dur.

    Nous chargeons un premier voyage de plantes dans le porteur. Il faut aller le transvaser dans la remorque sur le parking d'entrée. Pour y retourner, je suis obligé de suivre l'itinéraire balisé, je ne peux revenir sur mes pas.
    L'itinéraire en question est une sorte de parcours du combattant : boue, arbres, passages étroits, buissons, rubalise avec piquets en ferraille...
    Au début j'y vais à tâtons, je descends enlever les piquets pour les replanter un peu plus loin, je prends garde à ne pas trop rouler sur les pelouses... et puis très vite mon niveau d'agacement vire au rouge : je balance les piquets au loin, je coupe dans l'herbe pour éviter les branches. On n'a pas idée de venir ici avec un camion de danseuse tout carrossé, tout propret... un tracteur agricole serait plus adapté.

    Le premier voyage dans la remorque, il faut y retourner. Ne boudons pas notre plaisir.

    Je charge cette fois-ci un lot de d'arbres taillés au millimètre, véritable sculpture végétale, hyper fragile. Voir photo ci-contre. En les regardant bien on a l'impression de voir des caniches géants qui sortent de chez le toiletteur.

    Hyper fragile, mais pas le temps de sangler : si je veux faire mes 11h de coupure il faut que je dégage au plus vite pour ne pas dépasser 13h d'amplitude. Pas le temps de bouffer bien sûr, jamais le temps.

    Départ Mâcon 1h20, arrivée Nemours 14h20. Tendu d'un bout à l'autre.
    Je m'endors en rêvant que je conduis une bonne grosse élagueuse et que je fais un carnage à Courson Monteloup.

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  • rocade de St Mamans
    autoroute de Vinay
    périph de Poliénas
  • Mardi 21 Octobre 2014
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    11h plus tard, enfin presque, il est 1h30 et je décolle de Nemours pour me caler sur l'A6. Ça va toujours mieux le deuxième jour : non seulement j'ai dormi un peu, mais en plus j'ai un café dans le ventre. Je peux donc m'élancer serein pour les 5h30 de route qui me conduiront à Jarcieu.

    La pause sur l'aire de la forêt, classique, 45 minutes pas plus, je poursuis ma descente nocturne pour passer Lyon au plus tôt.
    Tout va bien, j'arrive au dépôt à 7h30.

    Pourquoi passer par Jarcieu alors que mes arbres sont à décharger à St Marcellin et Romans ? Pour rajouter le petit plus qui viendra mettre un peu de piquant à cette journée : 2 big bag  d'engrais pour des paysans dans les environs de St Marcellin.

    Je repars donc illico, en direction de Hauterives - Romans... et c'est Alain26 qui, surpris que je passe par là, me donne l'idée de commencer mon programme à l'envers. Effectivement c'est plus logique. Il faut toujours écouter les anciens.
    Je vise donc Saint Mamans pour commencer. Non pas que je m'apprête à souhaiter la fête des mères avant l'heure, mais je dois aller vider mes arbres top model au fin fond de la campagne, avec ici aussi, moult branches pour caresser la carrosserie... mais on est plus à ça près...

    Je transporte des sculptures végétales, résultat de plusieurs années de maniaquerie et d'obsession  humaine... et je me fais corriger par la vraie nature, celle avec des branches hirsutes, celles avec des arbres asymétriques, tordus, courbés, qui me laissent à peine me frayer mon chemin comme pour me rappeler qui est le patron ici, au fin fond de la campagne iséroise.  

    Le porteur se vide à Chatte. Oui Chatte, un nom de commune qui prête à rire et qui sème le trouble...
    T'es où Régis ?
    Je suis à Ch...
    Où ça ?
    A Ch...
    Où ?
    A CHATTE Bordel !

    Reste les deux bigbag : Un pour Poliénas, un pour Saint Lallier. J'ai 8h de volant, et le rally du Dauphiné s'annonce tendu.
    Le premier paysan n'est pas chez lui, par chance nous avons mis le bigbag sur palette et je peux lui laisser dans la cour. Il faut d'abord trouver la ferme. Pas facile d'accès, c'est tellement perdu que même le téléphone ne passe plus...
    Je trouve, décharge le bigbag, et obtient la signature d'un commis de passage à la ferme entre deux champs de maïs à ensiler. Parfait.

    Dernière livraison à Saint Lallier. Je repasse par Ch..., je repasse par Ch..., je repasse par CHATTE et je fonce en essayant désespérément de joindre le destinataire qui ne répond pas. J'ai laissé un message au départ de Poliénas, mais il ne me rappelle pas.
    Arrivé à Saint Lallier et ne sachant où aller, je me gare devant une superette Vival pour savoir qui connait la ferme en question... J'essaie de rappeler une dernière fois et miracle ! Ça répond !
    Le paysan me guide et l'accès à sa ferme est du genre pas facile... comme je m'y attendais.
    Avec 9h40 de conduite, me voici vide dans la cour de la ferme. J'ai tout juste de quoi aller rechercher ma remorque, laissée à Ch...

    Grosse tension pour ne pas dépasser les heures... il faut que j'attelle la remorque sinon elle sera enfermée chez le pépiniériste.
    CHATTE, 9h55 de volant, c'est bon... mais je suis destiné à rester sur place, la RSE ne m'autorisant pas même à aller dans la zone commerciale toute proche pour y faire mes courses.
    Peu importe.

    Départ Nemours 1h30, arrivée CHATTE 16h, tendu d'un bout à l'autre, rien dans le ventre.

  • Photos
  • La côte St André
    désolé Manolo !
    je ne me suis pas ennuyé aujourd'hui...
    Saint Etienne
  • Mercredi 22 Octobre 2014
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    Une bonne grosse coupure qui compte officiellement 9h... c'est le côté sournois de la RSE.

    RSE, RSE, RSE, RSE, RSE, RSE... Je n'ai que ces trois fichues lettres à la bouche. Aujourd'hui on ne conduit pas bien, on ne travaille pas bien, on respecte la RSE ! On ne s'arrête pas manger, on ne rentre pas le vendredi, on coupe au milieu de nulle part, on respecte la RSE ! Prenez un crétin de base et faite le respecter la RSE, vous obtenez un parfait routier.
    J'ai la rage. J'ai juste envie de bien travailler, de faire des trucs compliqués avec mon camion-remorque en réponse à la standardisation abrutissante de notre beau métier.

    Départ 6h30. Je vais charger à Saint Etienne de Saint Geoirs, de l'autre côté du col de Toutes Aures - y compris de 6h30.
    Comme à chaque fois je croise quelques collègues pas très fair-play : arrêté dans le coin d'un virage, en essayant de me faire le plus "petit" possible,  je manque de me faire balayer le rétro ou rayer la caisse par quelque débile qui tourne à fond les gamelles. J'aime.

    7h30, je bois le café avec les caristes. Bonne ambiance et sujet de conversation imparable : il fait froid. Effectivement ce matin il caille sévère... en atteste les poils de mes tibias tout tendus comme s'ils voulaient se barrer pour se mettre au chaud.
    J'ai été optimiste avec mon bermuda. Je retourne mettre un pantalon...

    Pile au moment d'aller charger, LE classique : il tombe une grosse averse. Je sors donc le Kway Tps du Vivarais en plus du Bermuda. Oui, j'utilise encore un Kway Tps du Vivarais en toute impunité, par contre je n'utilise plus de T-shirt Asotrans, faut pas déconner quand-même...
    8h30, je referme et m'en vais vers une destination exotique : Saint Quentin Fallavier. On est chauffeur Grand Routier ou on ne l'est pas.
    Je décharge donc dans la foulée et dans la zone des Chesnes, chez EDF, endroit célèbre pour son café à 10 centimes. Pour un peu je me mettrais des gobelets dans les poches pour les boire ailleurs, sur un autohof Allemand par exemple, où la même chose coûte trois euros de plus.
    Encore faut-il aller en Allemagne. Pour ma part je recharge une première ramasse dans un autre entrepôt de la zone des Chesnes. Puis j'enchaine avec une ramasse à Meyzieu, puis une autre à Genas... puis une autre à La Talaudière, puis une autre à Andrézieux, puis une autre à Saint Etienne...

    Je ramène mon camion complet au dépôt, j'en décharge mais surtout j'en recharge... à ras bord, complet, archi-complet pour Barcelone. Tellement complet que Franck est obligé de balancer le tire pal sur les palettes, par le côté.

    Je repars au plus vite, car l'amplitude tourne. Je roule jusqu'à Tavel, au fond du parking, 21h30. Fin d'une journée tendue d'un bout à l'autre... pas mangé, et blablabla...

  • Photos
  • pour ne pas décrocher...
    Barcelona
    contrôle Mossos
  • Jeudi 23 Octobre 2014
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    Journée marathon en perspective. Voici trois matins que le réveille sonne avec deux heures d'avance et que je sors du lit au dernier moment. Or ce matin j'avais prévu de préparer mes itinéraires... 4 de mes 6 clients n'existant pas dans le GPS.
    Je suis donc bien énervé, contre moi-même, de bon matin, car en partant à 6h50 contre 6h30 je sais d'avance que ces 20 minutes me manqueront en fin de journée.
    Car le fait est que le 6ème client au sud de Barcelone ferme à 16h30.

    Je commence par livrer une jardinerie en France, à Pia. A peine le temps de caser un quart d'heure de coupure.
    Je passe côté Espagnol, et trouve mon deuxième client à Vilafant, banlieue de Figuérès.
    Tout va très vite jusqu'au troisième, à Maçanet de la Selva. Une grosse usine avec protocole débile, gardien pénible, et caristes zélés. Oui zélés, car non seulement on fait jouer la menace de la pause à 12h45 (qui me ferait attendre jusqu'à 15h !) pour décharger 3 pal, mais en plus, une fois en place, on me fait rebouger de quelques mètres alors que j'avais ouvert... quelques mètres pour être en face de la porte et moins fatiguer le chariot élévateur.

    Restons calme, toujours.

    Quatrième client à Les Franqueses del Vallès, j'arrive à 13h30 et on m'annonce 15h... cette fois je n'y échappe pas, c'est la pause et c'est non négociable, même pour une seule palette, même si je peux la décharger moi-même au hayon... Rien à faire.
    Du coup je suis quand-même énervé, moi qui voulais performer et tout vider aujourd'hui ce n'est plus possible.
    Jusqu'à ce SMS du chef : "si tu veux va faire le 6em et finis à Franqueses je te recharge au Nord de Barcelone". Parfait. Je fonce à San Boi.

    Il est 15h15 et il n'y a personne dans la boite sensée fermer à 16h30. J'attends devant, avec les warning, dans la rue, je gène.
    Un autre camion arrive, puis encore un. Nous attendons tous les trois, et lorsque le cariste arrive de sa pause, enfin, il désigne les deux autres chauffeurs du doigt : "toi en 1er, toi en 2ème" puis il me désigne "toi en 3ème" avec un dédain déconcertant.
    Je suis arrivé le premier, mais je passe en troisième, c'est non négociable, les camions qui chargent sont prioritaires.

    Du coup je poireaute une heure supplémentaire avec mes warning, dans la rue, en gênant.

    Pour me mettre à quai, je dois sortir une manœuvre de haute volée, entre le muret, et le premium, en évitant de toucher l'un ou l'autre.

    10 minutes pour vider, mais 2h passées ici, je m'en vais après un ultime regard haineux pour le cariste.

    Je refonce de l'autre côté de Barcelone, direction Sant Fost de Campsentelles. Je suis tendu, sur l'AP7, quand soudain... bingo, une voiture des Mossos s'intercale devant moi avec les gyrophares. Il ne manquait plus que cela.
    Au début je pense que c'est parce que j'ai doublé d'autres camions... mais non, ce n'est apparemment qu'un contrôle de routine. Avant toute chose, j'annonce mon exploit de Genève au flic, au cas où ça le convaincrait à ne pas m'allumer. Puis je fournis tout ce qu'il me demande : carte, permis, licence... la procédure habituelle. Gros suspens durant les longues minutes d'analyse de mes heures ; puis l'officier revient, me rend tout... et me sort un truc du genre : "c'est très bien Monsieur, aucun problème, bonne route"

    Je tombe des nues. Sans blague ? Je viens de me faire féliciter par un flic ? Par la Mossos ?
    Quelle fierté. Je ne mange plus le midi, je n'ai jamais été aussi stressé, j'ai plein de cheveux blancs, mais putain je me fais féliciter par la Mossos ! Un peu comme le condamné d'une erreur judiciaire qui recevrait une petite claque dans le dos de la part du bourreau, genre "allez, vas mon petit... c'est bon". Quand je vois un flic analyser mes heures et chercher désespérément la faute, je me demande ce qu'il se passe dans sa tête : frustration ? excitation ? vide ?

    Je tente Sant Fost, même si j'ai encore perdu du temps. Je réussis à vider juste avant la fermeture.
    Alors je tente Franqueses... et je réussis aussi à vider juste avant la fermeture.
    Parfait. La boucle est bouclée, j'ai fait mes 6 clients, je suis content, le chef aussi, du coup je suis content que le chef soit content, et sans doute lui-même est content que je sois content. Tout le monde est content.

    Je reçois un chargement à Sant Hilari Sacalm.
    J'ai les heures pour y aller, à condition de cramer ma deuxième 10h... mais peu importe, de là-bas j'aurais largement de quoi rentrer à Mâcon. Mieux vaut donc aller dormir sur place, afin de ne pas prendre de risque avec l'amplitude en cas de marchandise pas prête.

    Savant calcul... mais félicitations de la Mossos !

    Sant Hilari Sacalm est perchée en haut de la montagne, entre Vic et Girone. Je m'y pose pour une grosse coupure au calme, devant l'usine. Pas un bruit, pas un chat, seulement quelques lapins qui s'accaparent la zone comme terrain de jeu.

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  • au calme, à Sant Hilari Sacalm
    belle vue de là-haut
    facile !
  • Vendredi 24 Octobre 2014
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    Sant Hilari sacalm, et ça caille. Oui je me sens obligé de faire plein de jeux de mots avec ce nom bizarre.
    Je me réveille, où plutôt le froid me réveille, vers 7h. Je me présente, je suis bien accueilli : dans les bureaux, ça parle français, tout le monde à le sourire, tout va bien.

    Tout va bien jusqu'au moment de commencer à charger. Des cadres en ferraille, empilés par 3, avec une hauteur totale de 2m73. Petit problème : j'ai largement plus de 2m73 de hauteur disponible, sauf sous les rails latéraux où il n'y a que 2m70. Et les rails latéraux font 12 cm chacun, à droite, à gauche, ne laissant que 2m25 de largeur susceptible d'accueillir les cadres de 2m73 de hauteur. C'est compliqué ? Oui. On a beau y tourner dans tous les sens, ça ne rentre pas.
    Un chef arrive, fait valoir sa science en tentant d'y tourner dans tous les sens, ça ne rentre pas mieux.
    L'affréteur est au téléphone, fait valoir sa science en disant d'y tourner dans tous les sens, ça ne rentre toujours pas mieux.
    Et enfin Stéphane me demande lui même si on a essayé d'y charger par derrière... et là ça commence à devenir pénible. Voici une heure que personne ne nous croit : ça ne peut pas rentrer ! C'est techniquement impossible !

    Du coup stand by à Sant Hilari, l'expéditeur refuse de payer deux camions, l'affréteur demande 15 fois de prendre des mesures, apparemment il ne nous croit toujours pas... on va même jusqu'à prendre mon camion en photo... avec ma gueule dépitée en bas à gauche.

    Moi j'ai pour consigne d'attendre.
    Je sais que c'est mort; que je vais recharger ailleurs, que je n'aurais du coup plus les heures pour rentrer ce soir, et que je serai contraint de faire 11h de coupure. D'où la gueule de dépité en bas à gauche de la photo.

    Midi arrive, je n'en ai plus rien à foutre de rien... voici un chargement à Sant Vicenc del Horts, sud de Barcelone, suivi d'un complément dans la zona Franca. Ma foi, allons-y gaiement.

    Je m'arrête prendre une douche à Montseny, puis je prends le temps de manger... bref je découvre la vie, un vendredi après-midi, désabusé.

    Je fais ma première ramasse, le quai est difficile mais j'assure. Je vais ensuite chez le commissionnaire qui nous affrète et là, le cauchemar continue : il y a des camions en attente de partout, je ne peux même pas me garer...
    Je vais donc poser la remorque ailleurs et reviens en porteur.
    On me dit que ça va aller vite, que la marchandise est dans tel camion...
    J'attends jusqu'à 20h30... début du chargement et 21h30, départ de la zona Franca. Putain ça a été trop vite !

    3 cm m'ont pourri le weekend, et ce n'est pas une blague : Sant Hilari Sacalm...

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  • on n'aime pas les camions-remorques tradi à Pont de l'Isère
    mon vieux !
  • Samedi 25 Octobre 2014
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    Samedi, c'est le weekend, il fait beau, je bois mon café au parmi les touristes de passage à Vinassan.

    Je décolle à 10h, direction Jarcieu.
    Il y a un sacré avantage à rouler le samedi : je peux écouter "Sur les épaules de Darwin" à 11h sur Inter. Certes je comprends à peine un quart du contenu de l'émission, mais ce quart est tellement plus intéressant que la valise RTL !

    Passage éclair et dépôt, et je remonte jusqu'aux Routiers Bretons. 19h, terminé.


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  • pierres dorées
    Saint Vincent en Bresse
    coupure à Thionville
  • Lundi 27 Octobre 2014
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    Le réveil était programmé sur 5h, mais dès 4h je suis debout, je suis aux toilettes, et je vomis. Début de carnet de bord pas très ragoutant mais le fait est que ce matin je suis malade comme un chien : gastro, indigestion ou je ne sais quoi, j'ai le ventre en vrac.

    Je n'ai pas d'impératif horaire pour débuter cette semaine, le chef m'a même suggéré d'y aller tranquille et de livrer mon premier client en fin de matinée, à Villefranche. Je passe donc mon début de matinée entre les toilettes, le lavabo de la salle bain et celui de la cuisine... Lorsqu'enfin je suis complètement sec, déshydraté, c'est bon je prends mes affaires et je me sauve.

    Je pars livrer à Liergues, et j'arrive à 11h. Je manque de reculer dans le portail tellement j'ai les yeux en face des trous, je me mets en place dans la cour, il faut décharger les 16 palettes d'une tonne au transpalette manuel.

    Va, toi qui es si malin, tirer des palettes d'une tonne tout en gérant une violente gastro !
    Rude épreuve de force contenue, digne des plus exigeants exercices de maitrise d'art martiaux, mais heureusement pas d'accident : je n'ai plus rien dans le ventre.
    Suite à cela voici la fièvre qui arrive et qui me réduit à l'état de larve : chauffage à fond dans le camion, je grelotte.

    Je vais livrer mon deuxième client au fin fond de la Bresse, à Saint Vincent en Bresse précisément, et comme je prévois d'y arriver vers 13h, je me pose à Cuisery pour dormir une heure et laisser agir un nurofen...
    Au réveil ça va un peu mieux.
    Le temps est si triste sur la Bresse, c'est l'automne, c'est moche. Pour trouver Saint Vincent en Bresse rien de plus simple : c'est à côté de Saint Etienne en Bresse, pas loin de Saint Christophe en Bresse, à deux pas de Saint Martin en Bresse. Je livre dans un laboratoire dont on se demande ce qu'il fout là, complètement perdu au milieu des bois et des champs de maïs, avec des routes d'accès où l'on croise à peine une voiture.

    Ma journée est quasiment finie : je n'ai plus qu'à monter tranquillement vers Thionville, livraison demain matin. J'ai de la chance dans mon malheur : il s'avère vraiment pénible de conduire malade et je me languis d'aller me coucher.
    Calé à 83 sur l'A31, tout le monde me double et c'est très bien, je roule pénard vers la Moselle. J'arrive à 21h à Thionville, je tourne dans la zone commerciale du Leclerc pour trouver une place, pas facile, je finis par squatter le parking du Gemo. Je tire les rideaux, basta.

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  • galère à la salle de sport
    Tps Guldner
    Carling
  • Mardi 28 Octobre 2014
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    J'ai bien dormi. Je me suis fait réveiller à 7h par un mec de l'entretien qui soufflait les feuilles mortes autour du camion. Peut-être est-ce d'ailleurs fait exprès, comme pour me dire que je n'ai rien à foutre là, sur le parking de chez gemo. Qu'importe, il fallait que je me lève.

    8h30. Mon principal souci ce matin est de trouver un endroit stratégique pour décrocher la remorque. En effet, ce mec qui m'emmerde volontairement (ou pas) avec sa souffleuse pourrait par exemple garer sa bagnole volontairement (ou pas) devant la flèche. On n'est pas à une débilité près. Je repère une sorte d'impasse entre Mégasport et Générale d'optique, un endroit où personne n'est sensé se garer. Je m'y engage en marche arrière et je décroche.
    J'ai 5 palettes de dalles à livrer dans une salle de sport, au hayon. Je me présente à 9h, comme convenu hier au téléphone. Derrière la vitrine ça transpire en levant de la fonte, en faisant des tractions, avec des miroirs partout pour refléter tous les gros biceps et contenter autant de d'abnégation narcissique.
    Aucun gérant n'est ici, aucun ouvrier non plus, seulement des sportifs du mardi matin. D'ailleurs n'ont-ils pas autre chose à foutre ces gens un mardi à 9h15 ? N'ont-ils pas un boulot ? Je me pose trop de questions... 9h30 arrive et j'appelle le mec d'hier.
    "La personne arrive dans 2 minutes". Voici ce qu'il me répond. La personne en question arrive un quart d'heure plus tard, il est donc 9h45 (contre 9h prévu), et il s'agit simplement de la gérante, une petite bonne femme, alors que j'attendais une équipe d'ouvriers bien costauds pour m'aider.
    Le fait est que chacune des cinq palettes pèse plus d'une tonne, et la petite bonne femme - très gentille au demeurant -, me demande si je peux les amener dans la salle du fond. 
    Ici commence l'épreuve herculéenne du jour. 5 palettes, seulement 5 fichues palettes... pour 1h30 de travail. Je me retrouve à faire plus de muscu que tous ces bodybuilders gonflés à l'hélium. Et le pire c'est que personne ne viendrait m'aider spontanément : à croire qu'ils préfèrent se conforter dans leurs exercices inutiles plutôt que d'utiliser concrètement leur bras... j'imagine que ces gens sont aussi accros à la masturbation.
    Sur le parquet glissant je parviens à pousser ma palette à la vitesse incroyable de 1m/h, en passant devant tout le monde et sans que personne n'ait la présence d'esprit de venir pousser avec moi.
    On vient m'aider uniquement pour passer le seuil de porte : une marche de quelques centimètres qui devient une montagne à franchir et que je ne peux affronter seul.

    Reste que la gérante est très gentille, elle m'offre le café pour me remercier. Je ne sens plus mes bras et j'ai transpiré comme un porc. Une journée qui commence en fanfare.

    Vide, je retourne chercher ma remorque et pars à Creutzwald. J'arrive à 12h15, pile pour la pause. Je suis chez Tps Guldner : beaux ensembles, belle flotte, beau dépôt... et un peu comme à la salle de sport ce matin je me demande - en voyant plus de 20 camions dans la cour -, je me demande tout simplement ce qu'ils foutent là.  N'ont-ils pas de la route à faire un mardi midi ? Je me pose trop de questions... peut-être que leurs conducteurs sont à la salle de sport.

    Je charge à 13h.
    13h45 je décolle. RDV à Meyzieu demain 6h. J'ai une marge très confortable d'un quart d'heure pour descendre.

    A4, A31, A39, pause douche à la BP d'Auxonne, douche froide mais gratuite et propre - c'est toujours ça. Je roule jusqu'à Montluel car je ne suis pas sûr de trouver un endroit génial dans la zone de Meyzieu pour passer la nuit.

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  • droite ou gauche ?
    sont équipés les pépiniéristes
  • Mercredi 29 Octobre 2014
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    J'ai rendez-vous dans une base logistique de supermarché ce matin, 6h, non pas à Mesgenous, Mesfesses ou Mesoreilles, mais à Meyzieu.
    6h pétante : au terme d'une reculade toute pourrie je parviens quand-même à coller le cul de la remorque au quai 17. On m'a fait entrer à l'heure, et voici que trois caristes autoportés s'apprêtent déjà à sortir les palettes. Etonnant.
    6h45, je m'en vais. A peine ai-je eu le temps d'attraper un café au poste de garde.

    Le jour se lève, teintant de rose pastel les paysages moches des environs de Satolas. Quelques bancs de brouillard, d'où sortent des pylônes électriques hideux, constituent l'horizon avec dans les champs, derrière leurs projecteurs, de grosses bestioles qui arrachent les pieds de maïs pour remplir des bennes pleines de grain ; sur la route le trafic se densifie : des conducteurs pressés et stressés qui coupent dans les ronds-points comme s'ils étaient tous seuls ; dans les airs quelques avions approchent  déjà de Saint-Exupéry apportant à la capitale des gaules son troupeau de cadres supérieurs quotidien. Le jour se lève sur l'est lyonnais, et je m'en vais.

    Je dois charger des arbres à Belmont-Tramonet, à l'entrée du 73 où ça ressemble encore au 38. Bonne ambiance chez les pépiniéristes, je ne charge que la remorque et je reçois une nouvelle mission : 2 palettes à prendre à Entre-deux-Guiers, c'est le nom du bled, à ne pas confondre avec "Entre-deux-Gays" le célèbre club libertin.
    Pour y aller je m'interroge, je ne suis pas un régional de l'étape : Pont-de-Beauvoisin, Gorges de Chaille, Les Echellles ? Ça passe ? C'est autorisé ? Sinon il me faut faire le tour via Chambéry et doubler mon temps de parcours. Je me lance, je coupe au travers, et ma foi après avoir contourné Pont-de-Beauvoisin ça roule plutôt bien.

    Je charge mes deux palettes. Mission suivante : trois autres à aller chercher à Saint Hilaire de la côte. Même interrogation sur l'itinéraire pour repartir : étant donné que c'est interdit aux PL à peu près partout, je coupe au plus court : col de la Placette.

    Il fait un temps magnifique, je redescends doucement sur Voreppe puis fonce sur St Hilaire pour charger avant midi. Objectif atteint : 11h50, le camion est presque complet, je rentre à la base.
    Après m'être débarrassé de mes ramasses je recharge en début d'après-midi à Anjou, à nouveau chez un pépiniériste. Un complet de sapins pour les stations de skis : Combloux, Megève ; quitte à faire du régional, autant aller dans les coins intéressants. 
    Comme il reste 1m, je repasse à Jarcieu pour charger une cabine de tracteur de 2m. Cette fois c'est archicomble, une rapide douche car je coure déjà contre l'amplitude, puis je m'en vais en direction de Villaz, dans les montagnes au Nord d'Annecy, pour livraison demain première heure. J'ai d'ailleurs appelé le paysan pour savoir quand je pouvais venir : "Vous venez quand vous voulez, quand ça vous arrange, 21h ce soir pas de problème, ou bien 6h demain pareil...". Bon sang c'est tellement plaisant à attendre des gens qui veulent bosser ! Faudrait envoyer des wagons de réceptionnaires en stage à la ferme...
    C'est la RSE qui de toute façon décide de l'heure de RDV : pour ce soir j'ai tout juste l'amplitude et risque de me retrouver planter à la ferme, ce sera donc demain 7h.

    Je roule jusqu'à Villaz, il y a, juste avant d'attaquer la côte qui mène au centre-village, deux grande zones artisanales. Je tourne dans la première, cherchant une place en vain, puis même chose dans la deuxième... il n'y a aucun recoin, seulement des trottoirs et des saloperies de bordures. Je finis avec 15h et une minutes d'amplitude, à même la route, dans un coin de la zone où je ne gène personne. J'espérais mieux.

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  • Villaz
    ne surtout pas toucher le camion !
    je me suis fait un pote
  • Jeudi 30 Octobre 2014
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    Je laisse la remorque sur place et m'en vais escalader la montagne en porteur. Je traverse Villaz, charmante bourgade, puis m'enfonce encore plus dans les pâturages où de belles vaches laitières me regardent passer, indifférentes comme d'autres regardent passer les trains, et faisant de la condensation en broutant l'herbe tendre des alpages, à la fraiche, dans le brouillard. C'est beau comme une pub Milka.
    Je trouve la ferme. Je tombe sur un paysan très gentil qui, après avoir déchargé sa cabine, m'invite à boire le café. Ça ne se refuse pas. Je me retrouve donc attablé à 7h, avec toute la famille, à prendre le petit-déjeuner. C'est beau comme une pub Ricoré. On discute de la montagne, de Villaz qui devient le Beverly Hills d'Annecy en accueillant sa population huppée, de la neige à venir et du temps qui passe. D'ailleurs j'ai des sapins à livrer : Je quitte l'assemblée, non sans avoir retourné la boite de Ricoré sur la table.

    L'avantage en porteur c'est qu'on s'arrête n'importe où : sur le chemin du retour je trouve une boulangerie et mon pain pour la fin de la semaine.

    Je récupère ma remorque et m'en vais en direction de Combloux. Il paraît que la vallée de l'Arly est désormais interdite aux PL, je passe donc par Sallanches.
    La route de Megève n'est pas des plus difficiles, d'ailleurs je ne me faisais guère de souci : il y a tellement de cars qui y montent que ça doit être un minimum aménagé.
    Aujourd'hui encore il fait un temps magnifique sur la Haute-Savoie. Depuis Combloux on peut admirer le Mont-Blanc, immense et presque encore blanc.

    J'arrive chez le pépiniériste, il est 9h. La cour est toute petite mais je tiens pile pour ne pas déborder sur la route. A peine suis-je en place, arrive un autre camion Jeantin-Casset. Grosse pagaille dans la rue et changement de programme improvisé par le destinataire : le Jeantin ira directement à Megève et moi je décharge finalement tout ici, à Combloux, alors que je devais aussi aller à Megève. Soit.
    Je donne un coup de main pour décharger, car tout le monde est très cool ici. Certes je me mets de la terre plein les pieds, le jean et le pull... mais tant pis, ça me fait plaisir.

    Il ne faut pas moins de 2h30 pour venir à bout du tas de sapin.
    Une fois vide je reçois deux SMS de chargement : Seynod, puis Chambéry.
    Je commence par Seynod, une petite boite qui fabrique des grosses bobines de fil de fer. J'en charge 11, pour 11 tonnes.
    Ensuite Chambéry, une grosse cimenterie qui ne fabrique plus rien mais qui sert encore, pour le moment, d'entrepôt pour stocker ce qui est fabriqué ailleurs.

    Tout se passe pour le mieux, j'ai même le temps de faire un crochet chez Volvo pour un rajout de liquide de refroidissement (encore !) ainsi qu'un rappel d'atelier, une mise à jour de je ne sais quoi... qui de toute façon n'aura pas lieu : la valise de l'atelier n'étant elle-même pas à jour.

    Je m'en retourne à Jarcieu, tel le chauffeur régional qui revient de sa tournée.

    J'en décharge, j'en recharge : Montélimar, Valence, Montélier.
    Je prends ma douche, et roule jusqu'à Montélimar où  je trouve une place douillette dans une zone commerciale.

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  • Pont du Teil
  • Vendredi 31 Octobre 2014
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    Dernier jour d'octobre, toujours sous un soleil resplendissant. La période est propice aux cartes postales : chaque matin et chaque soir c'est une effusion de couleurs dans le ciel, il y a de quoi faire de très belles photos... sauf dans une zone commerciale à Montélimar.

    Je commence par décharger dans un magasin de bricolage. Le cariste est fan de mon camion et du coup il sort les palettes de ciment avec le plus grand soin. Des comme lui on aimerait en voir tous les jours.

    Avant d'aller vider Montélier et Valence, deux lots qui sont dans la remorque, je vais charger le porteur au Teil.
    Tout se passe pour le mieux, à 10h c'est fait, et je pars faire mes livraisons.
    J'en étais sûr : mes deux lots dans la remorque m'imposent deux manœuvres bien merdiques : chez le premier c'est pour passer le portail en marche arrière, chez le deuxième c'est pour me mettre à quai entre deux camions. Je relativise en me disant que c'est autant d'expérience acquise... et puis j'ai le temps, il fait beau, mieux vaut s'exercer dans ces conditions.

    Midi arrive, j'ai fait mes livraisons. Je reçois une ramasse dans une cartonnerie, toujours à Valence. Je vais me poster devant, à l'ombre, afin de prendre le temps de manger ma tranche de jambon et mes nouilles.
    A 12h45 je démarre pour me mettre à quai, et LE coup classique : un STAT débarque à fond les ballons pour me voler la place. Pile au moment où je venais de démarrer. Tant pis, c'est comme ça, je m'en fous, peu importe... Mais bordel je n'ai vraiment pas chance !

    Je ne charge donc qu'à 14h, puis retourne au dépôt avec mes ramasses, comme hier et avant hier...
    Je reste à Jarcieu jusqu'au soir, entre le quai, la pompe à gasoil et la machine à café. Lorsque mon chargement est enfin complet je rentre à Mâcon, via les petites routes car c'est l'apocalypse sur l'A7.
    21h40, Routiers Bretons, fini.