Transports Rynart

C’est avec l’inestimable aide de Rinus Rynart que ce dossier a vu le jour.

Nous allons vous présenter un transporteur hollandais mythique, un siècle de transport, ce n’est pas rien et c’est donc Rynus qui vous retrace toute l’histoire :

Frans, mon grand-père a démarré dans le transport en 1920 à l’aide d’un cheval et d’une carriole, il effectuait alors des livraisons de bois pour l’usine de Klundert.

Mon père quant à lui, a commencé sa société en 1930 avec un petit Ford équipé Gazogène et sa remorque. En 1946, à la sortie de la seconde guerre mondiale, il a alors acheté son premier « gros » camion, un MACK avec lequel il roulait en Hollande, en Belgique puis en Allemagne. Son entreprise a ensuite grandi, et son parc s’est étoffé avec des GMC, quelques Scania et Mercedes en camion remorque.

Je suis né en 1944, et immediatement après avoir terminé mes études, j’ai commencé à travailler dans l’entreprise paternelle, tout comme mes frères. Au départ, je travaillais dans les ateliers du garage où je faisais les pneus, le lavage des véhicules et bien sûr la mécanique. Aussitôt après avoir obtenu mon permis de conduire en 1962, j’ai commencé à rouler.

J’ai alors roulé avec du DAF, HENSCHEL, SCANIA et FIAT vers la Suisse, l’Italie à Milan et Rome via le Col du Mont Cenis ou par le Col du Brenner en Autriche. Une fois, en montant le Brenner, je n’ai pas pu arriver au sommet avec mon SCANIA 135cv chargé avec 20t. Il a fallu qu’une depanneuse du coin me vienne en secours. J’ai aussi effectué quelques voyages vers la Scandinavie à Göteborg et Stockholm du temps où on roulait encore à gauche en Suède, car ce n’est qu’en 1967 que les Suédois ont commencé à rouler à droite. De temps en temps, je faisais aussi des voyages vers Barcelone, et aussi vers la Grèce.  Bien que les routes soient en assez piteux état, nous arrivions à boucler le tour Hollande/Catalogne dans la semaine, entre les attentes en douanes, il ne fallait pas trainer… L’entreprise n’a cessé de grandir, le parc s’établissant alors à 35 attelages.

Je me suis marié avec Martha en 1966, ce qui a eu pour conséquence de provoquer un sérieux conflit familial du fait que nous avions deux religions différentes, mais j’étais tellement amoureux !! Cette histoire de religion différente ne posait aucun problème à Martha et moi par contre. Plus tard, j’ai donc décidé de créer ma propre compagnie de transport, c’est comme ça qu’est née RYNART-TRUCKS en 1967

Dès le départ, j’ai effectué mes premiers voyages vers l’Asie, mes frères et mon père n’étaient pas aussi enthousiastes que moi, et c’est en 1969 que je suis allé pour la première fois jusqu’à Téhéran en Iran. Mes frères quant à eux ont continué la société de mon père qui avait pris sa retraite. Mes deux frères ont disparu malheureusement prématurément.

J’ai acheté un Scania L-56 de seconde main que j’ai peint en vert blanc et rouge, mes frères ayant le vert, jaune et rouge, je ne voulais pas les copier. Je roulais alors sur la Hollande et tout le reste de l’Europe, je faisais énormement d’heures par semaine et petit à petit, j’ai acheté d’autres camions, des Volvo, DAF, FIAT et plus tard des Mack. Après le 4ème camion, j’ai aussi changé mes couleurs en passant au bleu, blanc et rouge car j’étais affrété et en bon terme avec mon affréteur G+G de l’époque qui avait ces couleurs là.

Rapidement, en 1969, j’ai eu une offre de transport pour livrer un chargement de machines à Téhéran en Iran, à ce moment là, rares étaient les compagnies européennes de transports présentes sur la ligne. Astran à Londres effectuait cette ligne avec quelques camions. Nous avons alors rendu visite au Touring Club Hollandais, acheté quelques cartes routières et c’est comme ça que j’ai fait mon premier voyage avec un Volvo F88, en double avec un de mes chauffeurs. Nous avons bien étudié le parcours et les différents coûts et nous avons même trouvé un retour à Téhéran avec un lot de tapis pour la Hollande. Très vite, nous avons fait plus de voyages et nous avons acheté d’autres camions. A cette époque, le pont sur le Bosphore n’existait pas, seul un ferry effectuait la liaison. Bien sûr, nous n’avions ni téléphone portable ni GPS. Nous ne travaillions alors qu’avec des cartes papier. Les chauffeurs avaient simplement un contact téléphonique ou un telex dans des hotels définis le long de la route. L’hiver il fallait parfois affronter des conditions terribles dans le col du Tahir à plus de 3000m d’altitude et une chaleur horrible en été.

En 1970, nous avons été contacté par Philips Electrical à Eindhoven pour livrer des radios et des téléviseurs à Karachi au Pakistan pour le marché asiatique. 10 camions étaient nécessaires pour ce voyage. Jamais personne avant nous n’avaient été là-bas avec des camions européens, c’était alors une vraie aventure. De la route de Téhéran jusqu’au Pakistan nous ne connaissions que ce que nous disait la carte papier, elle avait l’air toute petite. Nous avons alors effectivement trouvé une route étroite, souvent dépourvue d’asphalte, avec parfois des trous énormes, à travers des déserts, des montagnes et de la boue.

Philips a exigé que le transport se fasse avec le maximum de sécurité pour ses marchandises, les bandits étant nombreux. Nous avons mis en place des containers de 40 pieds, fermés par de gros cadenas. Nos opérations de transport ont été effectué avec sérieux, nous avons finalement fait cette liaison de nombreuses années. Il fallait compter pas loin de 20.000km l’aller retour entre Rotterdam et Karachi et 2 mois d’absence pour le chauffeur. La route nous faisait traverser l’Allemagne, l’Autriche, la Yougoslavie ou la Roumanie, puis la Bulgarie, la Turquie, l’Iran. C’est après Téhéran que c’était le plus compliqué, nous suivions les traces des vieux camions locaux, parfois nous nous enlisions, et souvent ce sont les gars du coin qui nous sortaient des pièges. Pour arriver à Quetta à l’ouest du Pakistan, il fallait traverser la rivière dans son lit à cause d’un pont trop petit pour les semi remorques, ce n’est qu’ensuite que nous retrouvions un peu d’asphalte jusqu’à Karachi. Du fait que le Pakistan était une ancienne colonie brittanique, il fallait rouler à gauche.

Le plus compliqué était de communiquer avec la population, en Europe de l’est on peut se debrouiller si on parle allemand, mais dès la frontière avec la Turquie, les gens ne parlent que leur langue natale, mis à part les gens des hotels, ou dans les bureaux. Il fallait alors parler avec les mains, les pieds, faire des dessins. Nous avions aussi de gros problèmes avec les nombreux changements de devises à chaque frontière. Nous partions avec 5000$ en cash que nous cachions dans un coffre fort sous la couchette, à cette époque il n’était pas possible de régler en carte de crédit, nous devions régler tous les frais le long du voyage en cash. Heureusement dans ces pays, le carburant ne coutait pas grand chose.

Il a rapidement été compliqué de recruter des chauffeurs hollandais, la plupart d’entre eux ne voulaient plus partir de longs mois sans retour à la maison. Ce sont alors des chauffeurs turcs qui ont pris le relais, plus à l’aise avec les langues et la culture locale.

 

Parallèlement, Rynard Truck a developpé le transport vers Bagdad, Mosul, vers le Sud Iran, Kaboul en Afghanistan, Lahore au Pakistan à 25km de la douane avec l’Inde par le terrible col de Khyber, certains voyages nous emmenaient aussi vers le Koweit, Ryadh et l’Arabie Saoudite. Pour ce faire nous proposions tout un éventail de remorques à nos clients, du baché au frigo en passant par les caisses mobiles. Nous transportions de tout : electronique, équipement pour la maison, produits chimiques, machines ; au retour nous revenions avec du textile, des chaussures en Turquie ou en Roumanie vers la Hollande. Il y avait énormement de trafic routier avec la longue fermeture du canal de Suez pendant la guerre entre l’Egypte et l’Israël, ce qui obligeait les cargos à faire le tour par l’Afrique du sud.

Etant donné que je travaillais en parrallèle avec mes 3 autres frères, nous avons décidé de nous réunir pour créer la Rynard-Holding, à nous quatre nous disposions de près de 100 camions, j’en gerais 40, mes frères 60, avec des attelages divers et varié durant quelques années à travers l’Asie.

Dans les années 80 nous avions pas mal de travail vers l’Arabie Saoudite ou nous faisions aussi des transports interieurs. Je me suis alors installé à Damman au sud du Koweit à proximité du golf Persique ou je louais une villa. Ma famille m’a rejoint une fois installé. Sur place nous faisions du transport de materiaux de construction vers Ryadh, Jeddah. Plus tard, mon autre frère Frans et sa famille se sont aussi intallé vers chez moi. Malheureusement ça n’a pas fonctionné très longtemps, j’ai alors quitté la Rynart-Holding pour continuer en « solo » avec la Rynart-Trucking. J’ai repris les mêmes couleurs de flotte qu’en 1969. J’ai repris alors mes trafics vers l’Asie avec une flotte un peu plus réduite de 25 attelages dont 10 Mack, le reste du parc étant composé de Scania, Daf et Volvo. A partir de là, j’ai toujours travaillé seul.

 

Sur le long trajet entre Rotterdam et Dubai, il fallait compter 14.000km aller retour, et entre 5 à 6 semaines pour boucler le tour. Pour reduire les coûts, au Koweit il nous arrivait de composer des attelages longs avec 2 semis, soit 35m de long. Du fait que nous avions un bureau au Koweit, certains de nos camions étaient immatriculé la bas. Durant des années nous avons parcouru les pistes à travers le desert entre le Qatar et Abu Dhabi. La concurence est devenue de plus en plus féroce au fil des années, beaucoup d’Anglais, d’allemands de français et de suédois, mais aussi la très sévère baisse des prix due aux transporteurs du bloc de l’Est, plus particulièrement les Bulgares de la SOMAT et les Hongrois d’Hungarocamion. A force de gratter sur nos marges, nous avons fini par jeter l’éponge, vendre quelques camions et nous recentrer sur l’Europe.

Une sale période…

Mon fils Rob, ses soeurs Carola et Patricia ayant terminé leurs études m’ont rejoint à l’entreprise à la fin des années 80, Rob travaillait au garage pour apprendre à réparer, laver les camions et aussi à rouler. Carola faisait les plannings et Patricia la partie administrative, puis elle a rejoint la grande compagnie Shell ou elle a fait carrière. Dans cette période là, les trafics sur l’Asie commençaient à devenir de moins en moins rémunérateurs, je me suis recentré sur notre bonne vieille europe. Au tout début des années 90, un de mes plus grands clients en France a fait banqueroute, du coup j’ai eu des impayés énormes pour 200.000$. Le choc a été terrible pour nous, mais je n’avais pas tellement d’issues de secours, l’entreprise se prenait des pénalités d’impayés énormes sur le leasing des camions, j’ai à mon tour déposé le bilan en 1991, j’ai eu beau lutter, je ne pouvais rien faire. J’ai alors tout vendu, les Mack, les Scania, les bureaux. Je suis resté assis à la maison, sur la paille.

Après la pluie, le beau temps !

Au bout d’un moment sous l’insistance de mes enfants, je me suis relancé dans la mélée. Nous avons appelé notre société Rynart-Trading. Après un dépôt de bilan, on doit changer de nom, mais bien sûr pas un nom de famille, ça c’est pour la vie !! On a juste ajouter TRADING, parce que ça fait international. Mon fils Rob a pris alors les commandes de notre premier Scania, en Europe, puis petit à petit vers la Turquie encore. Comme nous avions des contacts encore la bas, nous avons repris des chauffeurs turcs. Ce sont des bosseurs et de très bon chauffeurs. Mais l’activité n’était pas aussi forte que dans les années 70/85.

En 1992, sous l’impulsion du président russe Mikhaïl Gorbatchev, le pays s’est ouvert durant cette période appélée Perestroïka, l’Union Soviétique a volé en éclat, tout un tas de nouveaux pays ont emmergé créant de nouvelles entitées : Ukraine, Kazachstan, Azerbadjan, Georgie etc. Des tas de nouvelles entreprises se sont crées achetant des tas de produits en Europe de l’Ouest, bien sûr nous avons fait rapidement des voyages vers ces destinations.

Dès 1993 nous avons réalisé notre premier voyage vers Moscou avec un voyage de vaisselle pour équiper un nouvel hotel. C’était en fevrier, il faisait vraiment froid. J’avais accompagné mon fils pour voir les routes et surtout comment se passaient les frontières. Nos Visas étaient en règle, il fallait compter parfois une dizaine d’heures pour passer la frontière en Pologne, les douaniers passaient cargaison et véhicule au peigne fin, ils étaient encore à l’heure URSS. J’ai trouvé les restaurants assez sales, et les gens pauvres. Le dechargement quant à lui a été rapide. Le gasoil ne coutait pas grand chose, autour de 10c le litre. Au final, on a rechargé à Varsovie, 5000km en 10 jours, c’est raisonnable. Nous avons ensuite renouvellé l’experience vers d’autres villes que Moscou.

C’est en 1994 que nous avons obtenu un très gros contrat d’une compagnie britanique pour livrer du matériel de forage, materiel de raffinage pour Aktau au Kazachstan. Pour faire ce type de trajet, il fallait compter pas loin de 10.000km aller retour et presque 4 semaines dehors. Les routes du Kazachstan étaient parfois en piteux état à travers la steppe et le desert, parfois c’était simplement une piste de sable, l’été les temératures dépassent largement les 40°, mais nos camions étaient équipés pour ça. La compagnie Chevron rapidement satisfaite de nos services nous demandait chaque semaine des camions, j’ai été acheter d’un seul coup 10 Volvo FH et quelques semi neuves aussi. J’ai aussi acheté des frigos pour transporter la bouffe des employés bloqués de longs mois dans la base vie des champs pétroliers.

A cette époque notre souci principal était la difficulté pour obtenir des visas russes pour nos chauffeurs Turcs, qui de plus n’étaient pas très friands de ce genre de destination. De notre côté ce n’était pas évident non plus de les faire rentrer à la maison, il fallait des chauffeurs pour relayer et remplacer les collègues au bout de 4 semaines. Si les turcs sont au top vers le Moyen-Orient, sur la Russie c’était pas aussi simple, il a fallu nous résoudre à nous séparer d’eux. Nous avons alors engagé des chauffeurs Estoniens qui parlent courarement le russe et avec qui il est facile d’avoir des visa, et ouvert une agence à Parnu en 1995, (avec l’aide d’un de nos chauffeur allemand qui vivait en Estonie),  appelée : a/s Rynart-Trading.  Notre porte feuille de client s’est vite garni, nous livrions beaucoup de MARS/Nestlé en frigo pour Moscou, des primeurs pour un gros exportateurs de fruits vers Novo Sibirks, Almaty, Taskent, des tours à 15.000km !

Un jour un de nos camions a été bloqué à Smolensk, à la frontière de la Bielorussie et de la Russie par les douanes, juste parce que les documents avaient été mal redigés, une erreur au bureau. Le camion a été mis sous scellés, et nous devions regler une amande de 50.000$, une histoire de fou ! J’ai bien été voir un avocat à Moscou, mais l’affaire aurait pu durer des mois. Jusqu’au jour ou le chef des douanes m’a contacté au téléphone, me demandant carrement de lui filer 5000$ en cash et qu’il laissait le camion partir. J’avais pas trop le choix, j’ai pris le premier avion pour Moscou et sauté dans un train pour Smolensk. Bien entendu le chef n’a jamais voulu me faire de papier comme quoi il laissait passer le camion… Le type a mis l’argent dans sa poche, mon camion est subitement devenu en règle. Pays de fous, corrompus !

 

Du fait que nous faisions pas mal de transport de textiles pas très lourds et que nous avions vu circuler des attelages longs Suédois et Finlandais en Russie, avec mon fils Rob nous avons l’idée d’atteler deux semi remorques reliées avec un dolly comme les Australiens. On a fait le premier voyage comme ça direct depuis la Hollande. On partait tard le soir avec 2 chauffeurs pour rouler au maximum de nuit à travers l’Allemagne puis la Pologne et enfin la Russie et parfois même jusqu’à Taskent au Kazachstan. En Russie quand la police nous arrétait ça se reglait avec un peu de bakshish, par contre en Allemagne on s’est fait arréter une fois, il a fallu payer 100DM (45€), mais surtout faire des navettes entre la frontière NL et PL. Alors plus tard on a affiné le système, 2 attelages normaux se rejoignaient à Brest à la frontière russe pour ne former qu’un seul attelage, et pareil au retour. Mais tout ça n’a pas duré très longtemps, rapidement les prix se sont écroulés, les volumes à transporter aussi, nous vivions un peu la même chose qu’à la fin de l’El Dorado vers le Moyen-Orient.

Donc, à partir 2005 nous nous somme à nouveau recentrés sur l’Europe et particulièrement vers la Grande Bretagne ou nous étions tractionaires pour des grands groupes comme Mammoet, Smeeets, Estron. Durant la même période, nous faisions encore des transports vers le Kosovo pour le compte de l’OTAN, avec des voyages d’aliments, d’outillages via la Roumanie ou l’Italie puis la Grèce. Parfois c’était assez risqué d’aller au Kosovo.

En 2007, fatigué par toutes ces années, j’ai pris ma retraite, mon frère Jeff est décédé d’un cancer à 60 ans, Mon autre frère Ad a lui fait une attaque à 60 ans aussi, j’avais envie donc de me reposer un peu avec Martha, ma femme. Nous avons alors fait du tourisme à travers le monde en avion, et en Europe avec la caravane. Rob mon fils avec Carola ma fille m’ont donc remplacé à la tête de Rynart-Trading. Rob a crée sa propre compagnie Rynart-International avec du nouveau travail vers la Russie et la Kazachstan, mais il ne voulait plus peindre les camions comme avant, ça ne me plaisait pas tellement, mais comme il dit, ça coute 3000€ par camion, et chaque € compte aujourd’hui, je peux pas faire grand chose sinon reconnaitre qu’il a raison.

Epilogue :
Desormais, c’est Rob qui dirige la compagnie, mais ça fait toujours parti de ma vie. Les camions, les remorques sont définitivement blancs, ça diminue les coûts. Au fur et à mesure des renouvellements de parc, les camions en couleur disparaissent. Moi je passe mon temps sur Facebook, et de temps en temps je vais donner un coup de main au bureau et discuter avec les chauffeurs. Dès 2010, la société continue avec des clients historiques, vers Amman, Bagdad. Après la chute de Saddam l’armée americaine a eu besoin d’être approvisionnée, et nous avons répondu à l’appel. La plupart du temps, nous le faisions avec des chauffeurs turcs. Nous livrions alors tout ce dont ils avaient besoin.
Au départ, avant de nous contacter, tout partait par fret aérien, mais celà coutait si cher qu’il valait mieux le faire par la route en camion frigo. Bien sûr les besoin en équipement divers étaient importants aussi, plateaux et tautliners ont été aussi mis à contribution. L’armée americaine nous escortait alors avec leurs Jeep dès la frontière Turco-Irakienne pour éviter les groupes terroristes, et nous avons toujours livré sans trop de dommages. L’aller retour sur Bagdad durait en moyenne 4 semaines pour 10.000km.
A partir de 2014, nous avons été présents sur la ligne de Kaboul en Afghanistan, toujours pour le compte de l’OTAN, pas moins de 100.000 personnes americaines et européennes à approvisionner, encore une fois face au coût prohobitif de l’aviation, c’est par la route que ça s’est fait. Le trajet n’était pas autorisé par la Turquie et l’Iran car ils sont « ennemis » avec les americains. L’Otan nous faisait passer alors par l’est, Allemagne, Pologne, Bielorussie, Russie, Kazachstan, Uybekistan. Le plus compliqué était de passer le Col de Sallang, des grandes montagnes au nord de l’Afghanistan à près de 3000m d’altitude. Les hivers y sont bien évidement très rudes, malgré les chaines, il fallait parfois avoir recours à de gros bulldozer pour grimper.
Nous avons alors testé un Volvo 8*4 attelé à une remorque. Nous transvidions la marchandise lorsque la météo était vraiment mauvaise, ce camion était parfait pour affronter les pires conditions.
L’aller retour se faisait toujours en 4 ou 5 semaines pour environ 13.000km entre le Benelux et Kaboul, suivant la météo et les aléas. Les chauffeurs russes étaient parfaits pour le job, le trajets traversant une bonne partie du territoire Russe. Malgré tout, nous étions parfois la cible des Talibans, une de nos remorques a été shooté par une rocket lancée depuis les montagnes, mais par chance, le chauffeur n’a rien eu. Il a même éteind le début d’incendie, a livré à Kaboul et a ramené le frigo explosé en Hollande, un vrai héros !

En moyenne, chaque semaines, 4 ou 5 camions partent vers Kaboul, et 1 ou 2 vers Bagdad, au total 30 attelages roulent pour l’Otan, c’est du bon travail, mais quand même dangereux.
Pour ma part, je coule desormais une retraite heureuse, et je continue de voyager !

 

Rinus Rynart